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A.G.M. ou Athlètes génétiquement modifiés

Chronique sportive.

Mahaut Engérant

Une véritable bombe a explosé dans le monde du sport professionnel plus tôt ce mois-ci : la tsarine du tennis mondial, Maria Sharapova, est déclarée positive à un test de dopage à l’occasion de l’Open d’Australie, le premier Grand Chelem de la saison. Pour de nombreux amateurs de sports professionnels, c’est presque inconcevable pour l’athlète qui est devenue une icône incontestée du sport féminin à travers le monde.

Une annonce renversante

Portant le noir du deuil, c’est la star du tennis féminin elle-même qui en a fait l’annonce lors d’une conférence de presse à laquelle elle avait convié plusieurs journalistes du milieu sportif. Incriminée pour avoir consommé du meldonium, Maria Sharapova a spécifié qu’elle ignorait que ce produit avait tout récemment (le 1er janvier 2016) été ajouté à la liste des substances interdites. Aux dires de la principale concernée, elle n’aurait pas pris le temps de lire le courriel que l’Agence mondiale antidopage lui avait envoyé et de vérifier si le meldonium figurait parmi les nouveaux produits prohibés du circuit. Admettant néanmoins qu’elle avait commis une « grave erreur », elle s’est défendue en affirmant qu’elle consommait cette substance depuis près de 10 ans pour traiter des problèmes de diabète et d’arythmie cardiaque récurrents dans sa famille.

Suspendue provisoirement par la Women’s Tennis Association (WTA), la quintuple championne en Grand Chelem risque une suspension de deux à trois ans pour son contrôle positif. Autres sanctions majeures : le constructeur automobile Porsche, l’équipementier américain Nike et l’horloger suisse Tag Heuer ont tous les trois annoncé qu’ils suspendaient leurs activités avec l’athlète féminine la mieux payée de la planète.

Quoi que l’on en pense, il est tout de même étonnant qu’une athlète du calibre de Sharapova, entourée comme elle l’est d’entraîneurs, de médecins, de conseillers et d’avocats, n’ait pas été avertie qu’une substance qu’elle consomme régulièrement vienne d’être classifiée « produit dopant ». Est-ce vraiment légitime pour la septième raquette mondiale de plaider l’ignorance ? Il est difficile d’y croire…

Mahaut Engérant

Le circuit de la WTA en danger ?

Comme l’annonce d’un contrôle positif va vraisemblablement priver Sharapova de tennis au cours des prochaines années, le circuit de la WTA se retrouve avec un énorme vide à combler en son absence, d’autant plus que le tennis féminin peinait déjà à enthousiasmer les amateurs de sport autour du monde. La WTA fait effectivement face à un problème colossal puisque, à l’exception de Serena Williams qui demeure la maîtresse incontestée des courts, aucune nouvelle championne ne semble véritablement émerger du circuit. Sharapova était effectivement l’une des seules joueuses de tennis du circuit féminin à remplir les stades match après match.

Recours aux produits dopants : les motivations

Maria Sharapova n’est certainement pas la première vedette du monde sportif à être reconnue coupable de dopage. Sans trop se remuer les méninges, on pense rapidement à Alberto Contador, Lance Armstrong et Ben Johnson, trois autres grands noms du sport professionnel qui ont vu leur carrière et leur réputation ternies par un contrôle positif.

Si les risques courus sont si grands, pourquoi des athlètes de haut niveau ont-ils alors recours à de tels produits ? Parce qu’ils sont animés d’un désir insatiable de gagner ? Dans certains cas, certes, mais présenter le dopage comme une simple tricherie ne suffit à rendre compte de la réelle complexité du phénomène.

Dans une ère où les exigences du sport de haut niveau sont excessivement élevées et où les performances sont récompensées de primes de plus en plus généreuses, l’athlète est constamment soumis à des pressions insistantes de la part de groupes qui ont un réel intérêt à le voir réaliser des performances. Entraîneurs, commanditaires, groupes médiatiques, supporters — tous nourrissent cette nécessité pour l’athlète de devoir gagner à tout prix. Il semble donc évident que le recours à des substances illicites s’avère être une réponse au stress quasi insoutenable que ressent l’athlète. De plus, la surcharge du calendrier et la multiplication du nombre d’entraînements épuisent l’athlète et laissent très peu de place à la récupération. Les produits dopants apparaissent donc également comme un moyen de maintenir la forme tout au long de la saison.


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