La chefferie du Parti Québécois est pour l’instant l’affaire d’un seul homme : Pierre-Karl Péladeau. L’homme d’affaires souverainiste affiche une avance remarquable vis-à-vis de ses adversaires. Dans les trois sondages Léger effectués depuis le 27 septembre, le premier score de PKP était à 53% avant de monter à 58% en novembre et d’atteindre 68% le 12 décembre. Il est tellement en avance que Jean-François Lisée a rendu son tablier avant même que le combat ne soit commencé, et a ainsi concédé la victoire au propriétaire de Québecor.
Plus on se rapproche du lancement officiel de la campagne, plus on ressent le désir des péquistes d’en savoir plus sur les intentions du favori. Comment se fait-il qu’un homme d’affaires à la réputation intransigeante puisse soudainement se réinventer en social-démocrate ? PKP se donne des airs de leader syndical. Son discours à la fonderie Mueller, dont la fermeture a été annoncée en décembre, debout à l’arrière d’un camion pick-up dans sa circonscription de St-Jérôme vaut la peine d’être regardé. Heureusement pour vous, les caméras de TVA (quel hasard!) étaient sur place pour capturer l’instant !
Il relèverait du miracle qu’un candidat remporte plus de voix que Pierre-Karl Péladeau au premier tour de la chefferie. Mais contrairement à ce que Jean-François Lisée a dit, l’élection n’est pas gagnée d’avance.
Ce qui rend la chose intéressante est le mode de scrutin du Parti Québécois ; mode uninominal majoritaire à deux tours. Dans le cas où PKP n’obtiendrait pas la majorité absolue (50% +1) au premier tour, le PQ organiserait un second tour entre les deux premiers candidats. Cela pourrait préparer le terrain pour une stratégie du « n’importe qui sauf PKP », éventualité à laquelle certains candidats et syndicats se préparent probablement déjà.
Le PQ n’a pas encore annoncé sa décision sur le nombre de débats qui seront tenus durant la campagne. Le principal argument contre la tenue de cinq débats est leur prix. C’est un argument ridicule ; l’avenir de la formation politique est en jeu et pendant que la direction du Parti hésite à organiser plus de deux débats, le favori de la course a annoncé qu’il utilisera un avion pour se déplacer lors de la campagne. De plus, cela ne fera vraisemblablement pas partie des dépenses électorales. Belle ironie !
Au cours de la campagne, Pierre-Karl Péladeau devra en laisser savoir plus sur ses positions et orientations, ce qui le fera probablement descendre dans les sondages. On ne peut jamais satisfaire tout le monde. Au premier débat non-officiel le 28 février à l’Université de Montréal dans le cadre de la semaine de la souveraineté, M. Péladeau était hésitant sur le calendrier référendaire et n’a pas trop osé s’engager sur la question. Surtout avec sa position de favori, les attaques seront principalement dirigées contre lui. De plus, les nombreux conflits de travail au sein de Québecor laissent une tâche dans son dossier. Les syndicats, alliés de longue date du PQ, semblent réticents à laisser les reines du PQ à M. Péladeau.
Pour l’instant, la lutte pour la deuxième place se tient entre Bernard Drainville et Alexandre Cloutier. Jean-François Lisée s’est retiré de la course et ne fait donc plus partie de l’équation. Toutefois, il est loin d’avoir donné son appui au favori «[Pierre-Karl Péladeau] n’est pas notre premier choix et pour certains d’entre vous n’est pas votre deuxième choix ».
Une 2e place de Martine Ouellette ou Pierre Céré est quasiment impossible, leurs meilleurs scores en sondages étant respectivement 5% et 1%. Bernard Drainville se présente en ce moment comme la meilleure deuxième option.
C’est dire que la vraie course se fait pour la 2e place. Cette place pourrait permettre d’affronter Pierre-Karl Péladeau dans un match simple au deuxième tour et de peut-être créer la surprise générale en ralliant assez d’appuis pour remporter la chefferie. Tout au moins, un deuxième tour donnerait au Parti Québécois un vrai débat en profondeur.
Il reste à savoir si les autres candidats seront capables de limiter le favori à 50% – 1 au premier tour car la dernière chose qu’il faille au PQ est le couronnement d’un candidat qui n’aura pas été testé sur le champ de bataille des idées. Un candidat bien affirmé avec des idées claires sur les sujets importants de la province donnera plus de chance au Parti Québécois de former le prochain gouvernement, mais aussi de représenter une opposition efficace pour les trois prochaines années.