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Un plaidoyer pour le bilinguisme

Graham Fraser entretient Mcgill du rôle du français dans l’éducation postsecondaire canadienne.

Graham Fraser, le commissaire aux langues officielles du Canada, est venu à l’Université McGill le vendredi 25 janvier dernier dans le cadre de la Francofête. Ancien journaliste au Toronto Star, reconnu à travers le pays pour sa connaissance pointue de la scène politique québécoise et pour sa maîtrise de la langue de Molière, Fraser a parlé du bilinguisme dans les institutions universitaires canadiennes.

Fraser a débuté son allocution en retraçant les combats linguistiques qui ont eu lieu sur le campus même de McGill et qui ont provoqué des mouvements de revendication similaires dans les autres institutions postsecondaires à travers le Canada. Il s’est d’ailleurs réjoui des changements qui ont eu lieu dans l’administration de l’université au cours des 40 dernières années, changements qui permettent à présent aux francophones de mieux s’intégrer à la communauté mcgilloise. Fraser a particulièrement fait l’éloge de la Faculté de droit, dont le programme très reconnu requiert entre autres que ses étudiants soient bilingues au moment de leur admission.

La normalité du bilinguisme

Suite à ce survol historique, il a souligné l’importance d’enseigner les deux langues officielles, particulièrement à l’extérieur du Québec. En prenant la Faculté de droit de McGill comme modèle, il a expliqué : « Suivant la tradition, les universités anglophones continuent de traiter le français comme une langue étrangère –une langue étrangère qui doit être enseignée dans le département de littérature pour former des enseignants au secondaire. Donc, quarante ans après la politique sur les langues officielles, les universités laissent au gouvernement fédéral la responsabilité de former ses propres employés. Cette manière de procéder est aussi étrange que si la Faculté de génie de McGill décidait d’arrêter d’enseigner à ses étudiants comment utiliser les ordinateurs dans leur travail, sous prétexte que leur employeur peut aussi leur montrer comment se servir d’un ordinateur », s’est-il étonné.

Le Québec s’invente des disputes

Interrogé sur la prépondérance dans les médias québécois de la question de la protection de la langue française et sur le projet de loi d’identité québécoise proposé par Pauline Marois, qui rendrait la maîtrise du français nécessaire à l’obtention de la citoyenneté québécoise, il a refusé de s’immiscer dans un débat qu’il considère de « niveau éminemment provincial ».

Du même souffle, il a tenu à souligner l’apport de la communauté anglophone au Québec. « La minorité anglophone s’est transformée d’une minorité plus ou moins unilingue à une communauté à presque 80 p. cent bilingue, a‑t-il rappelé. Je trouve regrettable que cette réussite et cet engagement dans la société québécoise n’aient pas été reconnus par les partis de l’Assemblée nationale. Au lieu d’applaudir à cette importante transformation, plusieurs Québécois ont tendance à traiter la minorité anglophone comme s’il n’y avait pas eu de changement depuis 30 ans. On entend des animateurs de radio parler de la minorité anglophone comme des Ontariens. On entend des députés du Parti Québécois qui soutiennent que ce projet de loi est le seul moyen qu’on peut mettre en place pour préserver le français dans un contexte où le Québec fait partie du Canada. »

McGill ferait patte blanche ?

Les commissaires aux affaires francophones de l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM), David-Marc Newman et Amélie Gouin, ont cru bon rectifier certains des propos de Fraser en ce qui concerne la place du français à McGill. « Je pense que Monsieur Fraser a surestimé les efforts faits par l’Université McGill pour accommoder les francophones, a soutenu David Marc-Newman. McGill tient au fait qu’elle est une institution unilingue anglophone et, bien qu’elle offre des droits aux étudiants francophones, ces derniers sont minimes. Par exemple, les départements rendent parfois la vie difficile à ceux qui souhaitent écrire leurs travaux en français. »

Un bémol, seule une trentaine de curieux se sont pointés pour la conférence qui se déroulait au tribunal-école de la Faculté de droit, laissant ainsi plus de 80 sièges inoccupés. L’organisateur de l’événement, Hugues Doré-Bergeron, étudiant en droit et membre de la Commission des affaires francophones, a exprimé sa déception concernant le nombre de participants : « Nous pensions qu’il y aurait plus de gens qui viendraient puisque le commissaire joue un rôle très important au Canada ».


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