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McGill/Méguill

« Le coquin ! S’il était gendarme et moi Guignol,
Je lui montrerais bien de quel bois je me chauffe,
Après un coup frappé dans les jambes du beauf
Il saurait épeler ce doux mot : roubignoles. » Raymond Radiguet

Luce Engérant

Nous sommes le mercredi 22 octobre au soir, l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) est en train de tenir son Assemblée Générale. Près de 750 étudiants ont répondu présent. Les milliers d’autres n’ont pas pu, cependant, se présenter au Pavillon Shatner où se tenaient les discussions. Nous suivons donc avec eux, en direct, les évolutions des débats via le site Internet du McGill Daily.

Il est près de minuit. La tension s’est relâchée. On entre maintenant dans la phase plus consensuelle de l’Assemblée Générale. La motion en rapport au conflit israëlo-palestinien ayant été ingénieusement sabotée par un de ses pourfendeurs, l’essentiel semble avoir été dit. L’AÉUM a fait sa démonstration de force.

23:56

“Motion Regarding Solidarity Against Austerity enters discussion. Moustaqim-Barrette motivates.”

23:57

“Moustaqim-Barrette : $21 million being cut from McGill will affect students widely. ‘McGill administration has taken these cuts without a word against […] SSMU should take a stance firmly against them.’

Mentioned Masi’s upcoming forum on budget cuts to the university.”

Capital. L’administration fait des efforts pour expliquer sa démarche, voilà qui mérite d’être salué. Pour la démarche en elle-même, c’est une autre question. Elle est traitée en page cinq de ce journal.

23:58

“McKenzie Kibler : this motion sounds too much like a general strike precursor, and I will vote against. Worrying.”

Quel curieux personage ! Il s’inquiète. A‑t-il tort ?

00:00

‘‘SSMU VP Internal Daniel Chaim : Really hard to look at cuts properly, not pushing for strike action but says this is important for students to be informed about.’’

00:01

“Lea, Law (in French): McGill is a Quebec university. With the Quebec government taking austerity measures, it has a responsibility to oppose them.”

00:02

“McKenzie Kibler : McGill students are independent of the rest of Quebec. This will make us form alliances with universities who would be more supportive of a strike, which is not something we want.”

Lourd. L’échange est lourd de sens. C’est-à-dire qu’il en dit long sur les forces en mouvement au sein de notre institution.

McGill, une université du Québec ? « Absurde ! » nous répond-on.  Si absurde que nous devrions supporter toutes les coupures budgétaires, gouvernementales et/ou administratives, sans coup férir. Qui est cette étudiante francophone — animal étrange et plein de rage  — qui ose ouvrir son [Qué]bec pour affirmer le contraire ?

C’est énorme, au sens le plus rabelaisien du terme. On ne sait même plus si l’on doit s’indigner, en rire ou en pleurer. Lord McKenzie, vous êtes un cancre ! Mais on vous pardonne. Pourquoi tant de magnanimité ? Parce qu’un chevalier de la confrérie Gamma Lambda Sigma Chi a certainement ses raisons pour être Président de l’Association des Conservateurs de l’Université McGill.

Assez pavané, assez polarisé, assez moralisé, assez ri. Il est facile de taper sur les doigts de ceux qui, au nom de la « liberté d’expression », ferment la porte au débat dans nos Assemblées Générales.  Ils se sanctionnent eux-mêmes par tant d’incohérence.

La vraie question est : à quand le réveil d’une conscience québécoise dans notre université ? Faut-il nécessairement qu’une horde d’étudiants prenne le campus d’assaut pour que l’on se rappelle que McGill est au Québec ? Deux pavillons flottent au centre de notre campus, l’un porte la feuille d’érable, l’autre est le fleurdelisées. C’est aussi simple que cela.


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