Avocats sans frontières McGill - Le Délit Le seul journal francophone de l'Université McGill Tue, 29 Mar 2011 13:49:55 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 Justice dans le monde https://www.delitfrancais.com/2011/03/29/justice-dans-le-monde/ Tue, 29 Mar 2011 12:49:58 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=7531 Signe de l’approche de la fin de session et, ceci est la dernière «Chronique sans frontières» de l’année.

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Nous espérons avoir réussi à vous intéresser et à vous sensibiliser aux diverses questions juridiques qui peuplent l’actualité. Ne pleurez pas trop, la chronique devrait être de retour l’an prochain.

Le Guatemala est l’un des trois pays où Avocats sans frontières Canada possède un programme permanent. Bien que le pays soit officiellement en paix depuis 1996, on y constate un taux de quarante-huit homicides pour 100 000 habitants, ce qui le place parmi les pays les plus violents du monde. Malheureusement, les autorités guatémaltèques ne sont pas à même de traduire en justice les auteurs de ces violences, ni de sévir contre ceux qui sont à l’origine de violations massives des droits humains. Souffrez en effet d’apprendre que le taux d’impunité dans certaines villes du Guatemala frôle les 98%.

Dans cette situation où les avocats spécialisés en droits humains voient leur sécurité mise en péril, les groupes les plus vulnérables de la société, dont notamment les femmes, ont peine à faire valoir leurs droits. À ce sujet, les chiffres officiels avancent que 685 femmes ont été assassinées au Guatemala en 2010. De l’ensemble de ces cas d’homicides, moins de 4% sont suivis de la condamnation de leurs auteurs présumés. C’est que, bien que le gouvernement guatémaltèque légifère dans le but de caractériser les différents crimes violents commis à l’endroit des femmes, les autorités sont incapables de poursuivre les criminels. Il s’agit, selon Amnesty International, des résultats combinés d’un manque de volonté politique et d’un lourd passé en matière d’impunité, legs d’un conflit armé interne qui a officiellement sévi de 1960 à 1996.

Avocats sans frontières Canada tente donc, un pas à la fois, de renforcer l’accès à la justice pour les populations vulnérables, dans le but de réussir à mener en cour les cas emblématiques de violations des droits humains.

La dernière «Chronique sans frontières» serait bien incomplète si elle ne disait mot des conclusions de nos recherches concernant les manières d’engager la responsabilité des multinationales à l’étranger. Souvenez-vous que ces compagnies se trouvent pour ainsi dire au-dessus des lois, étant souvent à la fois beaucoup plus puissantes et influentes que les gouvernements des pays où elles agissent, tout en évoluant dans un flou juridique complet, à cause de leur caractère multinational. Nos équipes de recherche ont identifié trois pistes de solution permettant de s’attaquer à cette épineuse question.

D’abord, la voie juridique au sens propre, permettant par des lois spéciales à des citoyens de pays étrangers de lancer leur recours contre des multinationales dans un pays occidental, paraît prometteuse, mais elle rencontre en pratique de nombreuses difficultés. Aux États-Unis, où une loi permet en principe de tels recours, ceux qui ont tentés de les exercer se sont heurtés à des procédures longues et complexes, bref, impossibles à maintenir pour la moyenne des victimes de la négligence des multinationales.

Ensuite, la voie de l’autorégulation des entreprises semble elle aussi attrayante, mais se heurte à un mur lorsque la bonne volonté des entreprises se fait moins bonne. Vous comprendrez qu’il arrive parfois que certaines entreprises multinationales se préoccupent moins des codes d’éthique qu’elles mettent sur pied que des profits potentiels à engranger…

Finalement, l’action des ONG, bien que son efficacité soit somme toute limitée, réussit tout de même à arracher quelques victoires en faveur de la justice. Effectivement, si ces organisations n’ont pas réussi à forcer la main aux gouvernements pour qu’ils adoptent des structures juridiques légalement contraignantes et efficaces pour lutter contre l’impunité des multinationales, leurs campagnes de sensibilisation auprès du public ont réussi à modifier les habitudes de ces entreprises en s’attaquant à l’un de leurs talons d’Achille: leur marché.

Les outils de lutte semblent limités, mais tant qu’il n’y aura pas de réel changement dans les mentalités du législateur et des dirigeants d’entreprises, l’engagement citoyen demeurera l’une des seules façons de parvenir à ses fins. ξ

 

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La cour pénale internationale démystifiée https://www.delitfrancais.com/2011/03/15/la-cour-penale-internationale-demystifiee/ Tue, 15 Mar 2011 16:10:15 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=7077 Chronique sans frontières

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Le Colonel Kadhafi aura eu la surprise d’apprendre, le jeudi 3 mars, qu’il fait l’objet d’une enquête pour crimes contre l’humanité. La nouvelle a été annoncée par Luis Moreno Ocampo, procureur de la Cour pénale internationale (CPI): «Il n’y aura aucune impunité en Libye» avait-il dit. À la lecture de ces lignes, certains imagineront peut-être des juristes et des avocats en droits humains qui, devant la tourmente libyenne, décident dans un unanime élan humaniste d’y faire sonner le glas de la justice. Ce portrait de la CPI est certes séduisant, mais est en fait peu conforme à la réalité.

La CPI n’est pas omnipotente ni omniprésente, ce qui peut surprendre, compte tenu du prestige dont elle est auréolée. Toute internationale qu’elle soit, elle doit cependant céder le pas aux tribunaux nationaux des pays concernés, partout où cela est possible. La CPI a pour but non pas de se substituer aux systèmes judiciaires nationaux, mais de les compléter. C’est là ce qu’on appelle le principe de complémentarité.

Un tel mantra ne doit toutefois pas surprendre; après tout, l’existence même de la Cour repose sur le statut de Rome, signé et ratifié par un certain nombre d’États. L’autorité du tribunal découle donc directement de la reconnaissance de ces États et des pouvoirs qu’ils ont bien voulu lui donner. Tout sensibles qu’ils soient à la cause des droits humains, ceux-ci accepteraient très mal qu’un tribunal puisse s’immiscer dans leur juridiction et y exercer ses pouvoirs au mépris de leur souveraineté nationale.

On estime par ailleurs que les tribunaux nationaux sont plus à même de faire respecter l’ordre et la justice dans leur pays, car plus proches des citoyens et des intérêts nationaux. Il est logique, enfin, compte tenu du temps et des ressources considérables requis pour l’ouverture de chaque enquête, de vouloir limiter quelque peu le champ d’action de la CPI.

Complémentarité oblige, la CPI n’agira donc normalement qu’en l’absence de tout processus judiciaire national adéquat. Par exemple, un pays où seraient commis des exactions et des crimes contre l’humanité, sans qu’aucune enquête nationale n’y soit ouverte, pourrait voir la CPI s’en mêler. Le tribunal «complèterait» alors le processus inexistant et pourrait ouvrir des enquêtes.

Les choses se corsent lorsqu’un pays se dote d’un processus judiciaire fantoche, voué à l’échec, justement pour échapper à la juridiction de la CPI. Celle-ci ne pourra alors pas agir à moins de prouver que le processus était malhonnête et institué par l’état dans le seul but de soustraire aux yeux de la justice certains criminels gênants, ou encore que les institutions nationales ne jouissent pas d’une indépendance et d’une impartialité suffisantes pour exercer adéquatement leurs fonctions. La CPI pourra aussi prouver que l’état est absolument incapable d’encadrer convenablement les enquêtes portant sur les crimes contre l’humanité.

Ces procédures sont cependant semées d’embûches et de délais, si bien qu’elles représentent souvent une véritable course d’obstacles pour le procureur chargé de l’affaire. Il faudra beaucoup de volonté et de persévérance de la part des juristes de la CPI pour parvenir à lancer une enquête dans ces conditions. Dans la majorité des cas, c’est l’État lui-même qui demande à la CPI d’agir –ce qui simplifie considérablement le processus.

L’enquête dont font l’objet le Colonel Kadhafi et ses proches aura quant à elle été facilitée par le Conseil de sécurité. Celui-ci a saisi la Cour pénale internationale dans une résolution adoptée le 26 février dernier, procédé encore exceptionnel –depuis la création de la Cour pénale internationale, en 2002, seul le Soudan a fait jusqu’à maintenant l’objet d’une enquête suite à une saisine par le Conseil de sécurité.

La décision de la Cour pénale internationale d’ouvrir une enquête en Libye est donc assez exceptionnelle. Est-ce là le signe d’une volonté croissante de la part des États d’agir lorsque des crimes contre l’humanité sont soupçonnés? Seul le temps nous le dira.

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La justice à l’étranger https://www.delitfrancais.com/2011/02/15/la-justice-a-l%e2%80%99etranger/ Tue, 15 Feb 2011 18:53:38 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=6324 « Quelle étrange chronique tiens-je entre mes mains?» vous demandez-vous sûrement, surpris par cette nouveauté dans votre Délit. Pourtant, alors que vous vous apprêtiez nonchalamment à tourner la page, cet appel direct vous interpelle et vous force à continuer votre lecture. (Non, n’y pensez même pas, on vous surveille!) En quelques mots, cette chronique vise à… Lire la suite »La justice à l’étranger

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« Quelle étrange chronique tiens-je entre mes mains?» vous demandez-vous sûrement, surpris par cette nouveauté dans votre Délit. Pourtant, alors que vous vous apprêtiez nonchalamment à tourner la page, cet appel direct vous interpelle et vous force à continuer votre lecture. (Non, n’y pensez même pas, on vous surveille!)
En quelques mots, cette chronique vise à remplir l’un des objectifs de notre cellule universitaire, soit informer les gens du travail effectué par Avocats sans frontières Canada (ASFC), ainsi que des diverses situations qui donnent lieu à ce travail. Ces quelques lignes bimensuelles traiteront donc de divers sujets liés au travail d’ASFC, qu’ils soient issus de l’actualité ou de questions juridiques qui en découlent. Vous n’y trouverez pas de scoops retentissants, marquant à jamais l’histoire du journalisme, mais plutôt des informations et des pistes de réflexion utiles si vous voulez faire bonne impression aux cocktails mondains, ou bien simplement si vous souhaitez avoir une vision éclairée du monde qui vous entoure.

Populations indigènes menacées en Colombie
D’abord, traitons d’une situation qui ne fait pas les manchettes, mais qui se déroule en ce moment même sur notre continent.

Le rapporteur spécial de la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones auprès des Nations-Unies, James Anaya, se dit extrêmement préoccupé par la situation des peuples indigènes en Colombie. Il dénonce en effet la violence extrême des FARC envers ces populations, le recrutement forcé d’adultes et d’enfants dans leurs villages et la disposition de mines anti-personnelles sur leurs territoires. Il signale aussi le rôle joué par les FARC dans le déplacement de plusieurs communautés indigènes. Ces exactions violent évidemment plusieurs principes internationaux en matière de droits fondamentaux. Le commissaire se montre aussi très critique envers le gouvernement colombien, estimant qu’il ne réprime pas ces agressions avec l’urgence et le sérieux qu’elles nécessitent. Il se montre inquiet pour la survie matérielle et culturelle des peuples indigènes sur le territoire colombien, pris dans un conflit qui ne les concerne pas (source: ActuLatino – 24 janvier 2011).

Il est à noter qu’ASFC œuvre en Colombie depuis 2003. La seconde phase de sa mission dans ce pays, entreprise en 2009, vise entre autres à appuyer le travail des défenseurs des droits des personnes qui se battent à armes inégales et souvent au péril de leur vie pour faire valoir les droits de leurs clients.

Responsabilité des compagnies multinationales
Le droit fonctionne assez bien lorsque des personnes possédant les ressources pour le faire s’opposent devant les cours d’un ressort qui leur est accessible et dont le choix n’est pas contesté. Malheureusement, les choses se corsent lorsque l’une des parties est un individu sans moyens qui fait face à une multinationale, à elle seule plus puissante que plusieurs États. Ces compagnies réussissent en fait assez souvent à échapper aux recours intentés contre elles lorsqu’elles causent du tort dans des pays au système judiciaire instable. Il en est ainsi pour toutes sortes de raisons, allant de l’incroyable puissance économique de ces géants à l’absence de mécanismes de régulation à la fois légalement contraignants pour eux et pouvant être appliqués malgré leur caractère multinational.

Même si la situation rappelle celle de David contre Goliath, il faut trouver comment de tels mécanismes peuvent être mis en place.…Nos équipes de recherche travaillent sur la question; cela nous permettra de partager quelques pistes dans les prochaines chroniques.

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