Alexia Poupet - Le Délit https://www.delitfrancais.com/author/alexiapoupet/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Wed, 07 Feb 2024 01:10:11 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.1 Quand l’épouvante côtoie l’absurde https://www.delitfrancais.com/2024/02/07/quand-lepouvante-cotoie-labsurde/ Wed, 07 Feb 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54554 Une aventure déjantée au cœur des Laurentides.

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Le rideau s’ouvre sur un personnage d’horreur mystérieux au visage masqué. Ses premiers mots sont les suivants : « La seule différence entre la réalité et la fiction, c’est que la fiction doit faire sens. » Avec cette citation, l’auteur François Ruel-Côté et le metteur en scène Cédrik Lapratte-Roy annoncent directement la couleur de leur nouvelle pièce : Terrain Glissant.

Cette pièce absurde aux allures de suspense nordique psychologique relate l’aventure en huis clos de cinq amis partis en escapade hivernale dans un chalet à quelques heures de Montréal. Seulement, tout ne se passe pas comme prévu pour le groupe : dès leur rencontre avec le propriétaire Guillaume, venu leur annoncer quelques règles impératives à respecter au chalet, la soirée dégénère.

Les personnages découvrent avec stupéfaction qu’un homme loge dans le grenier de leur chalet. Cet homme est nul autre que l’auteur américain Blake Sniper, surnommé le maître de l’horreur, soupçonné d’avoir tué sa femme. Les personnages apprennent peu après que des êtres étranges peuplent la forêt qui entoure le chalet, des créatures attirées par la peur des humains. C’est alors que l’un des personnages se volatilise et ses amis se retrouvent catapultés au sein d’une étrange enquête pour élucider sa disparition. Tout au long de la pièce, les personnages tentent de donner un sens à ce qui leur arrive, brouillant la frontière entre la réalité et la fiction. Si l’ambiance à l’intérieur du chalet donne à rire, à la nuit tombée, celle dans la forêt suscite l’angoisse. Ce que l’on retient de la pièce, ce sont des acteurs brillants, qui parviennent à nous faire passer du rire aux frissons avec brio. Les effets sonores et l’éclairage sont spectaculaires : le noir complet, les flashs lumineux, et la musique siniste nous plongent dans un monde effroyable et nous tient en haleine tout au long du spectacle. Dès que les lumières se rallument, les personnages enchaînent des blagues d’un humour bien décalé, qui nous font vite oublier l’ambiance angoissante des minutes précédentes.

« Nous sommes plongés dans le roman d’horreur du mystérieux scénariste vivant dans le grenier du chalet »

La pièce se rythme au fil des « chapitres de l’épouvante », dont les titres sont annoncés à chaque rebondissement. Nous sommes plongés dans le roman d’horreur du mystérieux scénariste vivant dans le grenier du chalet. Les protagonistes en viennent eux-même à se demander s’ils ne sont pas devenus les personnages du nouveau roman de l’énigmatique écrivain.

Après une fin tragique, toute forme de réalisme est abandonnée lorsque chaque personnage ressuscite et relate sa version des faits. Tout cela peut donner le tournis. Si une première partie de mon cerveau crie à l’absurde, la deuxième se retrouve complètement immergée dans l’histoire.

Enfin, tout au long de la pièce, une voix hors-scène nous pose des questions philosophiques absurdes : « Si un arbre tombe dans la forêt, mais que personne n’est là pour l’entendre, l’arbre est-il vivant? » Cette pièce atypique essaie-t-elle de transmettre un message plus profond? Je ne saurais dire, mais elle a certainement le don de nous bouleverser.

J’ai également apprécié les références culturelles québécoises tout au long de l’histoire. En filigrane, on y découvre la présence de critiques sociales et politiques. La pièce dénonce en effet le manque de connaissances de la population urbaine sur les parcs nationaux environnants, ainsi que le projet d’y créer un « nouveau Montréal ».

Lorsque la lumière se rallume sur la salle bondée et que les applaudissements se tarissent, j’écoute les discussions de mes voisins. Ils semblent avoir trouvé la pièce saugrenue et difficile à résumer, mais tous paraissent conquis. Si certains spectateurs ont beaucoup ri, d’autres ont eu davantage peur. Une chose est sûre, nous avons tous été traversés par une palette d’émotions.

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Lignes de fuite : Hiver à Montréal https://www.delitfrancais.com/2024/01/17/lignes-de-fuite-hiver-a-montreal/ Wed, 17 Jan 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54243 La neige, l’amour et le Mont Royal...

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Lac figé, coeur gelé

un pas
après l’autre
la glace craque sous mon poids je la sens se fissurer
petit
à petit

je ne sais pas pourquoi je marche sur ce lac gelé enfin
je sais
j’avais besoin de cette sensation
du froid qui prend possession de mon corps
je ne ressens plus rien
et en même temps je ressens tout
une intensité singulière
qui pénètre mes os
et me rappelle que je suis vivante

je suis maintenant au milieu de ce lac
et je ne sais quoi penser
mon esprit est vide
le paysage reflète cette absence
tout est blanc
silencieux
seul le sifflement du vent réveille mes oreilles

avant j’adorais l’hiver
je voyais la neige
recouvrir les arbres nus
je sentais le froid sec
qui rendait notre respiration visible et nos joues roses
et je t’aimais

maintenant je vois les feuilles mortes les arbres nus perdus
et le froid intense
il assèche mon visage et
engourdit mes oreilles et
tu me manques

je veux être un flocon
couler sous la glace

Jade Lê

Éditrice Culture

Mon premier hiver à Montréal

La tête dans les nuages, Mont Royal contemple sereinement,
La ville se draper de son long manteau blanc,
Le froid s’est installé en un souffle implacable,
L’hiver est arrivé, c’était inévitable.

Les arbres sont dénudés, frêles silhouettes gelées,
Les passants pressent le pas sur le trottoir glacé,
Le vent froid leur chuchote, tout bas des histoires tristes.
Les rues sont désertées et la mélancolie persiste,
Partout le ciel gris s’étend comme figé,
L’hiver semble durer toute une éternité.

Pourtant, au cœur de ce paysage gelé,
Sous les flocons, une féerie s’est éveillée,
Le monde s’est métamorphosé en un royaume givré
La ville est devenue une joyeuse réalité.

Les enfants rient et virevoltent sur le sol enneigé,
Les visages s’illuminent à chaque nouveau flocon tombé,
Les patineurs tourbillonnent sur la glace, gracieux,
Et les cafés deviennent des refuges chaleureux.

Montréal en hiver, un tableau féerique,
Contraste entre froid et joie, une scène magique.

Alexia Poupet

Contributrice

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Entre histoire et quête d’identité https://www.delitfrancais.com/2023/11/22/entre-histoire-et-quete-didentite/ Wed, 22 Nov 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53524 Le voyage intime de Tatiana Zinga Botao.

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Nzinga est une œuvre théâtrale unique, à la croisée des continents, des histoires et des récits. Pendant une heure et demie, Tatiana Zinga Botao nous emmène avec elle dans un voyage alliant émotion, humour, et réflexion, le tout habilement tissé dans une sorte d’autobiographie théâtrale.

Née au Congo et ayant grandi à Bruxelles avant de s’installer au Québec, ce n’est que tard dans sa vie que l’artiste découvre l’existence de son homonyme historique, la reine Nzinga du Congo, ayant vécu au 17e siècle. Plus qu’un simple nom partagé, Nzinga, cette figure qui a marqué l’histoire par sa résistance contre les colonisateurs portugais, devient une source d’inspiration. La pièce rend ainsi hommage à cette reine emblématique, tout en tissant des similitudes subtiles avec l’histoire personnelle de Tatiana. On en apprend beaucoup sur l’histoire du Congo et sur le passé colonial du pays. Mais on comprend aussi au fur et à mesure de la pièce l’importance de connaître ses origines afin de mieux se connaître soi-même. La pièce nous invite ainsi à nous questionner sur notre identité et nos origines. « D’où viens-tu? », « Et avant cela? », « Et encore avant? » interpelle l’artiste.

Si au départ j’ai pu avoir des préjugés sur le fait que la pièce ne mette en scène qu’une seule personne, mes doutes se sont vite envolés. Tatiana n’est pas simplement une actrice, mais aussi une conteuse passionnée et engagée qui nous offre bien plus qu’un simple « one woman show ». Car si l’artiste raconte en effet son histoire personnelle, elle le fait avec une énergie vibrante et nous marque par sa prestance sur scène. Elle passe de la danse au chant, tout en ponctuant son spectacle de nombreuses interactions dynamiques avec avec la salle. Zinga en vient même à distribuer quelques coupes de champagne à une partie de son public.

« La pièce nous invite ainsi à nous questionner sur notre identité et nos origines »

Malgré une mise en scène très dépouillée et minimaliste, avec pour simple décor du sable et un grand drap au sol, l’artiste parvient parfaitement à créer une atmosphère intime et puissante. Très rapidement, cette dernière arrive à faire éprouver une véritable palette d’émotions à son public. Du sentimental au rire, de la compassion à la culpabilité, Zinga démontre son talent en naviguant habilement entre des discours solennels et des interactions légères.Ce qui m’a également plu est la facilité de l’artiste à jouer avec les registres linguistiques, en employant un français international pour son récit, le québécois au moment des interactions avec le public, en passant par le congolais pour nous rapporter ses expériences personnelles. Tatiana Zinga Botao mélange ainsi les langues pour immerger toujours davantage le public dans les différentes facettes de son histoire.

En fin de compte, bien plus qu’une autobiographie, Nzinga est une pièce au croisement des genres, entre passé et présent. C’est un hommage à la puissance des femmes, et à la recherche d’autonomie et d’affirmation de soi dans un monde complexe. La pièce nous rappelle surtout que chaque histoire personnelle est une épopée en soi.

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