Olivier Pasquier - Le Délit https://www.delitfrancais.com/author/olivierpasquier/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Fri, 12 Feb 2021 19:53:56 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.1 Oscillations à 60 Hertz https://www.delitfrancais.com/2016/02/16/oscillations-a-60-hertz/ https://www.delitfrancais.com/2016/02/16/oscillations-a-60-hertz/#respond Tue, 16 Feb 2016 07:36:54 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24865 Hydro-Québec cherche encore sa place sur la scène internationale.

L’article Oscillations à 60 Hertz est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Cela court-circuite pour Hydro-Québec, le producteur et distributeur québécois d’électricité. Le groupe a connu ses heures de gloire, remplies de désir de conquête, comme ce fût le cas en 2009 lorsque le groupe public québécois avait tenté de racheter son homologue de la province voisine du Nouveau-Brunswick pour un montant de 4,75 milliards de dollars canadiens. Cet élargissement n’avait pas eu lieu au final, avec un fort rejet de la population du Nouveau-Brunswick, refusant de voir son énergie sous tutelle de la province voisine. Dans une province où l’électricité est produite à 95% par les barrages hydro-électriques, l’acquisition d’un producteur et distributeur d’une autre province se serait accompagnée par une hausse de la part du nucléaire dans le cocktail énergétique d’Hydro-Québec (déjà de 2,1%). Ce rapprochement entre les deux géants a donc suscité une vive réaction au Québec également dans une logique de conservation des énergies renouvelables.

Le Québec et son géant de l’énergie

La réglementation des tarifs permet d’afficher les prix les plus bas d’Amérique du Nord, un système assez similaire à celui d’EDF (Électricité de France). Les clients sont regroupés en trois groupes principaux: résidentiel et agricole (tarif D), commercial et institutionnel (tarif G) et industriel (tarifs M et L). Les prix sont fixés par la Régie de l’énergie et la tarification est basée sur les coûts de fourniture du service, qui incluent l’amortissement sur les immobilisations, une provision pour l’entretien des installations, la croissance de la clientèle et un profit économique. Grâce à ce système, les prix sont longtemps restés stables, jusqu’à ce que la régie tolère huit augmentations successives entre 2004 et 2010, une opération qui permit à Hydro-Québec de dégager des marges plus conséquentes.

Néanmoins, une baisse des prix de l’ordre de 0,4% a eu lieu en 2011 et de 0,5% en 2012. Mais ces baisses doivent être relativisées car une nouvelle vague d’augmentation est en cours depuis 2014 et durera jusqu’en 2018. Elle s’explique par la privatisation du marché qui permet de choisir son fournisseur d’électricité. Par conséquent, les nouvelles installations nécessiteront de lourds investissements pour que la production énergétique soit opérationnelle et efficace rapidement. Les producteurs privés sont majoritairement composés de parcs éoliens autorisés depuis peu par le gouvernement du Québec. Un changement vraiment nécessaire? Le débat est ouvert mais le contexte ne s’y prêtait pas vraiment dans une province où la majorité de la production électrique se faisait déjà via des énergies respectueuses de l’environnement. De plus, ce changement annoncera une hausse des prix pour toutes les catégories de clients: une perte de compétitivité par rapport aux autres provinces nord-américaines.

Matilda Nottage

Hydro-Québec, moteur des industriels québécois

Le Québec se hisse parmi les plus gros producteurs d’aluminium, un procédé qui requiert de fortes quantités d’électricité. Depuis un siècle, le développement industriel du Québec a été stimulé par l’abondance de ressources hydrauliques. L’énergie représente une part importante des dépenses des secteurs des pâtes et papiers et de l’aluminium, deux industries établies de longue date au Québec. La grande industrie jouit d’un tarif plus bas que les clients domestiques et commerciaux en raison des coûts de distribution moindres. Le gouvernement du Québec utilise les bas tarifs d’électricité afin d’attirer de nouvelles entreprises et de consolider les emplois existants. On peut notamment citer Alcan, second producteur d’aluminium mondial pré-acquisition par Rio Tinto en 2007, qui profitait et profite toujours sous son nouveau nom, Rio Tinto Alcan, du tarif privilégié L dit «grande puissance». Et l’entente entre la compagnie d’État québécoise et la multinationale ne s’arrête pas là. Rio Tinto Alcan ayant ses propres centrales hydroélectriques, Hydro-Québec est dans l’obligation d’acheter les surplus de la compagnie. Ainsi le groupe industriel semble gagner le beurre et l’argent du beurre.

Mais ces tarifs spéciaux pour l’industrie suscitent la polémique chez certains universitaires, dont Jean-Thomas Bernard et Gérard Bélanger, deux économistes à l’Université Laval. Dans une note économique pour l’Institut économique de Montréal datant de 2017, ils pointent du doigt les coûts trop élevés pour l’économie québécoise de ces tarifs spéciaux. La différence entre vendre de l’électricité à une aluminerie plutôt que sur le marché d’exportation coûte entre 255 357 et 729 653 dollars canadiens par personne employée dans une aluminerie. Une somme considérable que doit assumer le gouvernement du Québec en se privant de revenus supplémentaires.

Une étude remise en cause, sans surprise, par l’Association des consommateurs industriels d’électricité du Québec qui réplique en affirmant que les données de 2000 à 2006 tendent à démontrer que les prix obtenus par Hydro-Québec pour l’électricité exportée sont plus bas lorsque les quantités augmentent, et inversement. Un argument en faveur des industriels, qui militent pour conserver leurs tarifs avantageux. Le débat est encore en cours et se heurte à des considérations économiques dans un contexte difficile pour le gouvernement du Québec et l’équilibre budgétaire. L’industrie de pointe à forte valeur ajoutée permet au Québec de conserver des emplois industriels dans une société où les pays occidentaux sont frappés de plein fouet par la délocalisation. Les tarifs avantageux sont donc une forme de protectionnisme économique qui permettent aux industriels de produire à moindre coût afin de rendre les exports plus compétitifs et de conserver des emplois sur le territoire.

Hydro-Québec, au cœur de la province

L’ouverture du marché et les tarifs règlementés sont également confrontés à une identité québécoise bien marquée, qui se reflète au sein d’Hydro-Québec. Selon l’historien Stéphane Savard, Hydro-Québec est au cœur des préoccupations politiques, économiques, sociales et culturelles du Québec contemporain: «davantage qu’une simple entreprise publique, elle devient un instrument privilégié de promotion de représentations symboliques du Québec francophone, représentations qui se retrouvent inévitablement aux fondements des références identitaires en constants changements.» L’ouverture au marché des provinces voisines et des États-Unis, ne risque-t-elle pas d’atteindre l’identité du groupe? Pas de réponse claire et précise mais il semblerait que le protectionnisme, tant culturel qu’économique, soit un terme de bon aloi dans la province francophone peuplée de huit millions d’habitants.

Hydro-Québec est un groupe qui a réussi à concilier énergies renouvelables et patriotisme. Nombreux sont les points communs avec EDF, le géant français de l’énergie, ou encore avec sa petite sœur, la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), qui ne produit que de l’énergie hydroélectrique. Un rapprochement envisageable pour non seulement promouvoir une électricité verte respectueuse de l’environnement et des intérêts francophones partagés afin de nous rapprocher de nos cousins français. 

L’article Oscillations à 60 Hertz est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
https://www.delitfrancais.com/2016/02/16/oscillations-a-60-hertz/feed/ 0
L’Hexagone dans les pas des Anglo-saxons https://www.delitfrancais.com/2015/11/10/lhexagone-dans-les-pas-des-anglo-saxons/ https://www.delitfrancais.com/2015/11/10/lhexagone-dans-les-pas-des-anglo-saxons/#respond Tue, 10 Nov 2015 16:48:43 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=23983 Une libéralisation de l’économie française.

L’article L’Hexagone dans les pas des Anglo-saxons est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
À l’heure de la loi Macron et de ses premiers effets sur l’économie française, il semble plus qu’adapté de se livrer à une brève analyse de la vie économique française. Avec un taux de chômage avoisinant les 10% au deuxième semestre 2015 et une croissance inférieure à 1%, la morosité de la vie économique française pousse à quelques peu «innover» en explorant des terrains jusqu’à présent inconnus.

Les piliers de la loi Macron

Tout d’abord, commençons par un rappel du but de la loi Macron. Cette loi comporte trois objectifs: la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Parmi des exemples plus concrets, on peut retenir la libéralisation des lignes de cars qui permettront de faire concurrence à la SNCF (Société Nationale des Chemins de Fers français, ndlr) et donc de baisser les prix, plus de souplesse dans l’ouverture des commerces le dimanche et la nuit pour faciliter la consommation et une réforme du permis de conduire en confiant à des sociétés privées les épreuves du code de la route (dans l’espérance de diviser les délais actuels par deux).

Par conséquent, ses trois grands principes sont libérer, investir et travailler. Une loi alléchante et ambitieuse, mais derrière ses termes élogieux se cache un débat de société beaucoup plus profond. Dans les trois grands principes énoncés précédemment, le premier fait réagir: «libérer». C’est un mot qui fait peur dans un pays où l’étatisme fort perdure depuis des siècles. «Libéraliser», les institutions supranationales telles que l’Organisation Mondiale du Commerce, le Fonds Monétaire International, ou encore le Parlement européen, n’ont que ce mot à la bouche, avec pour but la promotion du libre-échange et un marché concurrentiel où le gouvernement intervient au minimum.

Même si ce modèle séduit les pays anglo-saxons, la France n’est nullement obligée de marcher dans leurs pas. Dans un pays où le gouvernement régule la majorité des aspects de la vie économique, le libéralisme peut sembler tentant mais il n’est point dans nos mœurs et notre culture. Comme dirait Eric Zemmour, polémiste à succès, «nous ne sommes pas des Anglo-saxons». Cette phrase, qui paraît naïve à première lecture, montre en réalité une identité nationale construite au fil de l’Histoire. Cet étatisme à la française illustre le besoin du peuple de sentir le gouvernement proche de lui en comptant sur lui pour la santé, l’éducation, les transports, les aides sociales… Les exemples sont nombreux et ils datent du début du 19e siècle. Lorsque l’empereur Napoléon arrive au pouvoir, on assiste à la création des mairies, des préfectures, des voies de chemins de fer, d’une Banque de France pour réguler la vie économique du pays. Des créations qui montrent la volonté du gouvernement de servir le citoyen, et que ce dernier peut se fier à lui. Autre exemple, la France et sa capacité à lever l’impôt. Le fait qu’ils soient élevés ne date pas d’hier, le gouvernement de l’Hexagone a toujours su redistribuer la richesse collectée en taxes.

Un libéralisme audacieux

Depuis la crise financière de 2008, l’heure des réformes a sonné, mais la voie du libéralisme est-elle la seule? Peut-on envisager un libéralisme à la française loin de celui pratiqué par les pays anglo-saxons? Le Canada a su faire preuve de pragmatisme en confiant plus de libertés aux entreprises tout en conservant une structure sociale digne d’un État-providence. Un mélange audacieux qui semble fonctionner: un impôt sur les sociétés raisonnable (aux alentours de 12%), une flexibilité à l’embauche et un contexte macro-économique favorable. La bonne santé économique du Canada fait pâlir d’envie les autres pays du G8 et cet État semble avoir trouvé la solution sur la question de la combinaison État-providence / taux d’imposition. Le voisin américain affiche un taux d’imposition supérieur mais un État-providence clairement moins prononcé. Un paradoxe qui met en avant les mœurs différentes d’une société à l’autre. Une preuve donc que la France pourrait baisser son taux d’imposition sans pour autant pleinement sacrifier son système social généreux et onéreux.

L’étatisme d’hier…

Cependant, l’étatisme n’a pas toujours eu comme conséquence première de ralentir la croissance économique. Cet amalgame dénigre passivement les bons côtés d’un système régulé. Sous le Second Empire, le gouvernement de Napoléon III entreprit de vastes investissements qui eurent comme effet une croissance économique quasi continue de 1852 à 1870. L’intervention du gouvernement permit la généralisation des technologies mises au point pendant la seconde révolution industrielle sur le territoire (développement des lignes électriques et de moyens de transports plus efficaces). Entre 1852 et 1870 la France connut une période d’industrialisation sans interruption, grâce à un système harmonieusement mélangé: un contrôle étatique sur les secteurs à développer et une certaine souplesse donnée aux entreprises. Un libéralisme «à la française» qui conjugue la liberté d’entreprendre avec un gouvernement relativement puissant qui intervient pour s’assurer du bon déroulement des opérations.

Et celui d’aujourd’hui

À notre époque, fortement marquée par une utilisation et un besoin accru de nouvelles technologies (Internet, biotechnologies, énergies renouvelables…), un système similaire à celui du Second Empire pourrait porter ses fruits. Une certaine liberté accordée aux entreprises tout en régulant la concurrence pour qu’elle soit harmonieuse avec des investissements massifs dans la Recherche et Développement (R&D) pour encourager l’émergence de nouvelles technologies. Avec des capitaux gouvernementaux de cette ampleur, la recherche française confirmerait son prestige à l’international et les entreprises n’auraient d’autres choix que de domestiquer cette R&D pour rester compétitives. Le secteur énergétique est un bel exemple: la Commission de Régulation des Énergies (CRE) décide du prix du gaz et de l’électricité, ce qui permet aux Français d’avoir la facture la plus faible d’Europe, mais autorise la mise en concurrence des différents acteurs du monde énergétique. Une mesure qui prendra bientôt fin. Au 1er janvier 2016 les tarifs règlementés sur l’électricité vont disparaître: le pouvoir de la CRE se verra donc limité. Si cette fin de réglementation s’accompagnera d’une mise en concurrence plus accrue et plus harmonieuse, le gouvernement perdra de son autorité sur un secteur de l’économie et le contribuable risque d’en pâtir. Les investissements se feront plus rares et la R&D s’en verra affectée. Devant ces choix difficiles, il n’appartient qu’à la France de décider de la manière dont elle doit s’intégrer dans l’économie mondialisée.

L’article L’Hexagone dans les pas des Anglo-saxons est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
https://www.delitfrancais.com/2015/11/10/lhexagone-dans-les-pas-des-anglo-saxons/feed/ 0
Une seule devise: liberté https://www.delitfrancais.com/2015/01/27/une-seule-devise-liberte/ https://www.delitfrancais.com/2015/01/27/une-seule-devise-liberte/#respond Tue, 27 Jan 2015 16:22:07 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=22166 Le président et moi avons délibéré sur Students for Liberty.

L’article Une seule devise: liberté est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Peut-être avez-vous déjà entendu parler du réseau Students For Liberty (SFL). Cette association étudiante, créée en 2008 aux États-Unis par Alexander McCobin, remporte un vif succès. Son objectif? Promouvoir le libéralisme. L’idée principale est de réduire le contrôle gouvernemental au maximum pour permettre l’acquisition d’une société où l’individu pourrait jouir pleinement de sa liberté.

L’idée paraît utopique, mais la réalité, c’est que le réseau compte aujourd’hui environ 1100 organisations étudiantes à travers le monde. J’ai rencontré le directeur de Students for Liberty Paris, Christophe Seltzer, pour débattre avec lui de la question. Ses yeux brillent chaque fois qu’il parle de l’association qu’il dirige; libertaire dans l’âme, il n’a cessé de me parler des dérives de l’État et du gouvernement qui l’ont peu à peu poussé vers une soif de liberté absolue.

En effet, les divers scandales tels que la surveillance massive du gouvernement américain dénoncée par Edward Snowden, les divers plans économiques à travers le monde pour tenter d’enrayer la crise de 2008 et les autres régulations économiques gouvernementales relèvent, pour lui, de l’atteinte à la liberté de l’individu. En réitérant ces arguments, Christophe Seltzer m’a rendu crédible sa vision de la liberté. Du point de vue de Students for Liberty, le gouvernement exerce mal son rôle de régulateur. Il m’apparaît donc logique de tendre vers une société où l’individu est responsable de lui-même et où les interactions se font sans le contrôle d’une entité supérieure qui interfère, entre autres, dans les affaires économiques.

Les revendications de SFL ne se limitent pas au domaine de l’économie: la liberté civile est aussi mise sur le tapis. Un exemple dont le président de l’association française m’a fait part est celui de la concrétisation du projet de Xavier Niel, fondateur de Free mobile. Il a créé 42, une école d’informatique qui accueille des étudiants depuis novembre 2013. Cette idée a suscité beaucoup de sympathie chez les libertaires. Une académie accessible sans diplôme, gratuitement et par le biais d’une sélection à laquelle quiconque peut se soumettre incarne, pour SFL, le futur de l’éducation. C’est le modèle d’une école libre de former les cerveaux qu’elle souhaite, sans formalités qui puissent interagir avec le talent de ses élèves.

Je me pose cependant une question quant à l’absence de régulation par l’État: si l’individu est capable de libérer la société pour entreprendre et interagir sans contrainte, qu’en est-il du port d’armes, des drogues et du meurtre dans une société où le gouvernement n’est plus présent pour assurer les fonctions régulatrices essentielles? Et quels recours peuvent avoir des étudiants si la seule instance dont ils dépendent est l’école qui les forme? Est-ce que cela ne laisse pas place à d’autres sortes d’abus? Le débat est loin d’être clos pour SFL, mais si la tendance se maintient, l’organisation a de beaux jours devant elle. Pour ma part, je ressors de cet entretien perplexe. Moi-même aspirant à une société à l’image du Premier Empire, réorganisée et puissante économiquement, je m’interroge sur la réussite possible des libertaires quant à leur combinaison liberté-ordre social. Quoi qu’il en soit, les premières conférences de Students for Liberty se sont tenues au Québec vendredi dernier, le 23 janvier, et je ne saurais attendre de voir si le succès sera aussi franc qu’en France où l’on compte déjà neuf associations étudiantes affiliées au réseau international.

L’article Une seule devise: liberté est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
https://www.delitfrancais.com/2015/01/27/une-seule-devise-liberte/feed/ 0
Le Kazakhstan https://www.delitfrancais.com/2014/11/24/le-kazakhstan/ https://www.delitfrancais.com/2014/11/24/le-kazakhstan/#respond Tue, 25 Nov 2014 00:46:28 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=21953 Identifier des opportunités de croissance économique:
le nucléaire.

L’article Le Kazakhstan est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Après avoir vanté les mérites de la Slovénie, direction les terres désertes d’Asie centrale pour une autre destination atypique: le Kazakhstan. Le nom déjà recèle de mystères et d’exotisme. Cette vaste République de 17 millions d’habitants a l’allure d’un pays perdu au milieu de nulle part et pourtant c’est le candidat le plus sérieux, parmi les pays d’Asie centrale, pour devenir un pays émergent. Son «or radioactif», encore sous-exploité, pourrait changer la donne sur tous les plans. Après une brève révision historique et géographique, nous verrons en quoi l’uranium pourrait permettre un développement économique durable.

URSS  puis dictature

Le Kazakhstan est situé en Asie centrale, entre la Russie et l’Ouzbékistan, bordé par la mer Caspienne. Ce vaste pays de 2 724 900 km au carré, seulement peuplé de 17 millions d’habitants, est une plaine enclavée qui s’étend à perte de vue sur des milliers de kilomètres: c’est la steppe. Le pays sort petit à petit de l’anonymat sur la scène géopolitique de par une forte croissance et des sous-sols riches en hydrocarbures et en uranium.

En décembre 1991, le pays acquiert son indépendance de l’Union Soviétique, et Noursoultan Nazarbaïev devient président. Depuis lors, il dirige le pays d’une main de fer. En 2011, il est réélu, pour la cinquième fois, pour un mandat de cinq ans. Sa mainmise sur la constitution lui permet de mettre au pas l’opposition et de rester au pouvoir. Il libéralise l’économie mais nombreux sont les investissements encore encadrés par le gouvernement, qui détient Petro Kazakhstan, le principal exploiteur du précieux or noir. Le régime traque et musèle l’opposition en ayant parfois recours à la torture, selon les organisations internationales pour les droits de l’homme, qui dressent un tableau noir de la situation actuelle du pays. Les médias sont contrôlés et l’espoir de démocratie après la chute de l’URSS ne s’est jamais concrétisé. Le pays se classe tristement parmi les dix pays les plus corrompus de la planète. Les financements douteux ayant servi à la campagne présidentielle française de Nicolas Sarkozy en 2012 en sont la preuve. Par conséquent, ce régime très autoritaire ne semble pas prendre la voie d’une éventuelle démocratisation, mais son économie est prometteuse: une forte croissance économique malgré le contexte mondiale encore difficile – 5,2% en 2014 – et une croissance à deux chiffres avant la crise.

Dépendance aux hydrocarbures

Le pétrole y est abondant, mais baser son économie sur l’or noir est dangereux: le prix du baril varie de quelques centimes et c’est le Kazakhstan entier qui se retrouve considérablement affecté. N’oublions pas non plus de mentionner que la ressource a été nationalisée et est donc aux mains du gouvernement. Les autres pays ayant suivi cette voie (Vénézuéla, Russie) montrent une industrie pétrolière fortement corrompue et une redistribution des richesses très inégalitaire. Ainsi, 50% de la population du Kazakhstan vit encore sous le seuil de pauvreté avec un écart entre les riches et les pauvres qui s’accroît. Bref, c’est la voie d’une autre ressource qu’il faut prendre, celle de l’uranium, pour éviter que le pays ne se retrouve dans la même situation que l’un de ses confrères: l’Azerbaïdjan. Également un pays autrefois sous tutelle soviétique, il doit à son or noir une croissance économique aux alentours de 20%; mais cette dépendance est synonyme d’une croissance volatile. Comment sortir de cette «malédiction des ressources naturelles», telle que Richard Auty l’a conceptualisée?

Valoriser l’uranium

Outre ses gigantesques réserves d’hydrocarbures, le pays possède un minerai radioactif qui suscite l’intérêt dans le cadre d’une transition énergétique: l’uranium. Cet «or radioactif» est très abondant dans les sous-sols kazakhs, ce qui fait de cette ex-république socialiste la 2e réserve mondiale (après l’Australie et avant le Canada). Un atout de taille certes, mais il semblerait que la gestion de cette ressource ne soit pas optimale. Même si les réserves sont importantes, le produit n’est malheureusement que peu valorisé, ce qui réduit le pays à un simple exportateur de matières premières tributaires des cours de l’uranium. Ainsi, de même qu’avec le pétrole, l’économie kazakhe n’échappe pas à la malédiction des ressources naturelles. Difficile donc d’envisager une croissance stable et durable. Sa valorisation semble être la solution, chose qui peut être faite via diverses industries. La plus simple consiste à enrichir la ressource exploitée pour obtenir de l’Uranium 235 (présent à hauteur de 0.71% dans le minerai brut). Ce-dernier sert de carburants aux centrales nucléaires permettant de valoriser la ressource en électricité et, de surcroît, soit de l’exporter aux pays voisins soit d’alimenter les industries et foyers du pays, et donc de rendre le secteur secondaire plus productif. Cette solution est la plus médiatisée mais n’omettons pas les autres industries de haute technicité permettant de valoriser le précieux minerai: les industries de l’armement, l’aérospatiale et le médical.

Le nucléaire permet de […] nourrir des secteurs hautement techniques et rentables.

Il est intéressant de s’étendre sur le premier, extrêmement rentable. Avec de l’uranium, il est possible de produire diverses sortes de bombes et missiles. On peut discuter à l’infini de la justesse morale de fabriquer et d’exporter des armes. Mais sur le plan géopolitique, s’agissant de la quête de la puissance, la production et la vente d’armements lourds présente deux avantages considérables pour un État: d’abord, le maintien ou l’accroissement de son indépendance vis-à-vis des autres puissances, alliées comme adversaires, ensuite, le fait de favoriser sa balance commerciale tant les missiles et bombes sont des produits à très haute valeur ajoutée. N’omettons pas non plus toutes les conséquences du développement d’une telle industrie: il faudrait les ingénieurs, chercheurs et ouvriers spécialisés pour accomplir ces tâches très techniques. De plus, en dehors de quelques rares et courtes périodes de reflux des achats (par exemple, dans les années 1990, après la chute du bloc soviétique), le marché des armements se porte généralement très bien… À la clef, apparaitrait une industrie de pointe fournissant de nombreux emplois sur le sol kazakh. Pour ce faire, le pays devrait développer son système universitaire en proposant des cursus scientifiquement avancés, sans oublier les formations juridiques et managériales liées à l’uranium. Cela créerait un domaine d’expertise pour le système universitaire kazakh avec, à plus long terme, des universités qui grimperont dans les classements internationaux. Une condition se pose néanmoins: l’accord et le soutien des grandes puissances occidentales ou russe. Quant à l’industrie aérospatiale (secteur plus limité étant donné qu’il s’agit principalement de certains types de moteur de fusées), l’exploitation de l’uranium assurerait également un développement technique et permettrait au pays d’exporter des produits à très forte valeur ajoutée. L’industrie médicale utilise le précieux minerai pour les IRM, scanners et autres outils permettant le diagnostic de nombreuses maladies. La création d’une telle industrie, en plus d’appuyer les exportations, donnerait aux hôpitaux un accès facile à ces produits de haute technicité et les inciterait à s’en procurer, permettant le développement des infrastructures. La valorisation du nucléaire permet donc non seulement de fournir l’énergie nécessaire à l’activité économique mais aussi de nourrir des secteurs hautement techniques et rentables.

Cependant, le pays, par endroit très isolé, devrait commencer par une politique de désenclavement en construisant routes, voies ferrées et hôpitaux pour inciter les investisseurs à venir et à développer leurs industries. Durant mon stage dans l’industrie du ciment cet été, j’ai pu constater que les ventes de ciment et béton y explosent. Or, la construction est un moteur et, de même que la vente d’emballages par exemple,  un signe avant-coureur de la croissance économique. Il semblerait donc que le Kazakhstan soit en marche vers un développement industriel digne d’un pays émergent; le nucléaire en serait la voie la plus rapide et durable.

L’article Le Kazakhstan est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
https://www.delitfrancais.com/2014/11/24/le-kazakhstan/feed/ 0
Entrer en économie de marché https://www.delitfrancais.com/2014/10/21/entrer-en-economie-de-marche/ https://www.delitfrancais.com/2014/10/21/entrer-en-economie-de-marche/#respond Tue, 21 Oct 2014 08:35:13 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=21562 La Slovénie: «le bon élève des pays des Balkans».

L’article Entrer en économie de marché est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
La Slovénie? Ça doit se trouver quelque part en Europe! Difficile de localiser cette petite économie sur une carte. Seulement, le cas slovène démontre parfaitement le passage d’une économie planifiée à une économie de marché. Alors, commençons par  une brève révision géographique et historique.

La Slovénie est un pays situé sur le continent européen, entre l’Italie et la Croatie, dans le prolongement des Alpes autrichiennes, et bordé par la mer Adriatique. Ce petit pays de 20 273 km2 et peuplé de seulement 2 millions d’habitants suscite peu d’intérêt sur la scène mondiale et, pourtant, son potentiel est énorme.

Le pays acquiert son indépendance de la Yougoslavie le 25 juin 1991 avant de rejoindre l’Union Européenne (UE) le 1 mai 2004 (puis d’adopter la monnaie européenne en 2007). Entre temps se joue un changement considérable puisque le pays passe d’une économie planifiée à une économie de marché. Très vite, la croissance économique arrive avec un PIB (Produit Intérieur Brut) qui grimpe de 3 à 7% par an entre 1993 et 2008. S’ensuit un taux de chômage faible avoisinant les 6% avant la crise (l’un des plus faibles de l’UE), une industrialisation rapide et un pays qui passe rapidement de statut d’emprunteur à celui de contributeur de la Banque Mondiale. De plus, l’entrée dans l’Union Européenne a permis au pays de bénéficier des fonds de développement FEDER (235 millions d’euros de fonds en 2004) donnant la possibilité au pays de consolider son économie et ses infrastructures.

La crise questionne 

Cependant, la crise financière de 2008 n’épargne pas la Slovénie. Leur PIB est parmi ceux qui ont baissé le plus dans la zone OCDE en 2009 (-8% environ); soit une chute monumentale. Malgré un bref espoir de reprise en 2010 (+1.2%) et 2011 (+0.6%), le pays repart sur une pente régressive en 2012 (-2.3%), confirmée en 2013 (-1.6%). À cela s’ajoute un chômage de 10.9% en 2013, bien au-dessus des années d’avant crise. L’époque glorieuse d’une forte croissance semble révolue et le pays fait actuellement face à de nombreux problèmes: le déficit du système des retraites, un système universitaire de bon niveau mais une durée trop longue et une dépendance criante face aux énergies fossiles. 

Assurer le financement des retraites

La part des retraites dans le PIB devait passer de 11% en 2010 à 20% en 2060 mais une réforme exigée par l’UE et engagée par Alenka Bratusek (ex-présidente du gouvernement avant de céder sa place le 18 septembre 2014 à Miro Cerar) prévoit que ce taux soit de 18% en 2060. L’objectif est donc de permettre au pays de rétablir l’état de ses finances publiques pour atteindre un équilibre budgétaire, très impacté durant la crise. En 2009, année noire sur le plan économique, le déficit des administrations publiques atteint 5.9% du PIB. Ainsi, l’OCDE proclame que «la crise a révélé d’importantes faiblesses dans l’économie slovène».

La réforme de l’éducation supérieure

La Slovénie possède un  atout de taille: une main d’œuvre de bon niveau. Mais au-delà d’un bon système universitaire, les étudiants slovènes mettent trop de temps à terminer leurs études, freinant l’arrivée des jeunes sur le marché du travail. L’OCDE classe le pays comme celui de l’UE où la durée des diplômes universitaires est la plus longue (7 ans en moyenne contre 3 pour la Grande-Bretagne). La cause? Les taux de réussite sont bas par rapport aux autres pays de l’UE. Une réforme en cours prévoit de restructurer les financements des études avec des frais et prêts associés annexés sur le revenu des foyers pour d’une part augmenter les revenus, et d’autre part rendre le système plus équitable. Ce léger endettement des étudiants les rendrait plus réceptifs aux signaux du marché du travail pour leur permettre d’achever plus rapidement leurs études. Une politique qui permettra également une diminution des dépenses publiques en ces périodes d’économies budgétaires. Une amélioration en vue donc, qui viendrait ajouter au marché du travail du personnel qualifié, permettant un bon entretien des infrastructures et un fonctionnement de l’appareil industriel encore plus performant.

Passer à l’hydroélectrique

Cependant, nulle industrie ne peut exister sans énergie! La clef du développement économique est donc un approvisionnement énergétique bien géré, stable et compétitif. Aujourd’hui, une large part de la production électrique provient des énergies fossiles (36.1%). Cela inclut principalement le charbon, ressource peu coûteuse à exploiter et abondante dans les sols slovènes, quoique très polluante. Mais le pétrole et le gaz occupent une place non négligeable. Le nucléaire représente 35.1% de la production énergétique (une source nécessitant un apport d’uranium de l’étranger). Ces trois dernières ressources n’étant pas extraites sur place, le pays dépend des cours du baril pour sa production énergétique. L’énergie semble donc causer des problèmes, sachant que le pays s’est engagé à intégrer 20% d’énergies renouvelables dans la consommation énergétique globale d’ici 2020 dans le cadre de la réduction des gaz à effets de serres. Le pays possède une ressource très largement marginalisée: l’énergie hydroélectrique (26.1% dans la production électrique). Or les Alpes slovènes sont propices à de nombreux sites et cette source d’énergie est en pleine croissance (+10.2% en 2011–2012). Les Alpes slovènes, encore enclavées par endroits, sont peu exploitées et le pays est l’un des rares au monde ayant le potentiel permettant de produire 100% de son électricité grâce aux barrages. De plus, une mine de charbon, de par sa haute automatisation, emploie peu de main d’œuvre pour assurer son fonctionnement. Un barrage, unité de production de haute technicité, requiert de nombreux ouvriers et ingénieurs pour assurer une production optimale. Un argument de taille dans le cadre de la création d’emplois et de la lutte contre le chômage. Une piste à développer donc, sans oublier l’argument économique: aucune dépendance au cours du brut et du gaz, indépendance énergétique et une contribution positive au climat de la planète.

Vers la réindustrialisation

L’économie slovène s’est progressivement «tertiarisée» depuis l’indépendance en 1991. En 2013, les services représentaient 65.9% des emplois avec une croissance de 1.3% par an. La croissance du secteur industriel est de 1.9% en 2013 et sa contribution à l’emploi est de 31.6% (avec une moyenne de 28.7% pour l’UE). Le pays semble se diriger vers une réindustrialisation. Cependant, la Slovénie peine encore à produire des biens à haute technicité, ce qui permettrait d’exporter des produits finis à forte valeur ajoutée et de contribuer à rééquilibrer son déficit commercial de 1.22 milliard d’euros en 2008. Il semblerait donc qu’il faille rééquilibrer les secteurs d’activités, à l’avantage de l’industrie de pointe.

La Slovénie a réussi à sortir rapidement de son statut de pays communiste. Malgré la crise de 2008 et ses conséquences, nombreux sont les atouts du pays (faible démographie, bonne situation géographique) qui permettent d’envisager un retour de la croissance et un développement «vert» envié par ses voisins. Le petit état slovène a à sa tête, en la personne de Miro Cerar, un «euro-phile» convaincu, qui souhaite se rapprocher des institutions de Bruxelles et qui a su créer les bases d’une industrie performante et équilibrée. Il semblerait que le pays ait de beaux jours devant lui et que «le bon élève des pays des Balkans» (comparé à une Serbie ravagée par la Guerre du Kosovo et une Croatie dépendante du tourisme) soit une appellation méritée.

L’article Entrer en économie de marché est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
https://www.delitfrancais.com/2014/10/21/entrer-en-economie-de-marche/feed/ 0