Antoine Milette-Gagnon, Simon Tardif, Christophe Savoie-Côté - Le Délit https://www.delitfrancais.com/author/christophe-savoie-cote/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Fri, 05 Oct 2018 01:51:05 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 La suprématie américaine s’invite au Québec https://www.delitfrancais.com/2018/10/02/la-suprematie-americaine-sinvite-au-quebec/ https://www.delitfrancais.com/2018/10/02/la-suprematie-americaine-sinvite-au-quebec/#respond Tue, 02 Oct 2018 15:14:57 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=31896 Réponse à « Quebec’s quest for monolingual domination makes healthcare less accessible ».

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Le 18 septembre 2018, le McGill Tribune publiait dans ses pages une lettre d’opinion avec un titre qui ne faisait pas dans la dentelle, soit  : « Quebec’s quest for monolingual domination makes healthcare less accessible ».

Cette lettre traçait des liens douteux entre la Loi 10 du gouvernement québécois, une différence de taille de caractères entre l’information en français et celle en anglais sur de nouveaux panneaux à l’Hôpital St. Mary, et la prétendue « quête du Québec pour une domination unilingue ».  Anecdotique et erroné, cet article risque finalement d’alimenter la confusion et l’intolérance au sein de la communauté mcgilloise ; et c’est pourquoi Le Délit ainsi que L’Organisation de la Francophonie à McGill ont décidé d’unir leur voix afin d’apporter quelques nuances qui s’imposent.

La Loi 10 a été adoptée par le gouvernement du Québec en 2015. Littéralement, la  Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales, est le véhicule d’une vaste réforme du système de santé entreprise par le Parti libéral du Québec (PLQ), un parti élu par des majorités écrasantes dans les circonscriptions anglophones telles que Notre-Dame-de-Grâce (NDG), où se trouve l’Hôpital St.-Mary.

Ironiquement, le gouvernement libéral a eu recours au bâillon afin d’adopter la Loi 10. C’est ainsi qu’il a étouffé l’opposition du Parti québécois et de Québec solidaire au démantèlement des agences régionales de santé. Si les communautés anglophones sont préoccupées par la reconfiguration du système de santé, maints francophones le sont aussi. Contrairement à ce que l’article du Tribune prétendait, la désorganisation des services est une conséquence de la Loi 10 ; mais ce n’est certainement pas son objectif.

La communauté anglophone de NDG se trouve néanmoins en bonne posture afin d’exprimer ses inquiétudes, puisque Kathleen Weil, députée de NDG et ministre responsable des relations avec les Québécois d’expression anglaise, sollicite un nouveau mandat dans cette même circonscription.

Certains représentants des communautés anglophones ont d’ailleurs été invités en commission parlementaire avant que la Loi 10 ne soit adoptée. L’Article 76 reflète l’esprit de ces consultations et stipule que

« Tout établissement public doit élaborer, dans les centres qu’il indique, un programme d’accès aux services de santé et aux services sociaux en langue anglaise pour les personnes d’expression anglaise (…) »

Évoquant les modifications apportées à la taille des mots anglais sur certains nouveaux panneaux d’information à l’hôpital St-Mary, l’auteur va jusqu’à affirmer qu’une « loi comme la Loi 10 n’est pas seulement dommageable pour la sécurité des étudiants, mais [qu’]elle tente de s’occuper d’un déclin imaginaire dans la tradition linguistique francophone». Nous ne pouvons que dénoncer un propos si fallacieux.

En fait, cette prétendue volonté d’utiliser la Loi 10 afin d’éviter le déclin du français ne fut en aucun cas exprimée par quiconque à l’Assemblée Nationale lors des périodes de débats ou de travaux en commission parlementaire. Il est ridicule, voire mensonger, d’écrire que cette loi est mue par une volonté nationale de domination unilingue.

L’auteur de l’article fonde également son analyse de la situation linguistique du Québec sur une étude qui ne la considère que dans une perspective marchande, soit en termes d’offre et de demande (i.e.: en termes de « main d’oeuvre » parlant français et d’employeurs francophones). Un véritable diagnostic de l’état du français au Québec ne peut toutefois  faire abstraction des dimensions historique et culturelle d’une telle question.

Les chiffres que brandit l’auteur lorsqu’il parle du déclin «imaginaire» du français ne sont d’ailleurs pas présentés. Ils sont issus de l’auto-évaluation des citoyens du Québec quant à leur capacité de tenir une conversation en français. Certes intéressants, ces chiffres doivent être relativisés.  Pendant ce temps, la proportion de Québécois dont le français est la langue maternelle et le nombre de québécois qui le parlent à la maison sont tous deux en déclin. Et encore : une étude guidée par l’OCDE suggérait récemment que près de la moitié des Québécois sont des analphabètes fonctionnels. « French is on the rise » — vraiment?

Si l’auteur de cette lettre se sent sincèrement concerné par le respect et le dynamisme de la culture linguistique québécoise — tel qu’il prétend l’être —, alors il devrait méditer plus longuement sur le sens des mots qu’il emploie. Ces changements de panneaux résultaient de décisions administratives; et il est certainement malavisé de prétendre qu’il s’agit là d’une quête nationale dont l’objectif est la domination du français.

Les présomptions de ce genre peuvent avoir de dangereuses conséquences puisqu’elles alimentent la confusion ainsi que l’intolérance. N’ayons pas non plus peur d’appeler un chat un chat : cette lettre est non seulement malhonnête, mais elle est également irrespectueuse face aux Québécois qui en font déjà beaucoup pour accommoder les Québécois d’expression anglaise.

En terminant, bien que Montréal soit en effet une ville cosmopolite, elle fait également partie du Québec. Et ici, au Québec, le français n’est pas qu’une simple « tradition linguistique » : c’est notre langue officielle et le socle de notre identité.

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Que vive la langue française ! https://www.delitfrancais.com/2018/04/13/__trashed-2/ Fri, 13 Apr 2018 18:20:55 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=31202 Lettre en réponse à l'article Fuck la langue française publié dans Le Délit

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«Les années passent et les choses changent: un désintérêt flagrant occupe aujourd’hui impérieusement la question de la langue française au Québec.»

Ainsi s’amorçait l’article d’Antoine Milette-Gagnon et Simon Tardif, paru dernièrement dans le Délit. Quoiqu’on ne pourra reprocher aux auteurs leur froid mais franc examen de l’état du français, il s’avère toutefois nécessaire de rectifier, voire même refuser, leur critique du rôle que joue l’Organisation de la Francophonie à McGill (OFM).   

Cette lettre, je vous l’adresse en tant que nouveau président de l’OFM ; mais je vous l’adresse avant tout en tant que simple étudiant québécois à McGill.

Votre critique de l’état du fait français, au Québec tout comme ailleurs, n’a pas manquée de trouver chez moi un fort écho. Vous l’avez bien souligné, quoique le Québec possède une réalité culturelle et des défis qui lui sont certainement propres, plusieurs de ces derniers traduisent en fait un malaise qui n’épargne pas la francophonie dans son ensemble.

Laissez-moi vous l’avouer, je me vois également embarrassé à chacune des ces fois où l’on me rappelle qu’un des seuls groupes francophones de notre université à ne pas s’associer ou se représenter, c’est celui des Québécois.

Je suis de ceux qui croient que seuls les actes décideront de ce que l’on a voulu. Je ne peux ainsi que saluer votre volonté d’insuffler un peu de dignité à ce patrimoine sous-estimé, volonté qui prend la forme d’un réengagement par la plume. Certes, laissez-moi le souligner, le français n’est pas quelque chose qui ne vit que sur le papier.

Voilà précisément ce à quoi s’emploie l’OFM : tisser des liens entres les différentes communautés francophones de McGill ; créer un espace où les étudiants puissent partager, découvrir et vivre cette langue qu’est le français, afin finalement qu’elle n’y existe pas que dans les pages du Délit.    

En d’autres termes, ce qui guide l’Organisation de la Francophonie à McGill, c’est sa volonté d’harmoniser cette tension à laquelle vous faites référence dans votre article: celle de trouver et consolider un fragile équilibre entre défense du français et vivre-ensemble.

Quoique votre plume puisse être agile et colorée, certaines de vos critiques à l’endroit de l’OFM se doivent d’être refusées. Humblement, ce ne sont en fait pas les propos de l’OFM qui sont « molasses », mais plutôt l’analyse que vous nous en avez offert.

L’OFM vient tout juste de prendre forme. S’il est vrai qu’à ses débuts l’organisation n’a peut-être pas su canaliser ses énergies là où elles étaient requises, en dresser le portrait d’une « francophonie de cocktail » illustre bien à quel point cette critique s’est contentée de n’en contempler que la surface.  

Un peu de curiosité aurait suffit à vous informer que l’OFM travaille présentement avec l’AÉUM et l’administration de McGill afin de réinstaurer un poste permanent de Commissaire aux affaires francophones, dont le mandat sera de représenter les intérêts des francophones de McGill auprès des différentes instances de notre université.

Cela aurait également suffit à vous apprendre qu’elle participe actuellement à la création d’un comité d’intégration des étudiants internationaux, chargé d’éviter qu’on relègue ces derniers au fameux ghetto de McGill et qu’on les introduise plutôt à la langue et à la culture du Québec. Et c’est sans parler de notre soutien au programme de francisation des entreprises montréalaises, et des ponts que nous nous employons à construire entre les différents acteurs de la francophonie, soient-ils ou non de cette université.

Ce qui me désole, finalement, c’est que de votre tour qui n’est même pas faite d’ivoire mais plutôt d’un béton moche, vous méprisez ce que l’on tente de construire au lieu de vous y engager à nos côtés. Juger autrui est bien plus facile que de se juger soi-même. Après tout, les Québécois ne fonderont la nation dont ils se réclament que par des actes.  

Ces impératifs qui émanent de la condition du français au Québec, ce qu’ils commandent, c’est de naviguer dans cette complexité; et non pas de s’enfermer dans une forme d’autarcie culturelle. Le Québec d’aujourd’hui n’est plus celui d’il y a 30 ans ; la culture est par définition même dynamique, vivante, et il faut en tenir compte.

Saint-Exupéry disait: « Dans la vie il n’y a pas de solutions ; il y a des forces en marche ; il faut les créer et les solutions suivent. ».

Ainsi, si l’heure du dialogue n’est plus la vôtre, c’est un choix qui vous appartient. Je ne me ferai pas non plus apôtre d’un multiculturalisme aseptisant. Il faut savoir dire « Non »; et il faut enfin percer la « McGill bubble ».

En revanche, c’est par un brin d’amour-propre mais surtout en partageant notre amour de la culture québécoise et de sa langue qu’on mobilisera les forces nécessaires à de véritables changements, celles indispensables à la pérennisation d’un Québec francophone. Ce n’est certainement pas en brandissant l’étendard du repli sur soi.  

En effet, les années passent et les choses changent. Et justement, tout n’est pas si gris. Les astres semblent même s’aligner en faveur de la francophonie à McGill. L’écosystème francophone de notre université s’organise, prépare son calendrier de l’année prochaine, et jamais l’administration n’y a été aussi réceptive.

Prennent donc forme les contours d’un véritable changement. L’OFM s’engage.

Le serez-vous avec elle?

-Christophe Savoie-Côté

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