Ronny Al-Nosir, Joseph Boju, Julia Denis, Inès Léopoldie-Dubois, Céline Fabre, Ikram Mecheri, Magdalena Morales, Chloé Mour, Matilda Nottage, Esther Perrin Tabarly, Théophile Vareille, Arno Pedram - Le Délit https://www.delitfrancais.com/author/celine-fabre/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Fri, 12 Feb 2021 19:52:34 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 Sauver la presse francophone https://www.delitfrancais.com/2017/11/14/sauver-la-presse-francophone/ Tue, 14 Nov 2017 16:46:23 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=29857 40 ans après sa naissance, Le Délit risque de disparaître.

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Les universités québécoises, censées être le lieu du savoir et du débat d’idées, manquent à leur devoir de protection de la liberté d’expression. Sans presse libre et indépendante au sein des universités, cette liberté d’expression ne devient que façade. Nous demandons aux dirigeants de l’Université McGill d’abolir la mesure exigeant la tenue d’un référendum quinquennal sur les frais de cotisation de 3$ par session que chaque étudiant est tenu de payer aux journaux étudiants, Le Délit, The Mcgill Daily et le McGill Tribune

Nous pensons que cette mesure fragilise la liberté d’expression au sein de l’Université tout en marginalisant davantage les voix minoritaires, telles que les voix francophones qui sont représentées par Le Délit, le seul journal francophone de l’Université McGill. Nous demandons à l’administration de l’Université d’abolir cette obligation qui précarise la francophonie et les journaux étudiants sur le campus.

McGill néglige sa francophonie

Né sous le lys en 1977, Le Délit est la publication sœur du McGill Daily, créé en 1911, le plus vieux journal étudiant du Québec. Les deux rédactions forment la Société de publication du Daily (SPD), un organisme indépendant et à but non lucratif. Ce sont les éditeurs du Daily qui, lors des débats de la loi 101 sur le bilinguisme, ont reconnu la nécessité d’un journal entièrement francophone. Conséquement ils créèrent Le McGill Daily français, notre actuel Délit. Leur motivation était simple: favoriser l’entente entre les deux solitudes. 

À l’image des deux groupes linguistiques majoritaires du Québec, le Daily et Le Délit ont grandi dans l’interdépendance. Deux journaux, deux équipes, deux lignes éditoriales mais un seul bureau et une même vocation: proposer une presse libre et indépendante aux étudiants de l’université.

Jusqu’au 16 novembre, les étudiants doivent se prononcer sur la survie de ces deux institutions pour le référendum quinquennal. Un peu plus tôt ce mois-ci, le conseil législatif de l’Association des étudiants de l’Université McGill (AÉUM ou SSMU, en anglais, ndlr), a voté contre une motion de soutien au référendum d’existence de la SPD. Ce désaveu de la part des élu·e·s étudiants prouve leur absence de considération pour la francophonie à McGill.

Les francophones représentent pourtant 20% du corps étudiant, lequel est bilingue à plus de 50%. Pour tous ceux-là, Le Délit est un porte-parole et un acteur majeur de la vie étudiante. Dans ses pages, il couvre la scène et les coulisses de la politique étudiante mcgilloise, montréalaise et québécoise, désespérément cantonnée à la sphère anglophone. Dans la communauté, il joue un rôle prépondérant en co-organisant notamment la Francofête, une semaine de célébrations de la francophonie sur le campus. Il est aussi le représentant de McGill au sein de l’association de la Presse étudiante francophone (PrEF) et a remporté le prix du meilleur journal étudiant du Québec décerné par les Amis du Devoir. Ainsi, Le Délit relie nos étudiant·e·s francophones, parfois enfermés dans la McGill bubble, au reste du Québec.

De l’importance de la presse étudiante

Au cours de ces dernières années, les journaux étudiants mcgillois ont été d’utiles lanceurs d’alerte sur le campus. Agressions sexuelles, dysfonctionnement chronique des services de santé mentale, précarité ou encore malnutrition étudiante, autant de sujets mis en lumière par le Délit et The Daily.

Par ailleurs, en l’absence d’une école de journalisme à McGill, les journaux étudiants compensent et forment à chaque année des dizaines de mcgillois·e·s au journalisme en français et en anglais.

L’imposition de ce référendum menace les rédactions étudiantes comme une épée de Damoclès. Au lieu d’assurer leur fonction, elles se voient régulièrement contraintes d’allouer leurs maigres ressources à une campagne de survie. De plus, cette campagne devient en quelque sorte permanente, tant il faut se plier à la majorité et au bon vouloir des groupes de pression du campus. Comment, dans ces conditions, assurer la liberté de la presse et le fonctionnement même de la démocratie dans notre communauté étudiante?

Nous comptons sur la bonne volonté de l’administration de l’Université McGill pour mettre fin à ce système référendaire qui précarise les journaux étudiants et met en péril la seule voix francophone, indépendante et libre du campus.

Signataires : 

Ronny Al-Nosir, chef de section innovations, automne 2016

Joseph Boju, rédacteur en chef, 2014–2015

Julia Denis, rédactrice en chef, 2015–2016

Inès Dubois, coordinatrice réseaux sociaux, 2014–2016

Céline Fabre, chef de section culture 2015–2016

Ikram Mecheri, rédactrice en chef, 2016–2017

Magdalena Morales, coordinatrice multimédias, automne 2016

Chloé Mour, cheffe de section culture, automne 2016

Matilda Nottage, coordinatrice multimédias, 2015–2016

Esther Perrin Tabarly, cheffe de section société, 2015–2016

Théophile Vareille, éditeur de section actualités, 2015–2017

Arno Pedram, responsable multimédia Le Délit, hiver 2017, éditeur culture The McGill Daily, 2017–2018

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Héroïnes des temps modernes https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/heroines-des-temps-modernes/ Tue, 07 Feb 2017 14:48:49 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=27546 De la France à l’Afghanistan, la culture hip hop se renouvèle au féminin.

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Sianna

Héritière du rap français

Originaire du Mali, Sianna est une rappeuse fran- çaise qui se démarque par la diversité de son re- gistre, ainsi que sa capacité à s’approprier le rap sans tomber dans la caricature. En 2014, elle poste sur Youtube un tour du monde en freestyle: une suite de vidéos qu’elle s’est amusée à tourner aux quatre coins du monde.

Le morceau à écouter:

Le morceau «Go Fast» pour les adeptes de sons bruts, «Havre de paix» pour un bon retour aux auto-tunes des années 2000. Sortie de l’album Diamant Noir le 24 février.

Mahaut Engérant | Le Délit

Lex Leosis

Canada réveille-toi

Le Canada aussi possède son lot de rappeuses bien que, comme ailleurs, les femmes peinent à se frayer un chemin dans le monde du hip-hop. Basée à Toronto, Lex Leosis ne devrait pas tarder à faire par- ler d’elle alors que sa musique gagne en détermination.

Le morceau à écouter:

«Snack Size» pour un délicieux juste milieu entre beats planants et débit irréprochable. «Monogamy» pour le clip en marche arrière et les notes de saxophone.

Mahaut Engérant | Le Délit

Sonita

La lutte contre le patriarche

Sonita naît en 1996 à Hérat en Afghanistan. Elle a 14 ans lorsqu’elle rencontre la réalisatrice iranienne Rokhsareh Wghaem Maghami qui l’aide à fuir un ma- riage arrangé tout en l’encourageant dans ses projets musicaux.

Le morceau à écouter:

Le clip «Brides for Sale», fait de Sonita une des plus jeunes rap- peuses à avoir osé dénoncer ouvertement la place attribuée aux femmes dans la société traditionnelle où elle a grandi.

Mahaut Engérant | Le Délit

À voir aussi: 

https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/nouvelle-vague-du-rap-montrealais/

https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/27543/

https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/le-rap-cetait-mieux-avant/

https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/rappeurs-de-mcgill-et-alentours/

https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/heroines-des-temps-modernes/

https://www.delitfrancais.com/2017/02/07/un-artiste-engage-et-engageant/

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Trip-hop surprise https://www.delitfrancais.com/2016/12/12/trip-hop-surprise/ Tue, 13 Dec 2016 00:06:45 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=27102 Heartstreets, le son que le public du Centre Phi n’attendait pas.

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Les premières parties de concert, c’est bien. Quand elles sont réussies, c’est mieux. En revanche, lorsqu’elles prennent le dessus sur l’intérêt que l’on témoigne à l’artiste phare de la soirée, on ne sait plus vraiment quoi penser. C’est ce qui est arrivé, alors que l’artiste torontois Daniel Caesar se présentait sous les projecteurs de la salle du Centre Phi, le samedi 26 novembre.

On croyait s’être déplacé seulement pour se trémousser sur son tube «Get You», mais l’artiste Canadien considéré par certains comme le «nouveau Drake» s’est fait attendre. Peut-être un petit peu trop: le deuxième groupe présent avant son arrivée en a mis plein la vue à un public peu préparé. Ce qui est commode avec les artistes invités pour réchauffer une foule avant la fête, c’est que l’on est rarement déçu car on ne s’attend pas à grand-chose.

En avril dernier, le rappeur irakien The Narcycist avait volé la vedette aux calibres du duo Mobb Deep à l’Olympia de Montréal. En ce soir de novembre, le duo de rap-trip-hop Heartstreets suit son exemple et fait preuve d’une énergie très contagieuse. Originaires de Montréal, Emma Beko et Gabrielle Godon viennent tout juste de sortir leur premier ep You and I. Pourtant, elles occupent la scène comme des championnes sur un ring de boxe, conservent leur gravité scénique jusqu’aux dernières notes de morceaux dont le mélange chant et rap surfe sur des rythmes planants.

Comme il est bon d’entendre une voix de rap féminine ! Dans ce monde où les meilleurs M.C parviennent à nous faire croire qu’il te faut quelque chose entre les jambes pour être capable de poser un flow digne de ce nom. Savoureusement parlant, les lignes d’Emma sont  le morceau de pain dont la voix de Gabrielle est le fromage. Sur le plan musical, une harmonie nouvelle se dévoile, de «Cruising with you» à «How I got over», la justesse des mots ne nous donne plus aucune raison de douter. Derrière Heartstreets se cache une véritable envie de raconter, et devant nous : un trou de mémoire quant à qui on était venu écouter en premier lieu.

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Les rois du bitume https://www.delitfrancais.com/2016/11/15/les-rois-du-bitume/ Tue, 15 Nov 2016 15:01:15 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=26762 Les Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM) reviennent à Montréal jusqu’au 20 novembre, pour le plus grand bonheur des cinéphiles. Avec près de cent films présentés, les RIDM nous font voyager de Jérusalem à Lampedusa, de Paris à Montréal. Disséminée entre plusieurs cinémas du centre de Montréal, la programmation originale et éclectique de 2016… Lire la suite »Les rois du bitume

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Les Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM) reviennent à Montréal jusqu’au 20 novembre, pour le plus grand bonheur des cinéphiles. Avec près de cent films présentés, les RIDM nous font voyager de Jérusalem à Lampedusa, de Paris à Montréal. Disséminée entre plusieurs cinémas du centre de Montréal, la programmation originale et éclectique de 2016 promet d’offrir aux spectateurs un nouveau regard sur le monde.


T.o swag: expression remontant à l’ère de Shakespeare et qui définit celui qui marche d’un air défiant ou insolent. Swagger: titre du tout dernier film-documentaire d’Olivier Babinot présenté dans le cadre des RIDM le 13 novembre 2016. Alors qu’il a passé ses années de collège à briser des vitres et monter des canulars téléphoniques contre ses malheureux professeurs, ce réalisateur strasbourgeois rend aujourd’hui hommage à cette institution: à travers le portrait de collégiens des quartiers chauds de la banlieue parisienne. Sur son blog dédié à l’élaboration du film, il confie que c’est «cette fierté balancée à la face du monde, confrontée à la dureté déprimante de leur environnement aux horizons bouchés, qui m’a bouleversé pendant les deux ans que j’ai passés là-bas».

Voguant entre la fiction et le documentaire, Swagger est un mélange de mise en scène où les collégiens jouent la comédie, et d’entrevues où ils incarnent leur propre rôle. Il se place entre l’esthétique glaçante de La Haine de Matthieu Kassovitz — considéré comme l’un des premiers films mettant en vedette cet envers du décor — et  The We and the I  de Michel Gondry qui suit un long trajet de bus de lycéens du Bronx. Le passé de caïd d’Olivier Babinot, son désir de revenir sur ces années «gâchées» rend d’autant plus touchants les collégiens d’Aulnay-sous-Bois lorsque, face à la caméra, ils nous expliquent d’où ils viennent, qu’ils veulent réussir leur vie et ne surtout pas retourner au  bled.

Sur des notes de musique passant du rock à la voix grave du rappeur londonien Loyle Carner, chaque collégien devient une star, tour à tour. L’une nous explique qu’elle aimerait bien être Obama, pour envoyer des bombes en Allemagne de temps en temps à cause de ses difficultés à suivre en cours d’allemand, tandis qu’un autre «préfère jouer au foot que parler à des filles». Alors que le côté théâtral de ce collège de Seine-Saint-Denis semble aller de soi, il faut tout de même une dose de cran et de patience pour dé-diaboliser les jeunes de ces quartiers et leur prêter l’attention qu’ils méritent.

                                                                                                                   

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Fuocoammare, entre deux eaux https://www.delitfrancais.com/2016/11/15/fuocoammare-entre-deux-eaux/ Tue, 15 Nov 2016 14:58:38 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=26759 Ou comment aborder le documentaire de Gianfranco Rosi, premier tour de force des RIDM.

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Les Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM) reviennent à Montréal jusqu’au 20 novembre, pour le plus grand bonheur des cinéphiles. Avec près de cent films présentés, les RIDM nous font voyager de Jérusalem à Lampedusa, de Paris à Montréal. Disséminée entre plusieurs cinémas du centre de Montréal, la programmation originale et éclectique de 2016 promet d’offrir aux spectateurs un nouveau regard sur le monde.


Le plus grand malheur du journaliste culturel est que plus un film est réussi, plus il est difficile de lui rendre justice avec des mots. Pour nous faciliter la tâche, il faudrait garder à l’esprit que, de même que des images filmées ne représentent qu’un infime faisceau de la réalité, un article du Délit  ne reflète hélas qu’un grain de ce qu’il cherche à exprimer. Au lecteur, donc, à travers la force de son imagination, de mettre en relief ce qui est lu, de rendre aux idées la totalité de leur dimension.

Lors de sa toute première présentation aux RIDM de Montréal, le 10 Novembre 2016, les images capturées par le réalisateur italien Gianfranco Rosi sont parvenues à émouvoir et faire rire de façon presque équitable. Le sujet: la crise des réfugiés. Peut-être la plus grande tragédie qui a frappé l’Europe depuis l’Holocauste, pour reprendre les mots du cinéaste, lors d’une conférence de presse après avoir reçu l’Ours d’or à Berlin. Le caractère pressant de ce qui est rarement compris autrement que comme un «sujet d’actualité» est bel et bien une réalité qui ne s’arrête pas lorsque l’on ferme son journal. Et pourtant, les bêtises de Samuele, un petit garçon que l’on suit tout au long du film, adoucissent le drame tout en questionnant la responsabilité de chacun de nous.

Prise en triangle entre Malte, la Sicile et la Tunisie, l’île de Lampedusa est devenue une plaque tournante de la crise migratoire mais n’en possède pas moins d’habitants sédentaires, qui vivent de la pêche et naviguent ses eaux alentour depuis des générations. La famille de Samuele n’échappe pas à ce quotidien. Près d’une fenêtre, le jeune garçon écoute distraitement sa grand-mère lui conter son expérience en temps de guerre. À son âge, il se préoccupe surtout de la fabrication de son lance pierre qui transformera un champ de cactus en terrain de jeu.

La ronde des nomades

Petit à petit, une alternance plus prononcée se crée entre ces plans d’Italiens et ceux de «voyageurs forcés» que l’on voit non seulement en mer, armés de leurs couvertures de survie mais aussi à terre. Lentement, ils apprennent à faire face à cette expérience, certains chantent, prient ou même jouent au football au sein de cette perte de repères unanime. On passe d’un bord à l’autre sans transition, Samuele simule une maladie chez le docteur tandis que des rescapés évacuent une embarcation fragile et que les troupes de sauvetage répondent aux appels, tentent d’agir avant qu’il ne soit trop tard.

Ce qui est particulièrement troublant dans  Fuocoammare, c’est que les réfugiés et les habitants de l’île semblent placés au même niveau, il n’existe pas de hiérarchie entre les soucis de l’un et ceux de l’autre. Pourtant, l’un a peut-être traversé la Libye avant de fuir l’Etat Islamique, puis passé parfois six ans en prison – comme le chante un des réfugiés au cours du film – mais cela ne change rien à la façon qu’a Samuele de manger bruyamment ses spaghettis ou de bâcler ses devoirs d’anglais. Les images de Gianfranco Rosi miment l’impasse que représente ce fléau humanitaire. Un dialogue de sourds, deux extrêmes qui ne semblent pas se voir et entre les deux: la difficulté que traverse ceux qui se risquent à tendre la main. 

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Alaclair fontaine, m’en allant promener https://www.delitfrancais.com/2016/09/20/alaclair-fontaine-men-allant-promener/ Tue, 20 Sep 2016 14:49:58 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=25833 Le retour d’un groupe qui en dit long sur l’avenir du rap québécois.

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Une légère inquiétude se promène au sein du public alors que quatre musiciens entament ce qui ressemble drôlement à une suite pour violoncelle en sol majeur de Bach. Il y avait pourtant bien écrit «Alaclair Ensemble, 16 septembre» sur la devanture lumineuse du Club Soda. On s’attendait à tout de la part de ce groupe de rap originaire de Québec à l’imagination sans limite, sauf à une introduction aussi solennelle. Et c’est bien là le tour de force des six «Humble French Canadiens», comme ils aiment à s’appeler, issus de la contrée imaginaire du «Bas-Canada», dont le drapeau se distingue par une feuille d’érable orange qui a perdu le sens de l’orientation. Quand le show commence vraiment, le silence respectueux se voit remplacé par un entrain plus emblématique de la sortie de ce quatrième album: Les frères cueilleurs. Le dynamisme du  live permet de mesurer la variété de leur répertoire musical. Les beats qui résonnent échappent souvent à la mollesse de la dichotomie couplet/refrain au moyen de tournants inattendus, comme au cours de la pièce «Bazooka Jokes» ou «Fouette» dont les changements de rythme rappellent que l’on ne plaisante pas avec le rap au Québec.

c-concert
Jerry Pigeon

       Comment ça, on ne plaisante pas? Si vous vous concentrez sur les paroles et ce faux air sérieux – souvent saccadé par les pitreries du MC (Maître de Cérémonie, ndlr) Robert Nelson— vous comprendrez que tout est mis en place pour prendre la langue française par les pieds et la secouer dans tous les sens. Non seulement ils ont inventé un jargon qui — comme tout vocabulaire poétique — requiert un temps d’adaptation, mais en plus, cette expérience se déroule dans un climat d’autodérision des plus sincères. Alors que le rap américain ou français reste ancré dans une tradition de durs à cuire, Alaclair Ensemble, à la fois roi et valet du hip-hop franco-canadien, n’a peur ni du ridicule, ni de la vacuité qui parfois souligne l’insolence de son langage.

À l’issue de ce spectacle, ce que la présence physique et artistique d’Alaclair Ensemble illustre, c’est que sous nos yeux se déroule un processus nouveau, que l’on pourrait qualifier de génie. Car le génie se cache rarement là où on l’attend et passe plutôt par l’énergie et le message transmis. Alors, s’il nous est donné d’accéder à un univers si unique, c’est soit parce que l’on oublie souvent d’ouvrir grand ses oreilles, soit qu’un gang de Bas Canadiens a travaillé dur pour l’élaboration d’un son qui fera longtemps vibrer la fleur de lys. 

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Le tour du siècle en soixante voix https://www.delitfrancais.com/2016/09/13/le-tour-du-siecle-en-soixante-voix/ https://www.delitfrancais.com/2016/09/13/le-tour-du-siecle-en-soixante-voix/#respond Tue, 13 Sep 2016 21:40:13 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=25651 Rassembler 75 ans d’Histoire en un ouvrage, l’idée folle de la journaliste québécoise Mélanie Loisel.

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Sorti à la fin du mois de Novembre 2015, Ils ont vécu le siècle, de la Shoah à la Syrie est un recueil de soixante-deux témoignages des grands épisodes historiques du 20e siècle, de la création de l’État d’Israël à la révolution cubaine, en passant par la guerre de Yougoslavie. Dans ces échanges, des survivants — penseurs, militants, hommes et femmes qui peuvent encore mettre en relief ce qu’ils ont vécu — prennent la parole tour à tour. Avant de proposer des solutions, ce projet ambitieux mené par la Québécoise Mélanie Loisel commence par rappeler l’importance de comprendre en quoi consiste le projet.

Le Délit (LD): Pour débuter simplement: d’où vous est venue cette envie de cheminer parmi tant d’événements historiques?

Mélanie Loisel (ML): Il faut remonter en 2013. À l’époque j’ai une idée qui me traverse l’esprit: il faudrait recueillir les témoignages de gens qui ont été au cœur de l’Histoire, qui commencent à être très âgés. J’ai alors commencé à lancer, comme des bouteilles à la mer, des messages tout simples: «Allô, je suis une jeune journaliste québécoise. J’aimerais vous rencontrer pour tirer des leçons du passé, voir ce que vous pensez du monde d’aujourd’hui et laisser un message à la jeunesse.»

Contre toute attente, une semaine ou deux plus tard, les réponses ont commencé à affluer; on acceptait de me rencontrer à Paris, Beyrouth, Stockholm… À l’époque, je venais de finir des contrats Radio-Canada, j’avais plus d’emploi, plus de copain et c’est comme ça que je suis partie à la rencontre de ces gens partout dans le monde.

entrevue2

LD: La surprenante facilité avec laquelle vous avez eu accès à tous ces témoins vous a‑t-elle fait réaliser que l’Histoire est peut-être plus accessible qu’on ne le croit?

ML: C’est sûr que je n’aurais jamais pu m’imaginer entrer en contact avec tous ces gens! Je visais des personnes relativement âgées — je m’étais dit soixante-dix ans minimum (rires) — pour qu’ils aient la parole libérée. Je ne voulais pas de langues de bois, des gens au pouvoir qui nous chantent leur cassette. Et puis arrivé à un certain âge, tu as peur de sombrer dans l’oubli, que le combat que tu as mené toute ta vie disparaisse… Je pense que ça leur a fait plaisir que l’on s’intéresse à eux.

LD: Comment est-ce que vous avez choisi les témoins de ces événements ? Car dans votre livre il y a à la fois des entrevues avec des victimes de conflits et des membres du gouvernement comme l’ancien président israélien Shimon Peres.

ML: L’idée était vraiment de trouver les acteurs numéro un ou numéro deux qui ont été au cœur de ce qui nous a marqué. C’est sûr que ce sont souvent des survivants, qu’il s’agisse de l’Holocauste ou d’Hiroshima, car beaucoup des acteurs en soi ne sont plus de ce monde. Par la suite j’ai aussi choisi des figures de proue qui seraient en mesure de me raconter ce qu’elles ont vécu, que ça soit pendant la guerre d’Algérie, celle du Liban, la révolution des Œillets au Portugal ou du Velours en Tchécoslovaquie.

LD: Vous vous êtes concentrée sur les luttes et conflits qui ont jalonné le 20e siècle. Quelles évolutions ou répétitions avez-vous pu observer parmi ce long spectre de violences?

ML:  Ce que l’on réalise — en tout cas durant ces soixante-quinze dernières années — c’est que tout est un petit peu interconnecté, que ça soit les luttes pour les indépendances, les régimes dictatoriaux… J’avais quatre grands thèmes qui se rejoignent souvent: la paix, la lutte pour les droits humains, l’environnement, le développement des États. Les pays africains qui cherchent à se développer c’est aussi parce qu’ils ont connu la colonisation. C’est drôle parce que plusieurs personnes font des liens les uns par rapport aux autres, parce qu’on ne peut pas parler de la décolonisation en Afrique sans parler de la guerre d’Algérie, ou de celle du Vietnam. Ça nous rappelle à quel point on vit dans un monde plus connecté qu’on ne le croit.

Mais ce que j’ai réalisé en bout de ligne, ça peut paraître bien simple, mais c’est que l’on a réussi à mettre fin à des conflits, à signer les accords d’Évian pour mettre un terme à la guerre d’Algérie, à signer des traités de non-prolifération des armes nucléaires pour éviter de pires guerres, donner des droits aux femmes, aux Afro-américains, aux homosexuels. Ce sont des hommes et des femmes qui n’avaient rien d’extraordinaire qui ont milité pour le bien-être collectif . Et oui, tout n’est sûrement pas parfait, mais au moins on a fait un pas en avant. Quand aujourd’hui on regarde la Syrie, on peut désespérer mais il faut se rappeler qu’il n’y a pas de solution miracle, il va falloir s’asseoir, négocier, lire, rencontrer des gens. Ce sont toutes sortes de choses à mettre en place, ça demande une vision large et beaucoup de temps mais la pire erreur serait de ne plus chercher à mettre fin à ce conflit.

LD: Quant aux témoins, avez-vous des exemples à nous donner de la relation qu’ils entretenaient avec ces événements, tant d’années après?

ML: C’est drôle parce qu’il y a vraiment de tout. Il y a ceux qui ont l’impression d’avoir fait la différence, aussi minime soit-elle, comme le commandant Azzedine en Algérie, qui a quand même contribué à l’indépendance de son pays. Malgré tous les problèmes que l’Algérie a encore aujourd’hui, il a le sentiment d’avoir participé à une partie de l’Histoire.

D’autres, par contre, réalisent que les efforts qu’ils ont faits sont en train de tomber en ruine. Par exemple, le conseiller Václav Havel, en République Tchèque, qui me disait qu’il avait tellement cru à cette nouvelle liberté que, quand il a eu le pouvoir en 1989 après l’indépendance, la prise de conscience de ses limites a été douloureuse. L’ivresse du pouvoir cause beaucoup de déception et certains ont eu l’honnêteté, avec le recul, de l’admettre. Il y avait aussi des gens très amers, comme Jacques Parizeau vis-à-vis de l’échec de son référendum pour l’indépendance du Québec en 1995.

LD: Si vous deviez nommer un témoin en particulier qui vous a marqué?

ML: Il y en a qui m’ont marqué pour plusieurs raisons. C’est sûr que quand on voit pour la première fois quelqu’un avec un tatouage des camps nazis, c’est troublant; le survivant s’est mis à pleurer et tu réalises l’impact que ça a eu sur les êtres humains. Et puis, en même temps, j’ai adoré une entrevue avec François Bizot, qui a été emprisonné dans les camps de Pol Pot au Cambodge et a été le seul libéré par son tortionnaire, le Douch, qui a quand même tué plus de  cent-mille personnes… Cet échange demeure le plus pertinent, corsé et stimulant intellectuellement parce qu’il faisait appel à la part du bourreau que nous avons tous en nous. Mais je pourrais parler de chacun d’eux. Par exemple, le 11 septembre arrive bientôt (cette entrevue a été réalisée le 7 septembre, ndlr) et encore hier je me rappelais des yeux du chef des pompiers de New York qui a vu plus de trois-cent hommes mourir, à qui il eut advenu de décider combien d’hommes envoyer, quand arrêter. Quand tu perds tes hommes dans de tels attentats, ça te fait voir ces événements-là sous un angle tellement plus humain.

Je suis toujours un peu étonnée et j’aime beaucoup que l’on nous rappelle les combats des Mandela de ce monde, des Martin Luther King et à quel point ils ont pris des risques. À quel point ils ont mis leur vie en jeu, consacré leur vie au bien-être des leurs. On ne le répète pas assez. On dirait qu’on les connait de nom mais quand tu te fais raconter ce qu’ils ont fait, tu réalises qu’ils en ont eu de la force et du courage. Parfois on pense savoir — sans vraiment savoir — par où ils sont passés. Au-delà de l’être mythique, c’était des Hommes.

LD: Depuis sa sortie en novembre 2015, Ils ont vécu le siècle a fait un bon bout de chemin…

ML: Oui il est encore en librairie, il a été déposé à la bibliothèque de l’UNESCO pour la préservation des mémoires, dans deux semaines il sera déposé au mémorial de la Shoah en Israël… Et puis ce livre s’adresse vraiment aux étudiants, c’est à nous maintenant de mettre nos talents au service de l’humanité. J’étais la première à être révoltée de voir la Syrie, frustrée par les dernières années. Je me suis demandée ce que moi je pouvais faire; je sais écrire, je crois que je suis bonne avec les gens et j’aime voyager, donc j’ai combiné mes passions. Et puis, quand on cogne aux portes des gens, c’est étonnant mais on peut s’en faire ouvrir. Il suffit parfois d’essayer. Je me suis intéressée aux conflits, mais il y a tellement de choses; si tu as le goût de militer pour le changement climatique, d’aller en Arctique, alors go! Tant qu’à vivre, essayons de mieux vivre ensemble. 

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Nostalgie du présent https://www.delitfrancais.com/2016/05/12/nostalgie-du-present/ Thu, 12 May 2016 15:55:42 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=25361 Entre The Narcicyst et Mobb deep, la relève hip-hop ne chôme pas à l’Olympia de Montréal.

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S’il convenait d’en douter, soyez rassurés: le rap américain présente encore de l’intérêt. En ce 26 avril, le tumulte légendaire du groupe Mobb Deep nous offre une preuve supplémentaire que l’essence de la culture hip-hop, d’abord née d’une prise de conscience politique et esthétique au milieu des années 1970, ne s’est pas totalement noyée dans l’industrie du showbiz. Il reste quelques bribes de cet esprit «gangsta», «street-life», qui forme encore une des caisses de résonnance de l’identité des communautés afro-américaines, dans une nation où le racisme trace pieusement sa route.

Le rappeur irakien The Narcicyst débarque sur la scène de l’Olympia comme la première surprise musicale de la soirée. Yassin Alsalman — de son vrai nom — est aussi professeur et du haut de l’estrade il occupe l’espace sans complexe, échange avec le public et n’hésite pas à faire taire les bavards des premiers rangs. On s’imagine plutôt bien le silence respectueux qui doit régner dans ses salles de classes à l’Université Concordia, tant il ne plaisante pas avec la culture hip-hop. Croyez-le ou non, avec The Narcicyst comme professeur, il est possible de franchir les portes de l’institution montréalaise pour se rendre en «Art of cool» , «Hip-hop past, present and future», ou être en retard dans ses readings de «Beats, rhymes and life».

Courtesy of Jessica Lehrman

Mais ne nous éloignons pas de trop de ce soir de 26 avril où – enfin – le duo new-yorkais Mobb Deep vient de faire son apparition. Évidemment, l’excitation du public atteint des sommets dès lors que Prodigy et Havoc prennent le micro, comme ils le font depuis l’aube des années 1990, avec un punch qui ne fléchit pas. On est d’abord légèrement sceptique car on attend peut être trop de ces légendes du rap East Coast qui, dans la lignée de Nas ou Notorious B.I.G, ont su se démarquer par leur ton apocalyptique. Transformer des problèmes sociaux en épopée et tragédies de rue permet de donner du relief à la souffrance de tous les jours, et c’est aussi cette exploration qui fait de la musique rap un médium si précieux. L’un après l’autre, les grands classiques ne se font pas attendre: «Hell on Earth», «Quiet Storm», dommage que l’avalanche que les deux natifs du Queens débitent commence par manquer un petit peu de nuance. Elle forme un gros bloc qui assoiffe une instrumentalisation à la résonance pourtant moins rêche qu’il n’y paraît.

Une chose est sûre c’est que le cœur y est, tant du côté du public que de Mobb Deep, pour recréer l’ambiance de l’âge d’or du rap. Dans la fosse, casquettes et do-rags sont de rigueur pour se mêler à la foule réunie par ce même désir de secouer la tête à l’unisson. Sur scène: des hommages à Tupac, Phife Dog (A Tribe Called Quest) et même le nom du chanteur Prince — décédé le 21 avril — retentissent dans le micro de Prodigy.

Après ce bref interlude, les sujets sensibles qui ont longtemps été la raison d’être du mouvement hip-hop refont eux aussi surface. Bien que les sonorités du nouvel album livré au public montréalais s’éloignent des bons vieux beats des années 1990, la gravité de son contenu ne tranche pas avec la tradition qui a forgé leurs débuts. Un rituel de vrai caïd qui nous donne l’impression de bouncer dans les rues de la cité Queensbridge une grosse radio sur l’épaule — comme dans les films de Spike Lee — ou peut-être juste de contribuer à l’héritage des papis, papas et descendants du cosmos de musique rap d’ici et d’ailleurs, ce qui est tout de même quelque chose.

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Sous les pigments exactement https://www.delitfrancais.com/2016/04/05/sous-les-pigments-exactement/ https://www.delitfrancais.com/2016/04/05/sous-les-pigments-exactement/#respond Tue, 05 Apr 2016 06:06:48 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=25311 Vous venez tous juste de poser le pied sur la planète ONF, silence, moteur, action.

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Mis à part, peut-être, les jardins botaniques et la voix de Stan Getz, il semblerait qu’il existe peu de choses aussi relaxantes que les courts métrages de l’Office national du film du Canada. La structure familière de la phrase qui précède fera sourire les plus fidèles d’entre vous, non sans une fâcheuse impression de déjà-vu. Il y a près d’un an, Le Délit publiait une petite enquête sur les sentiers des dessins animés et courts métrages expérimentaux canadiens de la planète www.onf.ca. Il est grand temps de donner suite à ce premier volet que l’on surnomme «reviens».

Cette fois ci le voyage démarre avec L’Homme sans ombre, un véritable tableau vivant et mouvant animé par le cinéaste Georges Schwizgebel. L’histoire s’inspire d’un conte surréel qu’Adelbert von Chamisso achevait en 1814, dans lequel un homme accepte d’échanger son ombre contre la bourse de Fortunatus: objet magique qui le rendra riche jusqu’à la fin de sa vie. C’est sans prétention que la trame visuelle de Schwizgebel suit les étapes d’un récit qui, dans les règles de son genre, cherche à édifier son public. C’est pourtant avec une grande liberté que le focus du film tourne autour du héros, que des formes abstraites se fondent en décor mondain, que l’on passe du gris à une palette haute en couleur et que la musique, les bruitages, accompagnent les images sans jamais les brusquer.

Mahaut Engérant

Il nous faudra alors quelques minutes pour méditer sur ces coups de pinceau frétillants avant de jeter l’ancre du côté de La carte impossible, pour un bref cours de cartographie à l’aide d’un pamplemousse. Déjà en 1947, les animateurs de ce grand-père du tutoriel tentaient de déjouer les lois de la géométrie en représentant à plat notre planète qui, jusqu’à preuve du contraire, est de forme sphérique.

Si le sérieux de ce format éducatif manque de vous assommer, il n’est peut-être pas trop tard pour embarquer sur le navire parodique de Pimp my botte (Rénover mon bateau ndlr). Une esthétique qui rappelle le dessin animé Futurama, un slang acadien quasi-incompréhensible, de la musique techno dans un tout qui se moque gentiment de l’émission américaine de restauration de voiture Pimp my ride. Remercions Marc Daigle pour cette idée loufoque et l’emploi audacieux du mot «botte» pour dire «boat»: il est vrai que le Canadien français aime jouer avec le bilinguisme.

Ceux pour qui ce manque de goût arrachera un soupir exaspéré choisiront alors de toquer à la porte de Chaque enfant, qui remporta l’Oscar du meilleur court métrage d’animation en 1979. Pour commémorer la déclaration de l’UNICEF sur les droits de l’Enfant, Eugene Fedorenko réalisait une satire douce au trait inimitable et dans laquelle gribouillis et caricatures font très bon ménage.

Si vous pensiez arriver enfin à la fin de ce jeu, détrompez-vous. La vérité c’est que le voyage vient tout juste de commencer. Parfaitement conscients du costume cliché que cette conclusion enfile, permettez-nous de friser l’incompétence une dernière fois tant il est facile de se reposer sur la bienséance des expressions toutes faites. Qui sait, on se retrouvera peut-être dans un an? 

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Poésie pour Al-Mutanabbi https://www.delitfrancais.com/2016/03/21/poesie-pour-al-mutanabbi/ https://www.delitfrancais.com/2016/03/21/poesie-pour-al-mutanabbi/#respond Tue, 22 Mar 2016 03:59:53 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=25183 La professeure Rula Jurdi prête ses mots à une esquisse brûlante du patrimoine irakien.

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Au creux de la rue Milton, par un humide mercredi 16 mars, le libraire Brendan King-Edwards  a accueilli une récitation de poèmes en hommage à la rue Al-Mutanabbi, à Bagdad. Entre les étagères de la boutique The Word, étudiants, auteurs et professeurs ont redonné vie à la plume de grands poètes, en mémoire de l’attentat qui a frappé les libraires et artistes d’Al-Mutanabbi le 5 mars 2007. Écrivaine, poétesse et professeure d’Histoire islamique à McGill, Rula Jurdi prend cette soirée-lecture comme point de départ vers de plus amples réflexions.


Le Délit: Comment est née l’idée d’une soirée poésie, sachant que les attentats ont eu lieu il y a près de dix ans?

Rula Jurdi: C’est mon collègue Prashant Keshavmurthy que nous devons remercier pour cette initiative, il a fait le lien avec le libraire Beau Beausoleil, éditeur de l’anthologie Al-Mutanabbi Street Starts Here parue en 2007. L’idée était de faire circuler ce recueil et de commémorer le bombardement de la rue des libraires de Bagdad, cette même année.

Prendre part à cet événement était une façon de réfléchir aux nombreuses tragédies qui ont touché les Irakiens, mais aussi, plus précisément, à la perte des lecteurs et livres qui en ont été victimes. Notre sentiment d’existence est attaché à des endroits précis, Al-Mutanabbi a façonné ce sentiment chez un grand nombre de Bagdadis, selon différents chemins de vie. Dans ses cafés, — notamment le Shabandar Café, détruit lors de l’explosion — les livres prenaient un autre vie, devenaient l’objet de discussions, débats publics ou simplement sources de distraction.

Les événements de 2007 sont toujours pertinents lorsque l’on pense au désastre que connait le patrimoine irakien: d’abord pillé en 2003 à la suite de l’invasion des États-Unis avant d’être ensuite détruit, sans mentionner les exécutions de centaines de poètes, écrivains, libraires, artistes et conservateurs de musées entre les mains de l’État Islamique et autres militants salafistes. Les agitations politiques et déplacements qui ont touché l’Irak et la Syrie durant cette décennie sont d’une magnitude comparable à une éruption volcanique.

En tant que poète et femme arabe ayant vécu la Guerre Civile du Liban (1975–1990) ainsi que l’invasion du Liban par l’État israélien, je vois ce genre d’événement un peu comme une thérapie. Même si je ne suis pas convaincue de leur impact politique.

«La poésie, je veux le croire, affecte les gens de façon inattendue»

LD: Dans quelle mesure est-ce que vous considérez la poésie (en comparaison avec d’autres modes d’expression), comme un moyen de toucher, d’exprimer l’inexprimable?

RJ: La poésie, je veux le croire – bien que je n’en sois pas sûre –  affecte les gens de façon inattendue. Elle permet une prise de risque, une compréhension ou sympathie envers celui que les médias d’actualité présentent souvent comme «l’autre». Ce soir-là, j’ai choisi de lire certains passages de Dead Trees par The Narcicyst ainsi que certains de mes poèmes extraits de mon recueil Like Layla or the Five Cities.

Il est vrai que je m’attache à ces moments magiques, lorsque je me trouve en train de lire et qu’une connexion se crée avec l’auditoire. Une larme, un rire ou une personne qui m’écrit pour m’expliquer son interprétation d’une imagerie. Ces moments me redonnent foi en l’idée que la poésie peut faire l’effet d’une métamorphose intérieure pour l’auditeur attentif.

L.D: Comment décrire l’importance de la rue Al-Mutanabbi pour les habitants de Bagdad?

R.J: Les Irakiens ne prennent pas le temps de se poser la question, c’est organique. Pour certains, c’était une ligne sur la carte de leur ville. Pour d’autres, c’est l’oxygène, l’espace de transmission d’idées nouvelles, le sentiment qu’ils sont entourés d’âmes familières. Mais après l’explosion, cette rue a pris un sens nouveau. Commémorer l’importance de cette rue, c’est insister sur la place de Bagdad dans l’histoire des grandes idées, grands poèmes, grandes musiques. C’est refuser d’être effacée de l’Histoire, en tant que ville du savoir, de la façon dont les humains ont été déplacés et éliminés par l’invasion américaine ainsi que les militants salafistes.

Mahaut Engérant

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Fenêtre sur Mackintosh https://www.delitfrancais.com/2016/02/23/fenetre-sur-mackintosh/ https://www.delitfrancais.com/2016/02/23/fenetre-sur-mackintosh/#respond Tue, 23 Feb 2016 05:08:38 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24992 Entre modernité et tradition, Facing up to Mackintosh retrace un face-à-face architectural.

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«Lavantage d’être un architecte, c’est de pouvoir marcher dans ses rêves.» Une poignée de minutes après l’ouverture du film, les paroles de l’architecte américain Harold E. Wagoner résonnent comme un préambule aux images qui se bousculent sur l’écran du Centre Canadien d’Architecture (CCA). Facing up to Mackintosh retrace l’histoire d’un défi: l’élaboration d’un nouveau voisin pour le bâtiment principal de l’école d’art de Glasgow, imaginé par l’architecte écossais Charles Ronnie Mackintosh à la fin du 19e siècle. C’est sur une période de trois ans que la caméra de Louise Lockwood a observé chaque étape de la naissance du Reid Building, sous l’œil exigeant de ce qui est considéré comme l’un des plus grands chefs‑d’œuvre de la carrière de Mackintosh.

Le défi est de taille et le recueil de témoignages que constitue ce documentaire, présenté en avant-première de la 34e édition du FIFA (Festival International du Film sur l’Art), ne nous laisse pas le bénéfice du doute. Professeurs d’arts, architectes et autres adeptes de structures ingénieuses vantent ces petits détails, calculs et dispositions qui font toute la complexité de l’édifice Mackintosh. «Il parvient à être brillamment inspirant sans que son esthétique ne se fasse imposante» souligne ainsi la professeur Muriel Gray.  L’architecte américain Steven Holl, chargé de la conception du nouvel habitacle, aime à comparer un bâtiment à un outil, un instrument, plutôt que quelque chose de statique. Pour l’agencement du Reid building, l’idée serait alors d’observer la façon dont la lumière naturelle traverse les vitres du Mackintosh pour la convertir en une nouvelle géométrie.

«Il y a de l’espoir dans l’honnête erreur»

Réduire trois années de travail en cinquante-huit minutes de film ne se fait évidemment pas sans abîme. Alors que l’on apprécie d’avoir accès à chaque étape de la construction, la vue du chantier – étape clé dont l’importance est souvent  survolée – il aurait été judicieux de mener une enquête sur l’acclimatation du bâtiment Reid dans le paysage urbain de la métropole écossaise. Seule la rue qui le sépare de son ancêtre Mackintosh nous est montrée, or il est fort possible que les formes quasi-cubiques de l’œuvre de l’architecte Steven Holl aient dérangé voire contredit certaines attentes esthétiques ou conceptions de ce que l’on entend par «harmonie».

Mahaut Engérant

Facing up to Mackintosh a tout de même le mérite de nous redonner conscience du nombre d’expériences sensorielles qu’apporte l’assemblage de matériaux dans un lieu précis. Car on ne se contente pas d’observer un bâtiment: on y marche, on respire, on rit, on dort, on apprend et il arrive même qu’on se perde entre quatre murs. Tâchons de ne pas oublier à quel point le lieu de vie façonne notre niveau de satisfaction envers tout ce qui nous entoure. Souvenons-nous que trop d’inventions, de transmissions de savoir, de recettes de cuisine n’auraient pas vu le jour sans une bonne dose de coups de marteaux bien étudiés. L’expérience du documentaire de Louise Lockwood et l’idée de bâtir en respectant le travail de nos prédécesseurs rejoint l’idée de l’architecte français Paul Chemetov: lire puis ensuite continuer ce qui a été créé à partir de chaque choix mené, «en re-puisant ce qu’il a apporté en son temps.»

«Il y a de l’espoir dans l’honnête erreur, nullement dans la perfection glaciale du simple styliste.» Il paraît que cette formule constituait la devise de Charles Ronnie Mackintosh. Elle semble appropriée pour clore cet article. S’il vous plaît, n’oubliez pas de fermer la porte en sortant. 

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Dead Obies en coulisses https://www.delitfrancais.com/2016/02/22/dead-obies-en-coulisses/ https://www.delitfrancais.com/2016/02/22/dead-obies-en-coulisses/#respond Tue, 23 Feb 2016 03:21:26 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24945 Le Délit a rencontré le groupe de post-rap Dead Obies, à l’occasion de la sortie de leur nouvel album, Gesamtkunstwerk.

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Dead Obies est un groupe de post-rap qui a acquis sa notoriété grâce aux dix-sept morceaux de Montréal $ud, sorti en 2013. Leur prochain album, Gesamkunstwerk, sera dans les bacs le 4 mars 2016 sous le label Bonsound. Le concept est original: au mois d’octobre, les rappeurs ont proposé trois sessions live, dont les enregistrements sont inclus dans l’album studio. Le Délit a rencontré quatre membres de Dead Obies: Yesmccan, Joe RCA, 20some et O.G.Bear, pour une discussion très… esthétique.

German Moreno

Le Délit (LD): Votre album s’intitule Gesamtkunstwerk: est-ce que vous faites une œuvre d’art totale, comme le veut ce concept allemand?

YesMccan: On élargit le concept du rap avec ça, on stretch les mots. Y’a une longue lignée dans la génétique du rap de bragadoccio du type «j’suis le meilleur, I got big car, I got big chain»… Nous on fait une œuvre d’art totale, c’est aussi humoristique: y’a clairement un ton «frondeur». On voulait enregistrer un album live, le retravailler et que toutes les facettes de la «marchandise de l’album» servent le discours.

LD: Lors des enregistrements live au Centre Phi en octobre dernier, le concert s’est ouvert sur la projection d’images du documentaire de Guy Debord La Société du Spectacle. Vous vous êtes inspirés de son travail?

YesMccan: La Société du Spectacle est une œuvre hautement poétique et hautement théorique. Guy Debord est vraiment un artiste et un théoricien. Des phrases nous ont guidés et inspirés pour l’album, c’était fort comme point de départ. On a beaucoup réfléchi, on avait peur que ça sonne prétentieux ou qu’on ait «pas le droit» de toucher à cette œuvre-là parce qu’on serait incapables d’y rendre justice. Puis le gros truc à propos du situationnisme c’est que si tu te réclames de ça c’est vraiment un mouvement hardcore, anti-capitaliste au maximum, anti-mythe populaire, c’est très revendicateur. Ça nous intéresse d’aller au-delà du mythe: la culture et les hautes théories sont autant pour le peuple que pour les universitaires ou l’élite.

Pis y’a des phrases comme: «Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux»: tu donnes ça à un artiste il te fait un album ou une peinture!

C’est d’autant plus facile parce que Guy Debord a écrit ça dans les années 1960, c’était super controversé. Mais c’est difficile en 2016 de le contredire, tout le monde peut faire l’expérience de la société du spectacle.

20some: C’est comme si ses théories s’étaient renforcées avec le temps, c’est pour ça qu’il a été réédité dans les années 1990. Lire le livre ou voir le documentaire, ça a été la bougie d’allumage pour en parler entre nous, dans nos mots. Ça a amorcé notre imaginaire collectif, comme un déclic, toutes les chansons qu’on avait prenaient place.

LD: On peut donc dire que vous avez «théorisé» votre esthétique?

YesMccan: Au début on avait le désir, purement esthétique, d’incorporer du live dans l’album, pour traduire l’énergie de nos performances. Puis on a avait entendu que pour Francis Ford Coppola, un artiste doit être capable de définir son œuvre en un mot. En lisant La Société du Spectacle, on avait notre sujet d’album.

LD: Sur vos pochettes d’album, on remarque souvent la présence de selfies, de caméras, ce qui entre bien dans le thème du spectacle…

YesMccan: On voulait renverser le focus du spectateur à l’artiste, que l’artiste aille vers le public. On allait dans la foule, l’un de nous a pris un cliché de Charles (20some, ndlr) dans la foule pendant qu’une fille se prenait en selfie avec lui, pis dans le cadre on voit la caméra qui capte l’ensemble du projet. C’était très évocateur.

LD: À ce propos, vous avez joué avec le groupe de jazz Kalmunity, vous prévoyez de jouer avec plus de musiciens acoustiques?

Joe RCA: Ben… j’ai pris des cours de trompette. (rires)

YesMccan: Certains d’entre nous sont fans de Kalmunity, on était même intimidés de leur demander de jouer avec nous. On va répéter l’expérience dans plein de concerts, donc c’était concluant.

20some: Y’a quelque chose dans la musique, dans la maîtrise de l’instrument qui est inatteignable dans le rap…

O.G. Bear: C’est l’opposé pour moi: j’aime la musique, mais dans le rap c’est la voix, le ton, ton personnage, qui font qu’un rappeur va se distinguer. C’est aussi nos différences qui nous font avancer, on est six à avoir des visions différentes, mais on est tous des mélomanes.

LD: Au niveau de l’écriture, ça se passe comment?

Joe RCA: Chacun écrit son texte comme toujours dans le rap. Parfois en studio y’a des idées qui viennent, chacun écrit son texte mais c’est un travail d’équipe.

LD: Vous vous mettez d’accord sur les thèmes?

Joe RCA: Pour cet album, ça part du beat, de la musique. On est souvent parti d’un refrain, donc celui qui a le refrain donne la trame pour tout le monde.

20some: On essaye de pas faire des thèmes clairs, y’a comme des couleurs ou une certaine émotion.

O.G. Bear: C’est très instinctif, y’a un thème mais parfois on travaille dedans sans même le savoir. On ne force pas notre sujet précisément.

LD: Vous connaissez la controverse de PNL (groupe de rap français qui utilise beaucoup de distorsions de voix, ndlr): vous aimez utiliser l’auto-tune et les distorsions de voix?

O.G. Bear: C’est vraiment un outil de travail. Si tu sais ce que tu fais, tu sais chanter, il n’y a pas de honte à l’utiliser.

Joe RCA: Il faut pas penser que l’auto-tune c’est fake, et que c’est plus ta voix. C’est un peu se mentir parce que quand t’enregistres de la musique par le micro, c’est déjà plus ta voix.

20some: Je suis sûr que la guitare électrique quand c’est sorti on a dit «Yo, c’est pas de la vraie guitare.» Le souci c’est d’être ouvert. C’est comme un chef cuisinier, t’aimes pas les épices mais whatever si c’est bon tu les intègres à ton craft.

LD: C’est quoi pour vous le «post-rap»?

YesMccan: Les premiers qui s’y sont mis, pour moi, c’est Alaclair Ensemble, leur sortie de presse c’était «on fait du post-rigodon», c’était carrément absurde. Les conventions sont un peu tombées avec les technologies qu’on connaît, ce que tu peux faire, ce que tu peux dire en amenant de la folie: c’est ce qu’on s’est donné comme ambition. On voulait avoir une étiquette différente des autres. Après, ce qu’on fait ça reste du rap, ça pourrait être une sous-branche de la musique. Method Man c’est du rap, M.I.A c’est déjà plus post-rap.

LD: Pour finir, qu’est-ce qui vous manque pour le futur?

YesMccan: De l’argent (rires).

Joe RCA: Faudrait qu’on sorte du Québec, on a un grand monde à conquérir.

20some: On a fait des dates en France. C’est la première fois qu’on s’est fait prendre au sérieux par des journalistes, là-bas on sentait que y’avait un professionnalisme par rapport aux rappeurs alors qu’ici, tu te fais un peu infantiliser quand tu fais du rap. Enfin moins maintenant, mais là-bas on était épatés par l’événement, on a eu deux pages dans Libération!

YesMccan: On aimerait beaucoup y retourner, mais ça coûte de l’argent. Pis on est en dehors du réseau des subventions au Canada parce qu’on répond pas aux critères des musiques francophones. On n’a pas assez de français pour être francophones mais on n’a pas assez d’anglais pour être anglophones. On tombe dans une zone grise. On trouvera d’autres façons!

Joe RCA: It is what it is!  

C-Deadobies
John Londono

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Les Quatre Cents Coups de minuit https://www.delitfrancais.com/2016/02/09/les-quatre-cents-coups-de-minuit/ https://www.delitfrancais.com/2016/02/09/les-quatre-cents-coups-de-minuit/#respond Tue, 09 Feb 2016 21:16:45 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24782 Les aventures d’Antoine Doinel sur les écrans de la Cinémathèque québécoise.

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Revoir les Quatre Cents Coups de François Truffaut, c’est un petit peu comme embarquer dans un tour en montgolfière. Une, deux, trois fois: le rabâchage importe peu, rien ne semble altérer l’effet d’apesanteur que son visionnage provoque, depuis sa sortie en 1959. Le Paris d’antan, Jean-Pierre Léaud dans le rôle d’Antoine Doinel, sa course effrénée contre la sévérité (tant à l’école qu’à la maison), les airs du compositeur Jacques Constantin… Ce n’est pas un mythe: il existe vraiment des détails dont on ne se lasse pas.

Pour les soixante ans de la revue de cinéma Séquences, le rédacteur Pierre Pageau prend le micro juste avant la projection du film, que l’on décrit souvent comme l’un des chefs d’œuvre de la Nouvelle Vague. On nous apprend que, bien que le bijou de Truffaut ait passé la frontière québécoise sans souci, il a vu certaines de ses scènes rayées de la bobine après sa diffusion dans des couvents et autres écoles puritaines. C’est cette version légèrement coupée que la Cinémathèque nous dévoile en ce 3 février 2016. Comme si nous étions au beau milieu des années 1960 et que la seule vue des premières cigarettes de deux garnements relevait du sacrilège.

«C’est indispensable, mais on ne sait pas exactement à quoi.»

«Je n’aurais pas pu parler ni de chef d’œuvre ni de maîtrise parce que je vois trop ce qu’il y a d’expérimental et de balbutiant.» Le cinéaste français François Truffaut semble garder les pieds sur terre lorsqu’on lui demande de simuler l’autocritique, peu après la sortie de son premier long métrage. Maintenant que Les Quatre Cents Coups tient de la légende cinématographique, il convient de se demander ce que nous, novices du 7e art, pouvons apporter à la montagne d’analyses, de critiques et louanges dont il fut l’objet. Car la question se pose: comprendre pourquoi — plus de soixante ans plus tard —, la mise en scène des aventures d’Antoine Doinel parvient encore à émouvoir.

Mahaut Engérant

Et là, tout à coup, un blocage se forme. Aucun motif ne semble être à la hauteur pour élucider le caractère culte des Les Quatre Cents Coups. C’est peut-être le jeu de Jean-Pierre Léaud et l’assurance avec laquelle il balance à son maître d’école que sa mère vient de mourir (un nouveau mensonge pour excuser son absence). Le côté autobiographique, car l’on sait que Truffaut se base presque toujours sur des expériences de la vie réelle. Ou alors les plans de caméra, plus larges lorsqu’Antoine goûte à la liberté, plus étriqués au fur et à mesure que sa situation s’aggrave. À moins que ce ne soit le décor parisien — des quais de Seine à la place Pigalle en passant par le Sacré Cœur — qui retrouve sa virginité car il n’est ici que la toile de fond d’un petit garçon qui se débat tant bien que mal avec la vie.

Et il y aurait encore tant à dire. Surtout que l’on a omis l’humour: un humour solide qui ne vieillit pas; en témoigne cette fameuse ligne, lorsqu’Antoine quémande de l’argent et que son père répond: «Si tu me demandes 1 000 francs c’est que t’en espères 500, donc tu en as besoin de 300. Tiens, voilà 100 balles.» Voilà, encore une raison qui nous permet de justifier pourquoi, toi lecteur, tu devrais visionner Les Quatre Cents Coups. Et si tu n’es pas convaincu, au lieu de maudire un manque de rhétorique, consolons-nous en racontant que lorsqu’on lui demandait l’intérêt du cinéma, Truffaut avait un jour répondu: «C’est la définition de Jean Cocteau pour la poésie: c’est indispensable mais on ne sait pas exactement à quoi.» 

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Trois heures quarante-cinq https://www.delitfrancais.com/2016/01/26/trois-heures-quarante-cinq/ https://www.delitfrancais.com/2016/01/26/trois-heures-quarante-cinq/#respond Tue, 26 Jan 2016 20:44:30 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24559 Rétrospective sur le cinéma de Chantal Akerman.

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Mesdames et messieurs, le défi de cet article sera de ne pas faire l’éloge aveugle de Jeanne Dielman, 23 quai du commerce, 1080 Bruxelles simplement parce que l’on sait que sa réalisatrice Chantal Akerman s’est enlevée la vie le 5 octobre dernier. Avec tout le respect que l’on doit à cette cinéaste belge post-Nouvelle Vague — pour qui la Cinémathèque Québécoise a organisé une rétrospective jusqu’au 22 janvier —, restons professionnels et replions nos mouchoirs.

Jeanne Dielman, en bref, c’est l’histoire d’une femme au foyer qui se prostitue, incarnée par la superbe Delphine Seyrig. En termes descriptifs, la liste est longue pour ce «long» long-métrage tourné en 1975. Des plans fixes, des jeux de lumières, des plans fixes, des dialogues rares (parfois même muets), encore des plans fixes, une esthétique irréprochable et enfin l’impression globale que quelque chose va ou doit se passer. On a beau prétendre au titre de cinéphile, face à trois heures quarante-cinq de lente déchéance dans un quasi huis-clos, il y a de quoi trouver le temps long.

Collection de la cinémathèque québécoise

Mais ne nous limitons pas à la description: osons l’analyse subjective, au péril de toute crédibilité. Car trois heures quarante-cinq de passivité physique c’est presque autant de bouillonnement cérébral. On ne comptera pas le nombre de fois où l’on a disséqué l’écran en se grattant la tête. Et ce n’est pas tous les jours que l’on a l’occasion de ressentir la lenteur du quotidien de façon si intense. Ayons la sagesse d’admettre que trois heures quarante-cinq d’observation c’est aussi un exercice de patience, une invitation au respect.

Non, Jeanne Dielman ne se transformera pas en citrouille, aucun acte surnaturel ne viendra briser la routine qui l’asservit, sinon un oubli. Le deuxième jour, elle fait trop cuire ses pommes de terre, et là: ce sont tous ses repères qui perdent le nord. Le tout, dans une gravité qui effacerait presque le ridicule d’un tel incident: quoi que l’on dise, Miss Akerman avait de l’humour.

À l’inverse d’un bon vieux film de Godard, il n’y a pas de voix-off qui nous perd dans des réflexions aussi délicieuses que perturbantes et en 1974, Chantal Akerman confiait à l’acteur Sami Frey que la psychologie des personnages ne l’intéressait pas. Finalement, Jeanne Dielman c’est aussi la mise en scène de choses anodines, à l’apparence peu profondes mais qu’il fallait oser porter à l’écran. La beauté des images au service de la lassitude — et vice-versa —, c’est tout de même un bel hommage à la fragilité humaine. Donc malgré l’introduction de cet article: merci Chantal.

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Fable moderne https://www.delitfrancais.com/2016/01/26/fable-moderne/ https://www.delitfrancais.com/2016/01/26/fable-moderne/#respond Tue, 26 Jan 2016 20:21:36 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24553 Mustang: vent de fraîcheur au Cinéma du Parc.

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«Vos gros vêtements couleur de merde font de vous l’émissaire de la morale?»

Cette voix, c’était Lale, cadette d’une famille de cinq sœurs. Elle vient de clouer le bec à une voisine aux mœurs chatouilleuses dont les coups de langue marquent le début de l’intrigue de Mustang, premier film de Deniz Gamze Ergüven.

Cohen Media Group

Tout commençait pourtant tranquillement, par une matinée d’été dans le village turc d’Inébolu au bord de la Mer Noire. Mais voilà qu’on accuse les jeunes filles de «se frotter aux nuques des garçons», sous prétexte qu’elles se sont amusées à monter sur leurs épaules. Il n’en faudra pas plus pour que Lale, Nur, Ece, Sonay et Selma se retrouvent cloîtrées chez elles, sous la tutelle d’un oncle impérieux et d’une grand-mère dépassée. Comme si cet acte innocent représentait la cloche d’alarme qui sonne la fin de leur liberté. Ces filles ont grandi, il faut à tout prix les transformer en épouses dignes de ce nom.

Sans aller jusqu’à caractériser son film de «féministe», la réalisatrice franco-turque Deniz Gamze Ergüven répète à «toute l’Europe» que Mustang pointe du doigt la sexualisation à outrance à laquelle les femmes turques sont sujettes. «Il y a quelque chose de contestataire dans le film mais de manière assez irréfléchie». Car même si chacune des scènes sont inspirées de faits réels, les réactions des personnages  penchent plus vers le conte que le documentaire.

L’alternance entre gravité et légèreté, lenteur et soubresauts détourne la lutte tradition vs modernité et évite une impression de déjà-vu. Car si le blâme du phallocentrisme est un motif récurrent, la spontanéité des cinq héroïnes alloue à ce procès une fraîcheur de nouveau-né. Quand peu à peu, la situation se retourne et qu’il est temps d’agir, l’enchaînement des plans fait corps avec la prise de conscience des personnages. Il nous faut très peu de temps pour comprendre que la syntaxe de Mustang vient tout juste de valider son brevet de nouvelle merveille du cinéma. 

Cohen Media Group

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«Le laboratoire des curiosités» https://www.delitfrancais.com/2016/01/19/le-laboratoire-des-curiosites/ https://www.delitfrancais.com/2016/01/19/le-laboratoire-des-curiosites/#respond Tue, 19 Jan 2016 19:33:25 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24394 Mêler art et médiation sociale: le dessein de la metteuse en scène Michelle Parent.

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Diplômée de l’École supérieure de théâtre de l’UQÀM et après des débuts plutôt classiques dans le milieu artistique, la comédienne Michelle Parent décide de porter le théâtre à des groupes plus ou moins éloignés des sentiers de la «bienséance». De fil en aiguille naît Pirata Théâtre, une compagnie de non-acteurs rencontrés dans des foyers pour femmes en difficultés, centres de désintoxication… D’après un texte signé Olivier Sylvestre, leur dernière pièce Les Bienheureux occupera les planches du théâtre Aux Écuries du 19 au 23 janvier 2016.

C’est dans un café aux sols boisés, au beau milieu du quartier Hochelaga que Michelle Parent accepte de nous faire part de son parcours et de la mise en place des «Bienheureux», le fruit d’un an et demi de travail. En entrevue avec Le Délit, le cheminement qui l’a conduite à travailler avec celles et ceux qu’elle surnomme les «pirates» semble couler de source.


Le Délit (LD): Pour commencer, qu’est-ce qui t’a donné l’envie d’aller chercher une autre façon de faire du théâtre?

Michelle Parent (MP): Je faisais des spectacles, j’allais voir des spectacles et je me rendais compte qu’autour de moi dans la salle, les spectateurs étaient surtout des «gens de théâtre» qui venaient voir leurs «amis de théâtre», des initiés. Alors je me disais: à quoi ça sert si on reste qu’entre nous les artistes, qu’on se trouve bons et beaux… Donc, je me suis mise à chercher des gens qui seraient le plus loin possible du milieu. Qui n’ont peut-être même jamais vu de théâtre. J’ai commencé à donner des ateliers dans un centre pour femmes en difficultés en 2009

Ça a changé ma façon de voir l’art car leur présence m’a énormément touchée. Non pas leurs problématiques comme telles mais la façon qu’elles ont de réfléchir, d’oser se mettre en avant. Parce que c’est un acte hyper courageux de faire un exercice de théâtre quand tu n’en as jamais fait. J’ai trouvé ça beau et théâtral de voir des gens se dépasser, puis j’ai eu le goût de faire de la mise en scène à cause de ça. Fait que j’aime ça: créer un espace pour rassembler un échantillonnage de la société qui ne se serait pas rencontré autrement. Pour moi c’est un peu le laboratoire de ma curiosité: si je mets telle personne avec telle personne, qu’est-ce qu’ils se disent, qu’est-ce que ça donne? Et ça, ça se ressent je pense dans les spectacles. Fait que c’est parti de là!

LD: Tu as ensuite fondé ta propre compagnie: Pirata Théâtre.

MP: Oui, pour faire mon premier spectacle La Maison, je me suis dit qu’il fallait que je démarre une compagnie. C’est là que j’ai trouvé le nom «Pirata théâtre» que je trouvais très poétique à l’époque (rires). Maintenant, parfois, je suis un peu gênée mais ça faisait beaucoup de sens pour moi et ça le fait encore parce que tu sais, ces femmes-là de la rue me faisaient penser à des pirates. Elles ont un côté super rebelle qui me plaisait. Et puis aussi, j’ai un petit peu l’impression de pirater l’art avec le vrai, et de pirater le vrai avec de l’art.

LD: C’est vrai qu’il y a un petit côté aventurier dans ta démarche…

MP: Oui exactement parce que pour chaque projet tu pars à l’aventure. Ça change en cours de route, même là on est encore en train de changer des petits trucs, on a des désistements de dernière minute… Ça demande une mise en scène extrêmement malléable parce que la plupart des projets incluent des gens sujets à une dépendance. Mais cette contrainte est hyper stimulante pour moi.

J’ai donc fait sept projets à partir de ça, après les femmes je suis allée voir les toxicomanes dans le cadre de l’association Cactus Montréal, un organisme sur Sainte Catherine, vraiment très proche du milieu de la rue. On leur propose des activités qui leur permettent de faire autre chose que s’entendre dire qu’il faut qu’ils aillent en cure de désintox… Il y a beaucoup de gens qui passent dans mon processus de travail mais il y a aussi des membres du spectacle des «Bienheureux» qui sont là depuis trois ans!

LD: Peu à peu tu as alors ajouté une dimension sociale à ton travail?

MP: En fait, l’art c’est vraiment un véhicule différent. Quand tu arrives et que tu as le «chapeau d’intervenant» en face d’une personne qui a une problématique, le côté social est évident… Tandis que moi je m’en fichais de leurs difficulté, on ne fait pas du théâtre documentaire non plus. Dans mes spectacles, je ne parle pas de qui a fait de la prostitution, je ne le sais pas et ne veux même pas le savoir. Et ça facilite vraiment les choses parce qu’on est plus dans un rapport d’égal à égal.

LD: Dirais-tu que ton but est plutôt d’intégrer des marges de la société à l’art ou carrément d’élargir la définition même de l’art ?

MP: Dans tous les cas, pour moi, prendre la décision de monter un spectacle ou de faire un film – même si c’est une comédie – ça parle de nous. Même un blockbuster, même Superman ça parle de nous. J’ai de la misère à concevoir que quelqu’un me dise: «Non, moi je fais du pur divertissement». Donc c’est vraiment les deux. Pour moi, amener du social dans l’art, c’est ce qui fait que ça fait du sens. C’est un apport beaucoup plus global et je pense que j’aurais arrêté si je n’avais pas trouvé ça.

LD: Si tu avais dû rester dans cette idée «d’art pour l’art»…

MP: Oui, je trouvais que c’était comme vide un peu. C’est le fun, hein, de faire du théâtre mais entre nous, de «virtuose» à «virtuose», ça devient super hermétique. Pis il y a aussi quelque chose qui me parle dans le fait d’amener des non-professionnels au théâtre ou dans une œuvre d’art. Ce que je trouve très beau moi dans cette «théâtralisation» de la présence, c’est qu’on est tellement dans un monde où on applaudit les virtuoses que ce que je trouve hyper touchant c’est la fragilité mise en scène. Mes gens, ils ne jouent pas de personnages, ils n’ont pas à construire quelque chose, ils sont juste là pis je les mets dans une arène de jeux et j’observe comment ça les transforme pour vrai. C’est un peu comme pour dire que toi aussi tu as le droit d’être présente, même si tu bégayes ou autre… Je trouve ça beau.

LD: Vous avez produit la pièce vous-même. Comment vous avez trouvé le financement?

MP: Euh, ben, c’est pas facile (rires). Par contre, le côté social fait que les centres avec lesquels je travaille nous aident à financer une partie du projet. Puis, on répète au centre même donc ça c’est quand même un apport de financement. Artistiquement c’est super parce qu’on est dans un grand lieu qui est quand même inspirant, l’endroit où se font les réunions Alcooliques Anonymes puis tout ça. On utilise même les chaises de la salle pour notre spectacle. Si j’avais pu j’aurais amené les néons (rires). J’ai quand même reçu une base du Conseil des arts de Montréal et du Conseil des arts du Canada qui a un programme qui s’appelle «Théâtre et communauté». Puis mon partenaire, Les Écuries, nous a soutenus. On fait ce qu’on peut avec ce qu’on a, mais c’est quand même pas évident.

LD: Et est-ce que tu as eu l’impression de voir une évolution au niveau du public et de la visibilité de tes spectacles entre le premier et maintenant ? Le public se diversifie peu à peu ?

MP: L’évolution que je vois c’est à quel point ce genre de projets là est plus populaire. Je ne dis pas que je suis une pionnière hein, mais quand j’ai commencé en 2008, il y avait peu de gens qui faisaient ça. On parlait pas tant encore de médiation culturelle alors que maintenant c’est un grand mot, il y a plein de programmes et tout ça. Il y a comme un élan que je trouve chouette. 

LD: Et pour finir, quelques détails sur la mise en scène des Bienheureux?

MP: Pour moi c’est vraiment un genre d’amalgame, tout d’abord dans la distribution: il y a des acteurs, des non-acteurs, des gens de plusieurs souches de la société, plusieurs âges. C’est aussi un mélange des genres et aussi des textes: des vox pops, des passages d’improvisations qu’on a retranscrits… Tout ça a été conçu pour créer la démonstration des douze étapes pour atteindre le high, l’euphorie ultime. Ce qu’on ne sait pas trop comment nommer parce que c’est intangible, ce qui est quand même proche de, disons, un high par une substance, high parce que tu as fait du yoga… (rires). Parce qu’on est quand même bombardés de l’idée qu’il faut être heureux. Que ça soit dans la psycho-pop, dans les affaires de style de vie, «art» de vie… Je ne dis pas que c’est mal, si ça te fait du bien c’est correct. C’est juste qu’il y a comme un manque quand tu ne l’as pas et que tu es triste et malheureux «de ne pas être heureux», tu vois? C’est pour ça que Les Bienheureux prend un peu la forme d’une réunion d’Alcooliques Anonymes, sauf que la recherche n’est pas la sobriété mais bien le contraire, sauf que la réunion ne se passe pas comme prévu et c’est là que le jeu se passe… 

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Au-delà des pipelines https://www.delitfrancais.com/2015/11/28/au-dela-des-pipelines/ https://www.delitfrancais.com/2015/11/28/au-dela-des-pipelines/#respond Sun, 29 Nov 2015 01:34:09 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24315 Pipelines, pouvoir et démocratie: réflexion sur les rapports de pouvoir.

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Juger de la qualité d’un documentaire écologique n’est pas chose facile. Les partisans de l’école du pessimisme voudraient qu’ils soient victimes d’un rituel composé de trois étapes; un: visionnement des images, deux: indignation face à l’irresponsabilité de l’Homme – assaisonnée d’un léger sentiment de culpabilité – et trois: lassitude face aux enjeux environnementaux. Dans le cadre des RIDM (Rencontres Internationales du Documentaire de Montréal), le réalisateur Olivier D. Asselin met le contenu de Pipelines, pouvoir et démocratie au défi de ce protocole qui, avouons-le, est bien trop simpliste pour échapper au débat.

Sur une période de deux ans, M. Asselin a suivi les membres de groupes écologistes québécois qui ne cessent de lutter depuis que l’entreprise énergétique TransCanada a annoncé son dernier projet: la construction d’un oléoduc de 4 500 km allant de l’Alberta à l’Est du Canada. Après que le gouvernement de Barack Obama a empêché ce pipeline de franchir le sol américain, la compagnie pétrolière a trouvé une nouvelle cible: les terres du Québec.

Luce Engérant

Débats, spectacles de sensibilisation, historique de projets d’oléoducs, entrevues: les sources sont variées pour retracer le combat de Québécois qui refusent de mêler leur province à l’industrie des sables bitumineux. Connu pour son extraction intensive de l’une des énergies fossiles les plus polluantes de la planète, ce mode d’exploitation a déjà souillé une bonne partie de territoires comme la Louisiane ou les alentours du Golfe du Mexique.

Pour illustrer certaines actions des lobbys anti énergies «sales», Olivier Asselin nous place face à une audience publique de l’Office National de l’Énergie (ONÉ) durant laquelle des militants se lèvent tour à tour et font entendre leur voix. Ils lisent des témoignages — préparés à l’avance — de victimes de dégâts environnementaux. À chaque fois qu’une de ces interventions est interrompue par un agent de sécurité, un autre militant prend le relais, ce qui crée une cascade de témoignages accablants. 

Au-delà de la question environnementale, ce sont les rapports de pouvoir qu’explore Pipelines, pouvoir et démocratie.

Au-delà de la question environnementale, ce sont les rapports de pouvoir qu’explore Pipelines, pouvoir et démocratie. Différents bords du débat sont étudiés: Daniel Breton, alors député à l’Assemblée nationale du Québec, semble perdre espoir alors que la lutte se complique. Il annonce qu’il se retire de la vie politique. Cet exemple permet de mesurer un des problèmes posé par les images d’Asselin: le déséquilibre flagrant entre le pouvoir des militants et l’ampleur des enjeux dont il est question. On reprend alors conscience que la prise de pouvoir ne s’équilibre pas naturellement: certains ont toujours dû se battre plus que d’autres. Non, ces constats ne sont pas nouveaux. Cela n’empêche qu’ils se doivent d’être les serviteurs d’une quête de solution, une quête qui durera aussi longtemps qu’il le faut.

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«Le jargon du pouvoir» https://www.delitfrancais.com/2015/11/28/le-jargon-du-pouvoir/ https://www.delitfrancais.com/2015/11/28/le-jargon-du-pouvoir/#comments Sun, 29 Nov 2015 00:46:26 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24281 Bernard Maris démystifie l’opacité de l’économie.

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«La force de l’économie c’est qu’elle arrive comme une neutralité» déclare Bernard Maris au cours d’une entrevue avec le cinéaste québécois Richard Brouillette. Assassiné le 7 janvier dernier lors de l’attentat contre le journal satirique français Charlie Hebdo, l’analyste économique alors surnommé «Oncle Bernard» avait accepté de prêter un peu de son cynisme à une anti-leçon d’économie au cours de l’année 2000.

À l’assaut de l’inflation

Face à l’objectif de Brouillette, et non sans pédagogie, il détraque tour à tour des concepts économiques souvent reçus comme des évidences et conteste le caractère scientifique que l’on accole à l’économie. Comme si elle constituait un discours neutre qui ne dicte ni le bien ni le mal. En imitant le ton que prennent les tenants de cette croyance, il affirme: «il est évident qu’il est normal de faire pression sur les salaires pour qu’il n’y ait pas d’inflation. Il est évident qu’il ne faut pas d’inflation.» Et puis il condamne la montée des inégalités et la misère que l’absence d’inflation a entraînée depuis la fin des Trente Glorieuses. «Plus tu es riche dans la vie, plus tu es créditeur. Plus tu es pauvre, plus tu es débiteur.» Ainsi, l’absence d’inflation favorise les créditeurs, ceux qui ont du patrimoine. Le contrôle de la hausse des prix aurait donc permis l’émergence d’une «caste de rentiers» dont le pouvoir ne cesse de grandir.

Luce Engérant

Le commerce prédateur

Contrairement aux idées reçues, Oncle Bernard estime que le commerce ne s’est jamais développé pacifiquement. «Ca ne s’est jamais passé comme ça. Il s’est passé exactement l’inverse: d’abord le commerce international avec un phénomène de prédation, et ensuite la pacification.» En prenant l’exemple de la colonisation pour appuyer ses propos, il conclut: «je suis profondément convaincu que c’est toujours le militaire qui tire les dépenses des économies.» L’économie serait donc inéluctablement basée sur un rapport de force et fondée sur l’inégalité: nos idéaux de justice sociale en prennent un sacré coup.

«Le marché du travail ça ne veut rien dire. Qu’est-ce que je suis en face de monsieur Bill Gates? Je choisis mon patron comme mon patron me choisit? La rigolade.» Son sens de l’humour allège la franchise de ses propos, même lorsqu’il explique que le maintien des inégalités est jugé indispensable par certains économistes. Ces dernières fonctionneraient comme un «moteur» pour les salariés qui, dans une société égalitaire, n’auraient aucune raison de se lever pour travailler. Oncle Bernard est persuadé que la loi, la norme, libèrent car «la loi permet de supprimer le privilège.» Ainsi les grands patrons et autres «privilégiés» de l’économie de marché cherchent systématiquement à éviter l’implantation de lois publiques telles que le salaire minimum, les allocations chômage…

«Je choisis mon patron comme mon patron me choisit? La rigolade.»

Concernant l’opacité des marchés financiers, il semblerait que l’on soit en train de nager dans une «économie du risque». Une des caractéristiques de l’économie capitaliste est que la monnaie n’est plus contrôlée. Le risque est entretenu pour créer un système de contrats d’assurance qui vise à couvrir les risques des transactions boursières mais fournit surtout un bon outil de spéculation. «Le risque est systématiquement entretenu et systématiquement ‘‘marchandisé’’». Tiens tiens, bizarre qu’une bonne grosse crise financière survienne régulièrement pour désacraliser les fondations instables de ces marchés.

Mais tant que l’économie capitaliste apparaîtra comme vérité absolue et indéniable, il y a peu de chances que la sphère financière soit remise à sa place, c’est-à-dire au servie de l’économie. «Le  but de l’économie c’est que ça reste compliqué, incompréhensible.» Oncle Bernard compare même le langage économique au médecin du Malade imaginaire de Molière. «Il disait des conneries mais il les disait en latin donc personne ne pouvait comprendre. L’économie c’est pareil. Les gens disent des conneries mais les disent en maths, en technique ou statistique. […] Le jargon du pouvoir.»

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Le théâtre du réel https://www.delitfrancais.com/2015/11/17/le-theatre-du-reel/ https://www.delitfrancais.com/2015/11/17/le-theatre-du-reel/#respond Tue, 17 Nov 2015 17:40:48 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=24168 Retour sur les Rencontres Internationales des Documentaires de Montréal.

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Train de vie

C’est un projet particulier qui trottait dans la tête du réalisateur Albert Maysles depuis les années 1960. Le cinéaste humaniste est décédé à 88 ans, en mars dernier, alors que son film venait d’être assemblé. Il voulait faire un documentaire sur les passagers des trains de longue distance. Co-réalisé par Lynn Ture, David Usui, Nelson Walker et Ben Wu, In Transit a alors été tourné sur la ligne Chicago-Seattle, un trajet de trois jours à travers plaines et montagnes, passant aussi par des exploitations pétrolières.

Présent à la projection, David Usui explique que dix personnes étaient présentes dans le train pour filmer et discuter avec les passagers. Le résultat, c’est une trentaine de personnages qui se livrent devant la caméra et racontent leurs vies parfois très compliquées. Quand on est dans un train pendant de si longues heures, «il y a un espace social, le temps se ralentit et les gens ont une sorte d’introspection en étant assis, ils regardent par la fenêtre et se demandent où ils en sont.» Le voyage est l’occasion d’une réflexion sur sa vie, mais aussi de partager des idées, des craintes et des pensées avec d’autres passagers. Tout cela en l’absence de complexes car ce sont des relations qui peuvent être éphémères, si on le veut. 

D’après son collègue David Usui, Albert Maysles a une capacité impressionnante à se connecter avec les gens, ce qui a permis d’établir de la confiance entre l’équipe de tournage et les passagers. Ils ont fini par obtenir quatre cents heures de tournage enregistrées, qu’il a ensuite fallu trier. Ce sont les récits des drames et des espoirs des américains moyens que les réalisateurs ont choisi de montrer.

In transit est un documentaire humaniste touchant qui nous transporte. En passant une heure devant le film, on a véritablement l’impression d’être dans le train, au beau milieu de l’Amérique du Nord. ‑Par Amandine Hamon

Courtoisie RIDM & Luce Engérant

Ne tirez pas sur Tim Horton

«Tout conflit est basé sur la tromperie»: c’est par cette citation du général chinois Sun Tzu datant du VIe siècle avant J.-C, que démarre Bring me the head of Tim Horton, un court-métrage loufoque signé Guy Maddin, Evan et Galen Johnson.

Au départ, l’idée était de filmer les coulisses du tournage de la dernière superproduction du réalisateur Paul Gross: une épopée remplie de soldats canadiens qui se retrouvent pris au piège au beau milieu de l’Afghanistan. Mais les trois larbins que sont Guy, Evan et Galen réalisent bien vite qu’ils ne pourront pas prendre le montage de ce documentaire promotionnel tout à fait au sérieux.

Le désert de Jordanie où les acteurs-soldats simulent une guerre contre les talibans afghans prend alors une toute autre tournure, à coups d’effets psychédéliques. On se retrouve face à des combats sur fond de musique de jazz, des filtres de couleurs primaires, des bruitages de jeux vidéo et même le gros plan d’une poule qui se promène au milieu de ce bazar.

Allongé dans le sable pour ne pas perturber les caméras du tournage, Guy Maddin se livre à des réflexions sur la vie, la mort et l’art: «Une palette de couleur, c’est une forme de poésie». Du sarcasme à la sottise, en passant par le carrément ridicule, Bring me back the head of Tim Horton déconstruit de façon un peu aléatoire les codes d’un genre de film peu enclin à la satire. ‑Par Céline Fabre.

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Courtoisie RIDM & Luce Engérant

Champ de racaille

Le concept du «beau» retourne sa casquette au fur et à mesure que s’écoulent les images du documentaire Field Niggas. Alors qu’en 1963, Malcolm X établissait une distinction entre les esclaves des plantations («field negroes»,) et les esclaves mieux nourris et logés («house negroes»), le photographe et cinéaste Khalik Allah donne aujourd’hui un nouveau visage aux «esclaves des temps modernes».  Quarante ans plus tard, il arpente les rues de Harlem, ce district new-yorkais où la précarité ne prend jamais de vacances  – pas même pendant les nuits pluvieuses de l’été 2014, que les cinquante-neuf minutes du film capturent.

Le coin de la 125e rue et de l’avenue Lexington devient alors la scène d’un théâtre nocturne. Les sans-abris et trafiquants qui bordent ses trottoirs deviennent ses acteurs et ne font plus faire seulement partie intégrante du macadam. Assis par terre, un vieillard fixe l’objectif. Il explique qu’il porte toujours son bracelet de prisonnier, en souvenir. Un peu plus loin, une jeune fille récite un poème pendant que passe un bus de «house negroes» qui s’apprêtent à retrouver leur maison. Comme pour marquer une rupture entre nos a priori sur ces créatures de la nuit et le cours de leur pensée, les témoignages recueillis par Khalak Allah ne sont jamais livrés au spectateur directement. Leurs voix flottent au-dessus de gros plans à l’esthétique presque surréaliste tant les effets de flou nous transportent dans une autre dimension.

«À ton avis, qu’est-ce qu’il nous arrive quand on meurt?» demande le cinéaste à une femme qui se tient sur un terre-plein au milieu des voitures. Les nuages de fumée de cigarette sont omniprésents et à leur volupté naturelle s’ajoute une lenteur artificielle. «Je pense que c’est comme si l’on était encore présent, mais on n’est pas physiquement là». Nuages de cigarettes, ou plutôt de K2, drogue qu’ils expliquent avoir substitué à l’herbe car il paraît qu’on la dépiste moins facilement.

Des couleurs saturées, la noirceur de la nuit qui se mêle à l’intensité de ces visages: comme il est vrai que la beauté réside dans l’œil de celui qui la regarde. À la fin de la séance, il semblerait que celle que Khalik Allah donne à ces street negroes  ne soit pas tombée dans celui d’un malvoyant. ‑Par Céline Fabre

Courtoisie RIDM & Luce Engérant

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Contourner l’évidence https://www.delitfrancais.com/2015/11/03/contourner-levidence/ https://www.delitfrancais.com/2015/11/03/contourner-levidence/#respond Tue, 03 Nov 2015 17:37:11 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=23914 Remise en question du rôle de l’architecte sous les toits du CCA.

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Le silence règne dans le Centre Canadien d’Architecture (CCA) en ce samedi 31 octobre. L’avantage lorsqu’on décide de s’y rendre soixante minutes avant l’heure de fermeture, c’est que l’on croise plus de vigiles que de visiteurs. On peut alors profiter seul, ou presque, du voyage à travers l’espace et le temps qu’offrent les galeries «L’architecte, autrement», organisées par la conservatrice en chef du CCA Giovanna Borasi.

«Cette nouvelle exposition présente l’architecture comme allant au-delà de la nécessité de construire – il s’agit de l’architecture comme mode de production d’idées. Ces idées peuvent contribuer à changer le monde.» Peut-être que le directeur du CCA, Mirko Zardini, exagère dans sa présentation de l’exposition. Peut-être pas. Il semblerait qu’il soit à nous, humbles visiteurs, d’en juger.

Détail mural de l’exposition « L’architecte, autrement » au CCA. Céline Fabre

Hors des sentiers battus

Il est clair dès le départ – et la variété du contenu le confirmera – que «L’architecte, autrement» cherche à repousser le sens conventionnel que l’on accole parfois à cette profession. Comme pour réfuter l’idée que l’architecture doit être réduite à une «industrie», nous voilà plongés à travers 23 cas inédits qui ont façonné la pratique architecturale de 1960 à nos jours. L’agencement de l’exposition est tel qu’il nous est permis de naviguer entre les pièces, pour s’imprégner de fresques, archives, projections et maquettes d’un labyrinthe créatif qui mêle les travaux architecturaux à de bien vastes problématiques. Un présentoir de lettres retrace, par discussion épistolaire, l’évolution de groupes de pensées tels que le laboratoire italien ILAUD (Laboratoire International d’Architecture et de Design Urbaniste), fondé en 1973. Les cinq initiales du groupe surplombent un mur où l’on peut lire: «Pourquoi un laboratoire? Car nous n’avons pas besoin d’une école d’architecture institutionnelle de plus». Une citation radicale qui illustre plutôt clairement leur refus de la rigidité de l’enseignement architectural des années 1970.

On entre alors dans un monde dont on n’aurait pas soupçonné l’existence: l’envers du décor d’un système, d’un ensemble d’institutions aux airs impénétrables. La thématique «Un rôle inexploré» fait le portrait d’architectes qui se mêlent aux danseurs, détectives, sociologues et se concentrent sur des enjeux d’échelle humaine. Sur un fil tout aussi créatif, en 1978, le groupe bruxellois ARAU (Atelier de Recherche et d’Actions Urbaines) met sur pied un spectacle comique-critique où les musiciens se cachaient sous des chapeaux en forme de gratte-ciels. Tapés à la machine, les archives du membre Maurice Culot expliquent que le but est la conservation d’une culture urbaine ainsi que la lutte contre les spéculateurs en «proposant une vision alternative à la leur».

Exposition « L’architecte, autrement » au CCA. Céline Fabre

Tête sur les épaules

Plutôt que de nous placer face à des maquettes sans queue ni tête, l’originalité de cette exposition réside dans son absence de matériel prévisible. Elle réussit à nous montrer ce que l’architecture peut être, ou ce qu’elle est déjà si l’on se donne la peine de le reconnaître. Car il est facile de se perdre dans des discours «prout-prout» sur «l’organisation de l’espace physique» et autres détours éloquents qui nous feraient presque oublier le caractère primaire de cet art.

Tracée noir sur blanc, une boîte à outil géante accompagne la phrase «Do it yourself» («Fais le toi-même», ndlr) que l’on se prend en pleine face, une fois entré dans une pièce annexe. Simple et efficace comme une petite tape sur la joue: l’architecture ce n’est pas seulement des termes compliqués. Ce n’est pas juste une ronde de vieillards qui se chamaillent sur le design de monuments improbables qui ne verront jamais le jour. L’architecture c’est aussi un travail collectif d’artisans et des mécanismes qui, une fois imbriqués, font que l’on peut se sentir libre à l’abri. 

Exposition « L’architecte, autrement » au CCA. Céline Fabre

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