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Le moment de tirer sa révérence

Il est temps de délaisser l’institution dépassée qu’est la monarchie.

Monica Morales | Le Délit

Selon diverses sources, inéluctablement influencées de diverses manières, les estimations des coûts reliés à la monarchie canadienne varient considérablement. Alors que quelques inconditionnels de la maison Windsor estiment que les dépenses qu’elle sollicite sont annulées par les revenus qu’elle entraîne, ses critiques les plus intransigeantes lui attribuent un coût avoisinant 1,85$ par citoyen canadien. En toute humilité, il me semble superficiel, voire faible, d’articuler un débat aussi important que celui du statut constitutionnel du Canada autour d’une vulgaire question monétaire. 

Nous devrions, avant tout, nous questionner sur la nature et la pertinence du patrimoine culturel en lequel nous investissons avant de contester le nombre de millions de dollars que nous lui attribuons chaque année. La monarchie est-elle, aujourd’hui, à l’aube du 150e anniversaire de la fédération canadienne, une source de fierté pour notre peuple ? Est-elle rassembleuse, pertinente ou positive ?

N’est-il pas paradoxal, pour un pays se targuant d’être ouvert, moderne et libre, d’avoir, à titre de chef d’État, un monarque nommé uniquement en raison de son hérédité ?

En s’attardant sur ces questions, on s’aperçoit que, sans équivoque, le moment de tirer sa révérence est venu pour la monarchie. Cette dernière n’a, en effet, plus sa place au sein de notre société actuelle. Sans négliger l’appui indéniable que la famille royale reçoit, principalement au Canada anglais, on ne peut que douter de sa réelle capacité à générer de la fierté d’un océan à l’autre. Elle ne dérange pas, mais ne mobilise pas non plus. N’est-il pas paradoxal, pour un pays se targuant d’être ouvert, moderne et libre, d’avoir, à titre de chef d’État, un monarque nommé uniquement en raison de son hérédité ? Pouvons-nous être fiers que les nouveaux Canadiens, lors du serment de citoyenneté, prêtent allégeance à Élisabeth II, reine du Canada, à ses héritiers et à ses successeurs ? 

Donner un sens à la symbolique 

Ce n’est que symbolique, certes. La reine, le gouverneur général et les multiples lieutenants-gouverneurs n’ont que des pouvoirs de jure ne s’appliquant pas en pratique, et bien qu’un souverain puisse refuser de reconnaître un gouvernement élu, il n’y a pratiquement aucune chance que cela arrive. Néanmoins, la symbolique ne doit, en aucun cas, être prise à la légère, comme cela est trop souvent le cas. La symbolique, c’est un message, une marque de commerce, qui se doit d’avoir un sens, assurément, mais un sens adapté à qui nous sommes et à ce dont nous aspirons. Nous sommes loin, ici, du pays d’«avant-garde » que nous tentons de vendre à l’international depuis 1980.

De toute évidence, la monarchie n’arrive pas à rassembler et à représenter les divers peuples fondateurs du Canada.

De toute évidence, la monarchie n’arrive pas à rassembler et à représenter les divers peuples fondateurs du Canada. Bien que la souveraine actuelle s’exprime mieux en français que plus de la moitié des ministres du gouvernement canadien actuel, la monarchie n’incarne, en aucun cas, l’héritage des Québécois et des Canadiens francophones. L’affront aux cultures autochtones est encore plus odieux. 

Est-ce moi qui idéalise en étant persuadé que la succession au trône sera le moment idéal pour créer un poste de chef d’État qui saura représenter à la fois les valeurs, la culture, le passé et le présent de tous les Canadiens et les Canadiennes ? Peut-être. Comme à l’habitude, nous voulons éviter de nous questionner sur qui nous sommes et sur ce à quoi nous aspirons comme peuple. Cela ne fait élire aucun gouvernement et ne risque que de vous faire passer pour un rabat-joie insatiable. Le confort et l’indifférence, comme le disait Denys Arcand…


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