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Vivre, lire et écrire

Festival international de la littérature : Nicolas Chalifour et Lidia Jorge nous parlent écriture.

Mahaut Engérant | Le Délit

Lors de la soirée du 24 septembre, l’UNEQ (Union nationale des écrivains du Québec) a organisé une conférence à l’occasion du Festival international de la littérature. Les invités d’honneur n’étaient nuls autres que Nicolas Chalifour (Québécois auteur de Variétés Delphi) et Lidia Jorge (écrivaine d’origine portugaise, connue notamment pour son roman  Le rivage des murmures). Dans une atmosphère intime et conviviale, les deux écrivains nous ont livrés leurs expériences et convictions personnelles par rapport au rôle de la lecture dans leurs travaux de création. 

Illustres  idoles

Derrière un écrivain (et sans doute derrière tout fervent lecteur), il y a des œuvres qui le poursuivent tout au long d’une vie. C’est le cas de Lidia Jorge, qui cite Orlando de Virginia Woolf, un roman qui ne l’a pas quittée de toute sa carrière. Quand l’inspiration tarde à venir, il est utile de lever le regard vers ces illustres noms qui sont gravés dans notre patrimoine culturel : les deux auteurs mentionnent Proust, Nabokov, et Kundera. Hors du domaine de la littérature, toutes sortes d’artistes se guident les uns les autres. Jorge mentionne un ami qui se ressource dans la musique : « Quand je me sens sec, j’écoute l’adagio d’Albinoni ». Quant à elle-même, elle se tourne vers l’œuvre de Woolf : « Si je ne sais pas où aller, j’ouvre Orlando et c’est comme si une voix me disait : tu n’es pas seule, donc continue ». Derrière cette admiration pleine de déférence se cache un certain vertige, une crainte de ne pas être à la hauteur. « Ces auteurs nous aident en nous mettant au défi », explique Chalifour. « Je ne suis pas capable d’en faire autant », admet Jorge sans complexe, «[…] mais j’ai ma propre voix ». 

Les livres dans les livres

Il devient évident que le processus de création littéraire n’est pas une simple affaire. À présent, les lecteurs se méfient des histoires « simples » qui reposent uniquement sur une intrigue : c’est dans ce contexte qu’est née la mode de la métafiction. Nos deux écrivains insistent sur l’importance des textes présents à l’intérieur de leurs textes : leurs personnages tombent sur des articles, des manuscrits, des témoignages et récits, emboîtés dans la trame générale du roman. Cela leur permet de juxtaposer plusieurs regards différents, ainsi que d’encourager une réflexion sur la notion même d’écriture et de fiction. 

Tout ce que la littérature a à offrir

Entre deux anecdotes, le fil directeur de cette conférence reste une célébration sincère et enthousiaste de la littérature. Nicolas Chalifour affirme avec conviction que ce que la littérature fait de mieux est de nous faire vivre par procuration. « On vit en deux heures ce que l’on ne vit pas en vingt ans », ajoute-t-il. Voilà une déclaration qui nous donnerait envie de rester cloués à nos livres toute la journée. L’écrivain ne s’oppose d’ailleurs pas à cet état d’esprit. « Je crois que c’est ça qu’être écrivain veut dire », suggère-t-il, «[…] de ne jamais avoir envie de sortir de la bibliothèque ; de s’abîmer dans la fiction (comme Don Quichotte)». Une perspective pleine de charmes, en vérité, quoique légèrement inquiétante… En attendant, cette discussion entre deux auteurs passionnés par leur domaine reste une expérience enrichissante, propre à revigorer tout amoureux des livres ou écrivain en herbe. 


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