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Eulogie culinaire

Éditorial.

Luce Engérant

« Les jours défilent avec la constance du métronome, souvent conduits par la main de politiques grossières et ignorantes, sans scrupules, béates de leurs triomphes à courte vue et qui se juxtaposent tristement, selon des lignes serpentines, sur un horizon de déconvenues. » Jean-François Nadeau, Le Devoir, 2 février.

Qu’on nous permette ici de verser quelques larmes en l’honneur d’une vieille dame du paysage mcgillois disparue, hélas, la semaine dernière. Je veux parler d’Amelio’s, cette pizzeria familiale légendaire du Ghetto McGill, installée depuis 1985 au coin Milton et Sainte-Famille. Un an après la mort son fondateur, Christopher Scodras, le restaurant a déposé le bilan. on raconte que les patrons étaient durs avec leurs employés. Il me souvient aussi qu’ils ne prenaient que « comptant ». Mais tout de même, quelle perte… Oui, quelle perte immense pour les étudiants de McGill et quelle tristesse pour les habitants de la communauté Milton Parc. Oh ! Combien de rencards, combien de rendez-vous, qui sont partis joyeux pour des soupers divins. On apportait son vin, on se serrait les fesses et l’on mangeait gaiement jusqu’à la dernière miette, ou bien l’on mourrait étouffé en tâchant d’y parvenir. Que mangeait-on ? Des pizzas pour oublier l’hiver, les cours et les responsabilités. Des pizzas à perdre la raison, des pizzas à n’en savoir que dire, à n’avoir que le fromage d’horizon. Des pizzas enfin, pour se dire que l’on s’aime, le cœur parti dans la dernière neige. Amelio’s, Amelio’s, le temps saigne. Quand donc aurais-je de tes nouvelles ? Toi seule qui recevais Le Délit chaque semaine.


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