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Apprentie plume

Petit cours d’écriture à l’usage de tous.

Cécile Amiot

Loin de moi l’idée de prétendre à quelque érudition littéraire. L’intention est de partager ici, avec vous, lecteurs, les bons conseils que l’on m’a prodigués. Je ne cherche pas à vous inculquer une quelconque méthode inébranlable ni à vous sermonner à propos de l’importance de savoir écrire. Ces quelques lignes recèlent de propositions qui, si vous le voulez bien, inciteront votre imagination à emprunter la route des possibles. Libre à chacun d’en faire, ou non, bon usage.

Je tâche ici, moi-même, d’y aiguiser ma plume. C’est la première leçon : « Praktik-praktik-praktik ! » dirait un violoniste tzigane de ma connaissance. Jouer, voilà la clé de l’émancipation littéraire. Jouer des syllabes, des mots, des phrases, des tons, des voix, des opinions. Je ne saurais vous cacher l’auteur de l’adage : « jouer c’est expérimenter le hasard », mais je le garde pour plus tard. Voyez, je sème sans m’arrêter. Il me reste peu de mots pour faire le tour du sujet, je me garde donc une réserve quant au déploiement de trop fertiles idées.

Il nous faut raisonner. Ou plutôt, faire résonner ceux qui, entre les sons, déclenchent l’écho fécond du délire poétique. Les langues comptent nombre de sens cachés, d’associations potentielles sur lesquels il arrive de glisser sans se soucier. Homonymes, homographes et homophones sont pourtant souvent de la partie. « Homo », quatre lettres et de quoi noircir des pages et des pages de la préhistoire à l’actualité ! Le charme, par excellence, de l’écriture réside dans ce qu’elle est : le germe, le levain et le pain de la conceptualisation, de la réflexion. Le délire poétique n’en est qu’un ingrédient. 

« Il ne faut pas mettre de vinaigre dans ses écrits. Il faut y mettre du sel. » Conseillait Montesquieu dans ses cahiers. Laissons donc le vinaigre aux salades. Le vin qui se pique n’apporte plus aux papilles l’excitation des soirs d’été ni la chaleur des veillées au foyer, quand la bise siffle son air glacial entre les vasistas mal isolés. Les printemps et l’automne ont tout autant de douceur, mais nous y reviendrons dans le cadre inévitable des saisons, au cours d’une prochaine leçon. 

Écoutez, l’oreille contre les rails du train de l’invention, au milieu du désert luxuriant de votre esprit, r(ai/é)sonner les longueurs d’onde du monde. Saisissez, au sein même de votre matrice conceptuelle, les principes qui peuvent s’accorder. Jouez, expérimentez le hasard de Novalis. Ne tentez pas d’avoir le mot de la fin lorsque vous cherchez encore celui du début. Noircissez avec humilité, justesse et rectitude les pages que vous trouverez et ajoutez‑y une touche de votre zèle. Pratiquez, trompez-vous, détrompez-vous et vous pratiquerez l’art d’écrire.


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