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Deux poids, deux mesures

Le résultat du référendum écossais n’aura pas de répercussions majeures au Québec.

« L’Écosse devrait-elle être un pays indépendant ? » C’est la question à laquelle les Écossais devront répondre lors du référendum portant sur l’indépendance de l’Écosse le 18 septembre prochain.  Ce référendum pourrait bien signer la fin du Royaume-Uni, puisque des sondages suggèrent que le camp séparatiste (le Parti national écossais, dirigé par Alex Salmond) gagne l’adhésion de plus en plus d’Écossais, au détriment du Parti unioniste. À tel point que le 10 septembre, le premier ministre David Cameron appelait vivement la population à refuser l’indépendance du territoire. Si le Non l’emporte, promet-il, l’Écosse se verra attribuer des pouvoirs supplémentaires. Quoi qu’il en soit, comme le conclut l’hebdomadaire britannique The Economist, « la Grande-Bretagne est sur le point de changer ».

Les causes de l’émergence du mouvement indépendantiste sont nombreuses : l’impact douloureux du thatchérisme, qui a entrainé la reconversion du puissant secteur industriel de la région et les divergences politiques qui en résultent (les Écossais soutiennent, en majorité, le Parti travailliste ; les Anglais, le Parti conservateur). « L’indépendance de l’Écosse aura des conséquences non négligeables : une nouvelle monnaie (trois options s’offrent aux dirigeants écossais : conserver la livre sterling, créer une nouvelle devise ou adhérer à l’euro), le départ des banques anglaises installées en Écosse (8% des banques ont déclaré qu’elles quitteront la région si le Oui l’emporte), et le partage des ressources pétrolières ; les Écossais accusent en effet les Anglais de voler leur pétrole », explique Mahaut, une étudiante britannique de l’Université McGill.

À de nombreux égards, le Québec et l’Écosse présentent une situation similaire : les arguments avancés en faveur de l’indépendance des deux régions sont semblables. Les liens entre les deux territoires sont forts : au cours du 19e siècle, des Écossais quittent la Grande-Bretagne pour s’installer dans des régions québécoises ; l’un des premiers ministres du Canada, Sir John A. Macdonald, est né à Glasgow, tout comme le fondateur de l’Université McGill, James McGill. Comme l’explique Éric Bélanger, professeur de sciences politiques à McGill, dans un article de septembre 2013 : « Le Québec et l’Écosse constituent des nations qui aspirent toutes les deux à une plus grande autonomie. » Le dirigeant du parti souverainiste Option nationale, Sol Zanetti, déclare d’ailleurs aux Écossais : « Vous ne ferez qu’aggraver la situation si vous votez Non ». Si la Grande-Bretagne se sépare de la même façon que l’on fait les Tchèques et les Slovaques dans les années 1990, la question de l’indépendance pourrait refaire surface », explique Andrew Coyne, chroniqueur politique canadien. Les fédéralistes québécois devraient-ils donc s’inquiéter du résultat du référendum qui, s’il est positif, pourrait renforcer les prétentions des souverainistes ? 

En réalité, pas nécessairement. Selon Jack Jewab, vice-président de l’Association d’études canadiennes, les Canadiens d’origine écossaise « ne voient pas de réelle contradiction entre soutenir l’unité du Canada et l’indépendance de l’Écosse. Ils rejettent toute analogie entre l’indépendance du Québec et celle de l’Écosse ». D’autant plus que l’élection générale qui s’est tenue le 7 avril 2014 a été une défaite pour le Parti Québécois. Enfin, la province n’aurait sans doute pas survécu économiquement à l’indépendance, selon une bonne partie des opposants. Pour sa part, le gouvernement écossais a publié un projet de plus de 600 pages détaillant les aspects économiques et politiques inhérents à un pays nouvellement indépendant. 

Il est certain que le Québec examinera de près les résultats du référendum du 18 septembre. Néanmoins, il est peu probable qu’une victoire du Oui, qui entrainerait l’indépendance de l’Écosse, renforce le camp souverainiste québécois.


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