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À qui appartient notre pétrole ?

Pétrocultures 2014

** Pétrocultures 2014 : : le pétrole, l’énergie et l’avenir du Canada. Voici le titre de la conférence annuelle de l’Institut d’études canadiennes de McGill qui s’est déroulée les 6 et 7 février derniers sur le campus, au cercle universitaire de McGill. Événement souhaité par certains, critiqué par d’autres, Pétrocultures a attiré l’attention et soulevé les débats. Cette semaine, Le Délit offre une couverture en profondeur de cet enjeu et des diverses conférences qui ont eu lieu. **

« Ceux qui possèdent le pétrole sont ceux qui en sont le plus dépendants. » Richard Janda, Professeur associé à la Faculté de droit de l’Université McGill

Confidentialité indispensable des accords entre les Premières Nations et le gouvernement fédéral, droits autochtones et rôle crucial du pétrole dans les finances canadiennes et internationales : voici les trois principaux enjeux soulevés par les conférenciers invités.

Ken Chapman, directeur général de Northern Initiatives et ancien président de Oilsands Developers Group relève le fait que la plus grande partie des accords d’exploitation de pétrole avec les communautés autochtones sont de nature « propriétaire », c’est-à-dire qu’ils sont contractés par des compagnies privées et motivés pour des raisons commerciales et la compétition grandissante sur le marché. En contrepartie, les Premières Nations revendiquent une plus grande transparence de ces contrats. Chapman n’y va pas par quatre chemins : « le gouvernement lui-même est responsable de signer un pacte acceptable pour les deux parties, et ce dernier doit être un traité international de souveraineté, pas un simple échange commercial entre corporations ».

Chapman explique aussi que 72% des exploitations de sable bitumineux au Canada appartiennent à des compagnies étrangères, une statistique conférant au pays un pouvoir de négociation au niveau international. Le conférencier avance que la situation pourrait donner l’opportunité au Canada de devenir un exemple, voire une « autorité morale » en matière de développement durable, étant donné que le pétrole est à la fois une denrée rare et la fondation même de l’économie mondiale. Ainsi, l’exploitation du pétrole se renouvèlerait comme un catalyseur pour exporter non seulement des ressources, mais des nouvelles normes et valeurs de développement durable qui permettraient à la communauté internationale d’atteindre ses objectifs environnementaux.

Scott Vaughan, président et directeur général de l’Institut national du développement durable, ajoute également qu’environ 35% du pétrole produit au Canada l’est à des fins d’exportation.

Katherine Koostachin, avocate en droit des autochtones, de l’environnement et des ressources naturelles fait état que les droits des autochtones ne sont pas absolus en vertu de la loi canadienne. En effet, même dans les causes allant jusqu’à la Cour suprême, la Couronne (lire ici le gouvernement fédéral) peut ignorer ces droits au nom de l’intérêt public, ceux économiques inclus. De plus, lorsque le gouvernement octroie à une compagnie pétrolière le droit d’exploiter une partie de son territoire, il lui enjoint également de consulter directement les communautés autochtones touchées, une belle façon pour le Parlement de ne pas porter le blâme de l’ingérence actuelle sur le droit ancestral autochtone. Le droit de veto que les autochtones devraient avoir sur leurs propres terres est ici loin d’être reconnu.

Scott Vaughan, argumente dans le même sens en faisant valoir que « les projets les plus intéressants, excitants et innovateurs en matière d’exploitation du pétrole sont ceux où les autochtones sont des partenaires ». Quand on sait que le gouvernement fédéral dépense plus de 800 millions de dollars par année en subventions pour le secteur des énergies fossiles, il y a lieu de se demander si une partie de ces fonds ne devraient pas être versées aux relations avec les autochtones.


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