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Pourquoi le street art a de l’avenir

Petites histoires de grands vandales

Thomas Simonneau

Lectrices et lecteurs perspicaces que vous êtes, vous avez sûrement remarqué que le titre de cette chronique est une affirmation ; bien que la forme interrogative aurait ici toute sa place. En effet, j’avoue me mettre dans les bottes d’un prophète arrogant et sûr de lui le temps de ces quelques lignes pour vous proposer ma vision de l’art de rue et de son futur.

Des petites signatures aux pochoirs complexes en passant par les murales de trente mètres, le street art tire sa force d’une diversité stylistique et technique incomparable. De part le simple fait que ses œuvres soient exposées dans la rue, prêtes à être aimées, détestées, jugées ou simplement ignorées, l’art de rue interpelle, provoque et fascine. Marginal et rebelle, le véritable art de rue ne se trouve pas dans des édifices religieux protégés ou dans les salles d’exposition. Il est gratuit et ne répond pas au dogmatisme, aux certitudes et aux dérives mercantiles. De plus, ses liens étroits avec la culture de masse, la société de consommation et la politique moderne en font très certainement une composante non négligeable des vecteurs d’expression contemporains.

Pour décrypter ce mouvement en profondeur, il me semble logique de s’intéresser à ses acteurs… Voyez-vous, de nombreux artistes passent leur vie à essayer de modéliser une idée conceptuelle de leur art. Ils piochent leur inspiration à droite à gauche, étudient la théorie pour faire de leurs œuvres une valeur sûre sur le marché pour, au final, détruire l’art. La spontanéité et la générosité ne sont pas au rendez-vous.

L’artiste-graffeur, quant à lui, offre son art au public, quel qu’il soit. Il fait cela de manière naturelle, presque inconsciemment. Cette vérité fait que le street art ne peut être détruit par des théoriciens et des critiques d’art, qu’il est libre et expressif.

Le photographe et essayiste français Brassaï définit le graffiti dans un essai écrit en 1933 comme « un art bâtard des rues mal famées ». Anonyme et mystérieux, il contraste avec les nombreuses œuvres revendiquées haut et fort par certains artistes, parfois médiocres. Qu’on le veuille ou non, l’art urbain fait partie intégrante de notre quotidien, influence les mentalités. Il est là, physiquement présent.

Un autre argument, probablement plus personnel, est que la particularité de l’art de rue est de donner vie à un espace urbain parfois dur et prosaïque. Je parle ici des fresques travaillées et esthétiques qui ajoutent un peu de couleur à la routine métro-boulot-dodo qui sévit dans les grandes villes. D’ailleurs, nombre d’entre elles financent de grands projets artistiques visant à légitimer l’art de rue et à embellir l’espace urbain que nous, citadins, partageons.

Bref, l’art de rue a de l’avenir. Pour les dubitatifs, je vous invite à vous balader sur les trottoirs de Londres, New York, Paris ou encore Sao Paulo. Pour ceux qui ne croient pas aux prophéties, je suis de votre avis.

 


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