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Quelle ironie

Le 10 décembre dernier, j’ai appris avec délectation le nom des lauréates du prix Nobel de la paix 2011.

La présidente du Libéria, Ellen Johnson Sirleaf, ainsi que Leymah Gbowe (Libéria) et Tawakkol Karman (Yémen), se partagent le prix grâce à leur contribution à la lutte non-violente pour la sécurité des femmes et le droit des femmes à participer dans le travail de reconstruction de la paix.

Élue en 2005 et réélue le 8 novembre dernier, Ellen Johnson Sirleaf est devenue la première femme à la tête d’un État africain. Économiste de formation, elle a apporté une lueur d’espoir quant à la démocratisation du Libéria, en luttant contre la corruption, ainsi que pour une égalité des chances pour tous.

Ceci dit, la remise de ce prestigieux prix à la présidente libérienne révèle la contribution des femmes quant à l’avenir de la démocratie. Plus encore, il revêt l’importance des femmes en Afrique, constamment exclues de l’univers politique de leur pays.

En fait, les traditions culturelles ou religieuses limitent souvent les ambitions féminines dans la sphère publique. Par ailleurs, les performances politiques de la gent féminine, spécialement celles de madame Sirleaf semblent confirmer un mythe répandu : les femmes sont moins enclines à déclencher des conflits armés, prônant davantage la paix.

J’espère fortement que ce prix Nobel propulsera madame Sirleaf, non seulement dans les médias, mais aussi dans les conversations de tous les jours. Trop souvent ai-je voulu discuter de cette grande et courageuse femme africaine et trop souvent m’a‑t-on coupé la parole avec une face en point d’interrogation. Et pourtant, cette incrédulité s’évaporait lorsque je prononçais le nom d’Omar el-Bechir…

Ceci en dit long sur la place des femmes en politique. Vous me direz que c’est simplement dû au fait qu’elles sont en infériorité devant tous ces hommes. Certes, mais je ne crois pas que la réponse réside dans cette affirmation plutôt simpliste et sans fond. Il est vrai que la guerre vend.

Et la violence est souvent plus matière d’homme que de femme. Des politiciens qui ont recours à la violence, tels que Robert Mugabe, Bachar el-Assad et même Mahmoud Ahmadinejad, font constamment les manchettes et par le fait même sont davantage connus.

Cela dit, je ne crois pas que ceci puisse excuser le manque de couverture médiatique dont souffrent les politiciennes de ce monde. En réalité, il y a un manque de femmes en politique, que ce soit au Québec, au Canada ou en Afrique. Des quotas de 10%, tels qu’implantés au Maroc, n’incitent pas plus de femmes à prendre part dans cette arène, car ils ne touchent pas à l’essentiel du problème : convaincre la population que la gent féminine est aussi apte à servir un poste politique. Et comment inciter les femmes à faire le saut en politique si leur reconnaissance peine à naître ?

Dans un élan plus optimiste, il y a certainement un futur pour ces femmes. Cette dernière remise du prix Nobel de la paix ne démontre rien de moins. Ellen Johnson Sirleaf, Leymah Gbowe et Tawakkol Karman ne font que paver le chemin pour celles qui n’osent pas ou qui ont perdu espoir que les choses puissent changer. Par contre, n’en restons pas là. Répandons la nouvelle, parlons de madame Sirleaf, afin que sa popularité dépasse enfin celle du Colonel Kadhafi.


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