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Le rapport Jutras confirme l’usage de la violence par la sécurité

La principale se donne un mois pour réagir.

Webmestre, Le Délit | Le Délit

Le doyen de la Faculté de Droit Daniel Jutras a publié son rapport sur les événements du 10 novembre dernier. Le document tente de faire la lumière sur le déroulement de la journée d’action contre la hausse des frais de scolarité qui s’était terminée par l’occupation du bureau de la principale et par l’intervention de l’escouade anti-émeute sur le campus.

Photo : Victor Tangermann
Procédures disciplinaires

Dans les jours suivant le 10 novembre, Le Délit avait interrogée la principale sur les potentielles procédures disciplinaires à l’encontre des employés de l’université ayant fait usage de la force envers des étudiants. Malgré les nombreux témoignages ayant alors été publiés dans la presse, la principale se bornait à répéter « Je n’ai aucune preuve de cela, […] nous verrons les conclusions de l’enquête. »

Même son de cloche du côté de Jim Nicell, vice-principal adjoint (services universitaires) en charge notamment des services de sécurité, qui expliquait qu’il « ne ferait aucun commentaire dans la presse à propos des événements [du 10 novembre]». Il ajoutait : « Je vous demande de comprendre qu’un processus est en place […] par conséquent je vous demande de faire preuve de patience en attendant les conclusions de l’enquête. »

Stephen Saideman, professeur au département de sciences politiques écrivait sur son blog « Je comprends le désir d’éviter de jeter la pierre mais, hum, [cette affaire] fut un désastre pour l’université et la pierre devrait être jetée. »

Les attentes étaient donc grandes le 15 décembre, jour de la publication du rapport Jutras. Moins d’une heure après sa mise en ligne, Heather Munroe-Blum a convoqué la presse étudiante, locale et nationale. Expliquant qu’elle n’avait « eu le temps de lire le rapport qu’une seule fois et très rapidement », la principale s’est limitée à des considérations générales et a refusé de commenter les principales conclusions de l’enquête.

Le rapport confirme que la sécurité a usé de force physique contre deux des occupants du 5e étage pour les évincer des bureaux de la principale, l’un d’eux ayant été traîné au sol par les pieds. Le doyen n’a recueilli « aucune preuve de coup de poing ou de pied ni de la part des occupants, ni des gardes de sécurité. »

À nouveau, la principale a refusé d’indiquer si des mesures disciplinaires seraient prises. Elle a déclaré vouloir « réserver [ses] réactions à la communauté mcgilloise. » Ayant tenté de joindre Jim Nicell, Le Délit a été informé par les relationnistes de presse de l’université qu’il « n’y aura[it] pas d’autres réactions. » À nouveau, on invite à la patience. Prochain rendez-vous : le Sénat du mercredi 18 janvier, où le rapport sera présenté. Les débats seront retransmis en ligne.

On en saura alors peut-être plus sur ce que Heather Munroe-Blum a voulu dire en déclarant : « Si responsabilité doit être établie, c’est un processus à part entière. »

Suite à la publication du rapport, Stephen Saideman écrivait « J’aimerais vraiment que McGill vire […] au moins quelques uns des gens de la sécurité, juste pour montrer qu’il y a des conséquences quand on fait usage de la force contre des manifestants relativement pacifiques. […] Les individus devraient être punis. Bad events followed by no accountability is just a recipe for more bad events.»

Des faits établis mais des recommandations timides

Long de soixante pages, le rapport a été rédigé à partir de 150 témoignages écrits et quarante-cinq heures d’entrevue. Parmi les personnes qui ont accepté de témoigner, on compte cinq des occupants mais aussi des employés du bureau de la principale et du vice principal exécutif. Le doyen a également eu accès aux enregistrements des caméras de surveillance ainsi qu’aux conversations radios des personnels de sécurité.

On apprend qu’en l’espace de trois minutes, le centre de contrôle a reçu six appels d’employés se trouvant au cinquième étage. Un bouton de panique a également été activé. Le rapport confirme que suite à ces appels, la sécurité a bien contacté le SPVM. La présence des policiers à vélo n’a cependant pas été expliquée et il semblerait qu’ils n’aient pas été appelés par l’université.

Le doyen Jutras corrobore le témoignage initial des occupants qui affirmaient n’avoir brutalisé personne. Le rapport confirme qu’il n’y a pas eu de contact physique entre les occupants et les employés, mais que toutefois, « la porte avait heurté le bras d’une des employées », provoquant une ecchymose.

Quant aux recommandations, très générales, elles préconisent la révision des procédures des services de sécurité ainsi que la clarification des droits des étudiants à manifester pacifiquement sur le campus de l’université.

Avec la collaboration de Erin Hudson du McGill Daily.


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