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Ma langue, mon choix

Je désire continuer sur la même lancée que la chronique de mon collègue Francis L. Racine datant du 1er février. Ces derniers jours, Pierre Curzi a décidé d’occuper un grand espace médiatique en déclarant vouloir mettre en application la loi 101 au niveau collégial. Cette proposition est d’une tristesse sans nom. Pourquoi ? Parce qu’elle marque le fait que certains élus au Québec ne se rendent plus compte qu’ils sont en poste pour défendre les droits et libertés des Québécois et non pas pour les en dépouiller.

On croirait, dans la tête de Pierre Curzi, que le Québécois moyen est un enfant. Le gouvernement doit lui tenir la main pour qu’il traverse le grand boulevard de la vie sans se faire frapper par un véhicule (qui serait assurément conduit par un Anglais). Pourtant, on ne cesse de nous casser les oreilles avec la « fierté » québécoise, tout particulièrement lorsqu’on approche de la Saint-Jean-Baptiste. Être fier de son identité, ce n’est pas seulement agiter le fleurdelisé une fois par année et joindre tous les groupes possibles et imaginables qui manifestent pour la pérennité du français et pour l’indépendance du Québec sur Facebook.

Une identité, c’est être. Être, nous le faisons à tous les jours, individuellement. Je suis extrêmement fier de parler français. J’aime ma langue. Je l’écris avec soin, je la parle avec tout le respect que je lui dois et j’ai la ferme intention d’élever mes enfants dans cette langue. Il devrait en être de même  pour tous les francophones d’Amérique du Nord. Les lois linguistiques ne font que créer un faux sentiment de sécurité par lequel les citoyens ne font que décharger leur responsabilité culturelle sur les bureaucrates. Ce qui a fait, qui fait et qui fera la force d’une culture sera, pour toujours et à jamais, la volonté du groupe culturel. Jamais le gouvernement ne pourra être garant d’une telle charge et s’en occuper convenablement. Imaginez un monde où les francophones du Québec cessent de parler français du jour au lendemain. L’État pourra bien faire ce qu’il veut, jamais il ne réussira à imposer sa volonté sur des gens qui n’en veulent plus. Si la langue française est si importante pour les Québécois, alors pourquoi ne la parlent-ils pas eux-mêmes ?

De toute manière, avons-nous vraiment besoin que le gouvernement vienne nous dire comment élever nos enfants ? Pour ceux d’entre nous qui ont ou auront des enfants, avez-vous vraiment besoin qu’un fonctionnaire vous dise que votre enfant peut désormais faire ses propres choix en matière d’éducation parce qu’il a passé suffisamment d’années dans le système francophone au goût des législateurs nationalistes ? Absolument pas. Vous êtes assez intelligents pour savoir que le niveau de français de votre enfant est suffisant et que vous désirez désormais qu’il aille à l’école anglaise. En outre, si l’enfant en question veut aller étudier en anglais, qui est Pierre Curzi pour lui dire que son choix est mauvais ? Avons-nous si peu foi en nous-mêmes pour apprécier d’être gouvernés à ce point ?

Pendant que nos « défenseurs » de la langue se demandent comment mieux s’introduire dans chacune de nos décisions personnelles (parce que c’est bien connu, un député sait mieux que vous ce qui est bien pour vous), 54% des Québécois peinent à lire des textes de faible complexité. Or, ça ne compte pas ; ce qui importe, c’est de forcer les 5% de francophones qui font le choix, après une scolarité francophone, d’aller au Cégep anglophone. C’est aussi de forcer des adultes responsables à ne pas faire les choix qu’ils jugent les meilleurs pour eux. Pour Pierre Curzi, un peuple qui ne sait majoritairement pas lire n’a pas d’importance. Pour lui, l’État n’est qu’un outil pour faire de la projection de valeurs. Parlez-moi d’une base solide pour l’avenir du Québec.

Le député de Borduas devrait plutôt insuffler aux francophones le courage des Catalans, qui, suite  à la victoire de Philippe V lors de la Guerre de succession d’Espagne en 1714 et l’application des décrets de Nueva Planta en 1716, n’ont cessé de vivre opprimés sous la houlette de gouvernements qui leur étaient réellement hostiles. Pourtant, de nos jours, il y a près de neuf millions de catalans.

Montrez aux péquistes que vous n’avez pas besoin d’eux. Parlez en français, exigez d’être servis en français à Montréal et prenez soin de votre langue. Vos actions feront son avenir.


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