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De la pop plein les oreilles

Chinatown, le groupe romantico-pop-rock révélé en 2009 grâce à son album Cité d’or, était en concert vendredi dernier au Bain Mathieu. Histoire d’une rencontre en or avec des dandys des temps modernes.

À la tombée de la nuit, dans un petit parc, Le Délit a rencontré Pierre-Alain Faucon, Félix Dyotte et Julien Fargo de Chinatown. Ce soir-là, ils devaient se produire au Bain Mathieu dans le cadre des 10 jours du Festival des Arts du Faubourg. La rencontre, faite de sourires et d’anecdotes, était à l’image du groupe et de ses concerts : chaleureuse, généreuse et enthousiaste.

Petite histoire d’un début peu ordinaire

C’est en 2007 que Pierre-Alain Faucon et Félix Dyotte, deux amis de longue date décident de former un groupe de musique pop rock : Chinatown, dont le nom fait référence au film noir de Roman Polanski. Ils s’entourent très vite de Julien Fargo, Toby Cayouette et Gabriel Rousseau pour former un quintette dont le succès s’annonce dès les premiers mois de travail. En effet, leur composition « Retour à Véga », interprétée par The Stills, devient rapidement un succès. Une composition que Chinatown n’a pas abandonnée, puisqu’il continue de la jouer lors de ses concerts.

Il paraît difficile quand on les rencontre de s’imaginer que ces musiciens ne se connaissent pas depuis toujours. Leur complicité est palpable tant sur scène que dans les coulisses, notamment quand ils se remémorent leur expérience en Chine, expérience fondatrice s’il en est. « C’était une opportunité, un croisement des astres », explique Julien. « On était un jeune band, on montait les chansons pour l’album. Cette tournée en Chine a été vraiment un bonus. Au niveau du collectif, ça a changé beaucoup de choses. En rentrant de là-bas, on était vraiment un band. On est vraiment chanceux, c’est un souvenir génial. » Félix et Pierre-Alain se rappellent avec un plaisir visible l’ambiance des concerts : « Les Chinois, ils comprenaient pas les paroles, ils comprenaient juste le fun qu’on se faisait sur scène. »

Non seulement le groupe sort de cette expérience grandi, mais il est soutenu par la critique : Strut, le magazine de mode anglophone, les qualifie de « Next Big Thing » tandis que le Nightlife Magazine conseille à ses lecteurs de surveiller ce groupe émergeant. Entre le festival M pour Montréal, celui de La Rouge de Nominingue et la première partie de Jean Leloup au Colisée de Québec, Chinatown conquiert un auditoire toujours grandissant. Félix témoigne de leur évolution sur scène, fortement marquée par la célébrité des débuts : « Je trouve qu’enregistrer dans un local de pratique est quelque chose de vraiment enrichissant, mais ça trouve son aboutissement sur une scène. C’est comme la théorie et la pratique. Au début, tu sais pas vraiment si les shows sont bons ou mauvais, et plus ça va, plus tu développes une expérience. »

Vers un deuxième album

Au vu de ce succès, le groupe distribue lors de ses spectacles un EP, un mini album intitulé L’amour, le rêve et le whisky, dont les quatre morceaux font successivement leur apparition à la radio. « Tour assassine » et « Pénélope » séduisent particulièrement le public, comme le montre leur position dans les palmarès radios de CISM et CIBL. Peu après, le quintette prépare son premier album, Cité d’or, réalisé par Gus Van Go. Le groupe y offre un mélange de pop-rock influencé par le rock contemporain et la musique française des années 60, de Gainsbourg à Ferré en passant par Higelin. Enregistré à Montréal et à New York, Cité d’or est lancé le 5 mai 2009 : il n’en faut pas plus pour que les concerts s’enchaînent au Québec comme en Europe, que Radio-Canada en fasse sa Révélation Musique de l’année 2009–2010 et qu’un Prix Galaxie leur soit décerné.

Aujourd’hui, le groupe travaille à un nouvel album qui sera enregistré à partir de janvier prochain. 

Pour les musiciens, c’est désormais un vrai travail de groupe au niveau du processus de création, contrairement au premier album où Félix et Pierre-Alain guidaient l’expérience en tant que chanteurs-compositeurs. « Les arrangements, les chansons, c’est Pierre-Alain et moi qui les écrivons, raconte Félix. Et ça donne souvent lieu à des surprises. » Ainsi, le prochain album sera « plus collectif », annonce Pierre-Alain, alors que Julien ajoute : « Quand Gabriel, Toby et moi avons intégré le groupe, certaines chansons étaient déjà finies, imagées. Nous, on avait quasiment rien à mettre. On a juste mis un coup de pinceau, alors que là, on débute un nouvel album et il y a plus de travail de band. J’ai l’impression qu’il y a une espèce de formule unique qui va sortir de ce travail. »

Chinatown nage dans la pop

Juste avant leur dernière prestation, le vendredi 10 septembre, le public s’installe et les artistes se retirent pour se préparer. Peu après, le concert commence dans le décor singulier de l’ancien bassin du Bain Mathieu. Après une excellente première partie interprétée par Monogrenade, Chinatown entre en scène sous un tonnerre d’applaudissements et entame son répertoire avec « Pénelope ». Difficile de ne pas tomber sous le charme –si ce n’était déjà fait– de ce groupe, dont le plaisir et l’enthousiasme sont contagieux, et de leurs chansons aux rythmes entraînés et aux paroles poétiques. Avec plusieurs chansons inédites qui ont ponctué le concert et se retrouveront sur le prochain album, le public a été plus que gâté. Les musiciens confiaient plus tôt, entre stress, fébrilité et excitation, que présenter ces nouvelles chansons tenait de l’essai : « Ça nous donne confiance de les jouer, de les tester. » C’est un succès, le public a été séduit et on attend désormais avec impatience le prochain album pour pouvoir les réécouter.

Il faut dire que le groupe ne laisse rien au hasard pour conquérir son auditoire, confirmant ainsi que son talent dépasse le plan auditif. Les quelques moments d’improvisation sont particulièrement réussis, ce qui tombe plutôt bien puisque, pour Félix, l’improvisation n’a pas lieu d’être dans l’interprétation des chansons mais peut aisément trouver sa place pendant le show : « On n’est pas vraiment un groupe de jam, on est plus un groupe structuré. On s’est donné un peu de place pour improviser, mais les chansons sont par définition assez finies. À Yellowknife, pour la première fois de ma vie, j’ai joué un solo de guitare en arrière de ma tête, pour de vrai. C’est ce genre d’improvisation-là qu’on aime. »

Assurément l’un des meilleurs groupes montréalais du moment, Chinatown a donc offert un spectacle qui laisse présager non seulement un excellent deuxième album, mais, de manière générale, un avenir prometteur.


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