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Escarmouche politico-littéraire sur les Plaines d’Abraham

Le Délit met l’épaule à la roue et vous abreuve de quelques mots sur le Moulin à paroles qui s’est tenu à Québec la fine de semaine dernière.

Une foule bigarrée s’est rassemblée les 12 et 13 septembre derniers autour du kiosque Edwin-Bélanger, dans le parc des plaines d’Abraham, pour assister à un véritable marathon de lecture d’une durée totale de vingt-quatre heures, à l’occasion du 250e anniversaire de la bataille des plaines d’Abraham.

Tel le soleil éblouissant de ce milieu d’après-midi de fin d’été, de chaleureux applaudissements ont accueilli les principaux instigateurs du Moulin à paroles dès leur arrivée sur la scène. Sébastien Ricard, Sébastien Fréchette et Brigitte Haentjens ont inauguré la séance avec un bref mot d’introduction et la lecture d’un court, mais non moins touchant extrait de l’autobiographie de Gabrielle Roy, La détresse et l’enchantement. Pierre-Laval Pineault, coorganisateur et « maître de cérémonie », a ensuite pris le micro pour la longue célébration des mots à venir.

Les nombreux lecteurs se sont succédé pour évoquer le Québec dans son ensemble de façon chronologique, depuis l’arrivée de Jacques Cartier jusqu’à nos jours, avec plus de cent textes différents. Cet effort de réminiscence historique se devait, pour tenter de se rapprocher de la réalité, d’être constitué d’une mémoire à la fois littéraire, sociale et politique, sans passer outre les pans de l’histoire qui sont un peu plus ombrageux.

Ce fut chose faite, puisque le Moulin s’est abreuvé à des sources aussi différentes qu’un texte de Marguerite Bourgeois, une chanson de Zachary Richard, une recette de Jehanne Benoît et des écrits d’auteurs plus contemporains, comme Gratien Gélinas ou Anne Hébert, pour n’en nommer que quelques-uns. S’y sont entremêlés des textes plus politiques : entre autres, des extraits de la correspondance entre Wolfe et Montcalm, des fragments de discours d’Honoré Mercier et un « certain » manifeste. On a lu tout cela, puisque, quoiqu’on en dise, ce sont ces événements, tantôt heureux, tantôt malheureux, qui ont façonné la province telle qu’on la connaît aujourd’hui.

La vie des mots est ainsi liée à la connaissance qu’a l’homme de son univers : elle est mobile et insaisissable. Les mots qui meurent (qui se souvient du Refus Global et des automatistes?) ne détruisent pas la réalité qu’ils ont déjà recouverte —et en ce sens demeurent des valeurs culturelles liées à l’histoire des civilisations—, mais ils sont les symboles de l’activité humaine qui remet sans cesse en question ses rapports avec la réalité qui l’entoure.

Somme toute, la célébration s’est déroulée de façon calme et dans une ambiance pacifiste. Malgré les remous que certains redoutaient, la foule s’est laissé emporter par la magie verbale et s’est immiscée dans la mémoire de nos ancêtres.


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