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Expérimentation en planche à roulettes

Paranoid Park, dernier film de Gus Van Sant : une oeuvre belle, mais confuse et habitée par des personnages artificiels.

Paranoid Park, le dernier film de Gus Van Sant, est inspiré du livre du même nom écrit par Blake Nelson. On y fait la connaissance d’Alex Tremaine (Gabe Nevins), un amateur de planche à roulettes qui tente de mener sa vie, partagée entre l’école, sa copine (Taylor Momsen) et ses amis (Jake Miller, Lauren McKinney), tout en essayant d’accepter son implication dans un meurtre accidentel. La mort en question se produit dans les alentours d’un parc de skate de Portland, Paranoid Park. Le tout est raconté avec un schéma narratif discontinu intéressant, mais qui porte à confusion.

Gus Van Sant a connu beaucoup de succès il y a quelques années avec des films comme Good Will Hunting et Finding Forrester. Mais depuis, il est revenu à une esthétique plus expérimentale, dont sa dernière œuvre est un exemple. Comme Elephant, sorti en 2003, Paranoid Park ne met pas en vedette des comédiens professionnels, et ceci est évident à cause de la qualité du jeu de plusieurs d’entre eux. De plus, le texte sur lequel ils doivent se fier frise le médiocre, ce qui ne leur facilite pas la tâche. La narration offerte par le personnage d’Alex a des airs quelque peu artificiels et forcés, tout comme les répliques qui sont attribuées aux personnages adolescents. L’échec du texte les rend invraisemblables et, par conséquent, difficiles à aimer. Van Sant, qui a écrit le film en plus de le réaliser, semble avoir plus de succès avec ses personnages adultes, bien que cela s’explique peut-être par le peu de temps qu’ils passent à l’écran.

La réalisation de Paranoid Park intègre plusieurs styles différents, dont quelques parties plus floues et aux couleurs délavées qui aident à établir l’ambiance du film. Une ou deux scènes sont vraiment des chefs‑d’œuvre esthétiques, mais elles sont parmi les plus courtes et ne font que rappeler aux spectateurs ce dont Van Sant est capable à son meilleur. Ces scènes offrent aussi un contraste marquant avec les parties plus crues du film. Même si elles sont transitoires et peu nombreuses, les images de la victime du meurtre accidentel sont particulièrement graphiques et troublantes. Si les habitués d’émissions comme CSI n’auront probablement pas de problème à les regarder, les cœurs sensibles seront mis à rude épreuve.

Malgré ses nombreux défauts, Paranoid Park n’est pas un film sans attraits. La relation entre Alex et son petit frère Henry, par exemple, est empreinte d’humour : le cadet rappelle à l’aîné, en les imitant, des parties de Napoleon Dynamite qu’il a aimées. De plus, la trame sonore est très intéressante, offrant une variété impressionnante de styles musicaux allant des œuvres de Nino Rota (qui a aussi contribué à la trame sonore des films de la série The Godfather) à celles de Cool Nutz, en passant par Elliott Smith, dont on a pu entendre la chanson « Miss Misery » dans Good Will Hunting.

Les amateurs des œuvres les plus récentes de Gus Van Sant sauront probablement apprécier Paranoid Park, surtout pour sa réalisation non conventionnelle et l’originalité de sa narration. Il ne faut pas, cependant, s’attendre à un chef‑d’œuvre cohérent et touchant comme Good Will Hunting.


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