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L’identité québécoise sur la table d’opération

Le projet de loi 195 divise la nation sur la question linguistique : doit-on parler français pour être Québécois ?

Le projet de loi 195, déposé à l’Assemblée nationale le 18 octobre dernier par la chef du deuxième parti d’opposition, Pauline Marois, a pour but d’instituer une citoyenneté québécoise pour défendre la « culture distincte » de notre « nation ». La loi viserait à affirmer clairement ce qui distingue la population du Québec de celle du reste du Canada. La chef du Parti Québécois (PQ) définit ces particularités comme étant la langue française, la culture québécoise, le patrimoine historique de la province, le principe d’égalité entre les hommes et les femmes et l’attachement à la laïcité des institutions publiques du Québec.

La citoyenneté québécoise donnerait certains droits aux personnes la détenant, par exemple l’éligibilité lors d’élections municipales, scolaires et législatives, le droit de participer au financement public des partis politiques et le droit d’adresser des pétitions à l’Assemblée nationale pour le redressement de griefs.

Ce statut serait remis à tous ceux qui posséderaient la citoyenneté canadienne et seraient résidents du Québec au moment de l’entrée en vigueur de la loi. De plus, tous ceux qui seraient nés au Québec ou à l’étranger de parents québécois après l’adoption de cette loi se verraient aussi obtenir cette citoyenneté.
Ceux qui n’entrent pas dans une de ces catégories devront répondre à plusieurs critères afin de se voir octroyer le statut de citoyens québécois. En plus d’être citoyen canadien domicilié au Québec et d’y avoir résidé pendant un minimum de six mois, dont les trois mois précédant la demande, une personne demandant la citoyenneté québécoise devrait avoir une « connaissance appropriée » de la langue française, du Québec et des avantages conférés par la citoyenneté.

C’est ce dernier aspect qui anime la controverse au pays. Une telle citoyenneté s’opposerait au troisième article de la Charte des droits et libertés, celui qui stipule que tout citoyen canadien a le droit de vote et le droit d’être candidat aux élections législatives. Le premier ministre du Québec, Jean Charest, traite le projet de loi de « brouillon » et d’«inacceptable ». « Avant de présenter un projet, on vérifie la légalité de nos projets », a‑t-il lancé devant l’Assemblée nationale.

À Ottawa, la réponse est similaire. « Le Québec que je connais n’acceptera pas ce genre de choses », a déclaré le chef du Parti libéral canadien, Stéphane Dion, après avoir insinué que Mme Marois « était en train de déraper ».

La population québécoise se montre divisée sur la question : un sondage conduit par Léger Marketing le 24 octobre 2007 auprès de 513 Québécois rapporte que 44% des répondants sont en faveur du projet de loi 195 et que 46% se disent contre.

La chef péquiste affirme que son parti ne s’abstiendrait pas de faire tomber le gouvernement libéral minoritaire lors d’un éventuel vote de confiance. Il faudra voir si la stratégie de Mme Marois de réanimer le débat identitaire lui servira de véhicule pour amener le Québec à un nouveau référendum sur la souveraineté ou si cela nuira au grand projet du PQ.


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