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Conférence Climat 2050 : demain il sera trop tard !

La communauté scientifique s’est enfin mise d’accord sur le changement climatique : la température de notre planète bleue passe au rouge.

La conférence Climat 2050, tenue à Montréal des 24 au 26 octobre derniers, s’est voulue globale. Organisée conjointement par l’Institut Veolia Environnement (France), le Centre Pew sur les changements climatiques globaux (États-Unis) et la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie (Canada), cet événement démontre que le problème climatique dépasse les frontières géographiques et linguistiques. La conférence s’est concentrée sur des problèmes importants tels que le transport, les énergies renouvelables et les bâtiments verts, avec la participation de plus d’une cinquantaine d’experts qui ont présenté des solutions technologiques et politiques de lutte contre le changement climatique. Climat 2050 offrait la possibilité aux leaders des milieux gouvernementaux, corporatifs et académiques de partager leurs points de vue et de dialoguer avec les participants, simples citoyens ou magnats industriels.

La table ronde sur les bâtiments verts a été un des moments saillants des trois jours de conférence. Le terme « bâtiment vert » désigne les constructions qui font une meilleure utilisation des ressources telles que l’énergie, l’eau et les matériaux dans le but de réduire leur impact négatif sur la santé et l’environnement. Les bâtiments verts (en anglais, green buildings) constituent un pôle majeur dans la lutte contre le changement climatique parce que l’architecture est très présente dans le quotidien de toute personne. Pour les panélistes, la durabilité des bâtiments concerne chacun très directement, car chacun passe une majeure partie de sa vie à l’intérieur d’un bâtiment. Les panélistes se sont entendus pour reconnaître un « progrès réel » dans la durabilité des infrastructures, mais ont voulu insister sur le fait qu’il en reste beaucoup à faire dans ce domaine : beaucoup d’énergie peut encore être sauvée. Pour Marilyn Brown, du Georgia Institute of Technology, d’immenses progrès ont été réalisés en matière de bâtiment. En effet, l’emploi de l’énergie consommée a doublé, et parfois même triplé, grâce à la mise en place de mesures simples concernant la construction des nouveaux bâtiments verts. L’énergie est dite davantage productive lorsque, pour une même quantité consommée, plus de résultats peuvent être atteints, par exemple le chauffage plus efficace d’une maison. On a toujours cherché à augmenter l’efficacité de la consommation d’énergie, et ce, pour plusieurs raisons : d’abord parce que celle que nous utilisons pour le chauffage, l’éclairage et l’utilisation d’appareils électriques coûte cher ; ensuite, et surtout, parce que sa production est souvent très polluante et rejette de grandes quantités de CO2 dans l’atmosphère.

Cet avancement en matière d’efficacité pourrait nous amener à penser qu’il ne reste plus grandchose à faire dans ce secteur. Erreur, car l’augmentation de l’efficacité énergétique reste la solution la plus rapide, la plus propre et la moins chère pour lutter contre le changement climatique. Aux États- Unis, les bâtiments à eux seuls représentent 72% de l’électricité et 54% du gaz naturel consommés au pays.

Pour Robert Bennett, l’avancement qui se fait progressivement dans les bâtiments verts doit être perçu beaucoup moins positivement. Bennett a récemment rejoint la Clinton Climate Initiative (États-Unis), un programme qui vise principalement à établir un partenariat avec les plus grandes villes du monde afin de réduire leurs émissions de CO2. Le tableau qu’il dépeint n’est guère brillant : dans les villes, les plus grands émetteurs de CO2 sont les bâtiments. À New York, par exemple, les bâtiments produisent 80% des émissions de gaz à effet de serre. Aux États-Unis, ce problème est pris très au sérieux. Bennett rappelle que les villes ont une importance capitale dans la lutte contre le changement climatique. Il a voulu rappeler que s’il est reconnu que le gouvernement américain n’a pas ratifié le Protocole de Kyoto, il y par contre peu de publicité sur le fait que plus de 400 villes américaines, dont Seattle, Portland, Santa Monica et Oakland, ont signé ce même protocole. Bernard Saint- André est polytechnicien chez Dalkia, société détenue par le groupe Veolia, qui prend en charge les problèmes énergétiques des consommateurs et vise à satisfaire la demande en matière d’énergie, tout en améliorant les performances des bâtiments. Il annonce que le réchauffement climatique seul ne doit pas nous faire agir, mais aussi la hausse des prix énergétiques et une réalité que l’on peut qualifier de physique, à savoir que dans quelques dizaines d’années, les énergies fossiles deviendront de plus en plus rares. D’après le rapport Stern, paru en octobre dernier, plus on attend avant d’agir, plus cela va nous coûter cher.

D’où la nécessité, affirme Saint-André, de construire des bâtiments verts dès maintenant. Le taux de renouvellement des bâtiments est très lent ; pour les commerciaux, il est de 1,6% par an et pour les résidentiels, de 1%. Pour ces raisons, la plupart des bâtiments que nous construisons maintenant seront encore utilisés dans un demi-siècle.

C’est pourquoi, selon Saint- André, Dalkia finance et aide la création d’éco-quartiers. En France, à Narbonne et Lyon, par exemple, plusieurs milliers de logements en construction sont conçus pour émettre zéro CO2. À Lyon, par exemple, on utilise les réseaux de chaleur comme source d’énergie alternative. Les nouvelles constructions sauront produire de l’énergie et se chauffer grâce à un complexe sidérurgique adjacent qui génère d’énormes quantités de vapeur chaude pouvant être réutilisée. La vapeur sera captée, transformée en énergie et servira ainsi à chauffer plus de 650 habitations du quartier. Cette opportunité se présente souvent là où se trouvent des réseaux de chaleur et n’est pas suffisamment exploitée à l’heure actuelle. Dans l’Union européenne, 6% de l’énergie totale consommée est distribuée par des réseaux de chaleur. Si on doublait ce chiffre pour arriver à 12%, ce qui est très facilement faisable, on pourrait ainsi réduire la production de CO2 de l’Union européenne de 400 millions de tonnes, soit 10% de sa production totale annuelle.

Pour résumer, les panélistes ont estimé que le secteur du bâtiment vert fait de grands progrès par rapport aux autres secteurs de lutte contre le changement climatique, surtout grâce aux nouvelles technologies telles que les réseaux de chaleur ou la paraffine, une molécule qui régule la température et isole les maisons de manière très efficace. Il demeurerait tout de même un manque de structure, de réglementation et de volonté : ainsi, à Vancouver, où le secteur immobilier est en pleine expansion, la construction de bâtiments verts demeure très faible. En 2005, sur les 5 milliards de dollars investis, seulement 2% ont servi à la construction de bâtiments verts.


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